Industrie pharmaceutique en Afrique de l’Ouest : Diagnostic d'un secteur qui marche au ralenti



Une bonne politique d'intégration régionale et des accords de partenariat économique bien négociés peuvent servir de levier au développement d'une filière industrielle pharmaceutique locale, capable de générer d'importantes ressources, de contribuer à l'amélioration de nos systèmes de santé et à la qualité de vie au sein de la communauté. L'avis est de l'Ong internationale Enda Tiers-monde qui dresse le diagnostic d'un secteur à faible évolution.

L'insuffisance de moyens est le problème principal auquel se heurtent en permanence les systèmes de santé dans la sous-région ouest africaine. Selon la revue Passerelles d’Enda Tiers-monde, ce besoin se traduit par l'absence de traitement, la mortalité et la morbidité élevées du fait de la prolifération des fléaux tels que le sida, la tuberculose et le paludisme. La présence endémique de la quasi-totalité des maladies infectieuses, en voie de disparition dans les pays riches, comme la fièvre jaune, l'onchocercose et de nombreuses affections ‘exotiques’, est aussi diagnostiquée parmi les conséquences de cette carence de moyens. Ces maladies ne suscitent que peu d'intérêt pour la recherche et le développement dans les firmes pharmaceutiques de la sous-région.

D'après Enda, il existe un écart entre les besoins de santé primaire en médicaments et les ressources disponibles. Les exigences de rentabilité de l'industrie pharmaceutique ne laissent pas beaucoup d'espoirs à nos populations qui n'ont pas les moyens de se procurer des médicaments coûteux. L'enjeu actuel, selon la revue d’Enda Tiers-monde, est de concilier le profil et la pauvreté. La même source d'indiquer la cherté ou l'inefficacité des médicaments quand ils existent. ‘Une étude récente de l'Oms révèle que, sur mille deux cent trente-trois nouveaux médicaments de synthèse mis sur le marché entre 1975 et 1997, onze seulement sont destinés à lutter contre des maladies tropicales, et parmi ces onze, plus de la moitié ont été élaborés pour un usage vétérinaire’, mentionne la même source. Selon Oxfam International, entre 1999 et 2004, seules trois nouvelles molécules innovantes ciblant des maladies qui affectent les pays tropicaux ont été mises sur le marché, sur un total de 163 médicaments.

Le problème de la production pharmaceutique en Afrique de l'Ouest se situe par ailleurs au niveau de la protection de la propriété intellectuelle et du caractère discriminant de la recherche et du développement en faveur des pays riches. A titre d'exemple, cite Enda Tiers-monde, les personnes souffrant de la tuberculose - qui tue chaque année près de 2 millions de personnes - nécessitent un traitement de six mois, or le médicament le plus récent date de trente ans.

Ce manque de moyens handicapant n'a pas laissé indifférente l'Organisation mondiale de la santé (Oms). Elle a, en effet, élaboré et mis à la disposition des pays dans la sous-région une liste de médicaments génériques essentiels qui constituent la base des politiques pharmaceutiques des pays.

L'Oms a mis au point trois indicateurs visant la production pharmaceutique qu'il appartient de faire suivre aux organismes en charge des politiques nationales dans les pays, afin d'évaluer le potentiel et mesurer les performances de ce secteur. Il s'agit, entre autres, des indicateurs généraux qui indiquent la valeur totale de la production pharmaceutique nationale vendue et du nombre total d'établissements de fabrication de médicaments dans le pays. A ce niveau, la répartition potentielle de l'industrie varie selon les pays. Ainsi, le Nigeria couvre environ 50 % de ses besoins avec plus de cent trente unités de production. Le Ghana vient en seconde position avec une trentaine d'unités et une couverture de 25 à 30 % de son marché. Suit le Sénégal, avec Pfizer, Valdafric et Sanofi. La Côte d'Ivoire, avec cinq unités, couvre environ 8 % de ses besoins. Le Bénin a moins une unité, le Mali, avec une usine d'Etat et le Burkina Faso possède une unité de solutés massifs injectables.

Or, d'après les conclusions de l'Ong Enda Tiers-monde, la taille du marché sous régional et son poids économique peuvent motiver un transfert de technologie en faveur d'un réseau d'entreprises de production et de distribution des médicaments. Ainsi Enda Tiers-monde est convaincue qu'une bonne politique d'intégration régionale et des accords de partenariat économique bien négociés peuvent servir de levier au développement d'une filière industrielle pharmaceutique locale, capable de générer d'importantes ressources, de contribuer à l'amélioration de nos systèmes de santé et la qualité de vie au sein de la communauté. Mais, pour le moment, l'activité se limite à la production et la commercialisation de produits finis à partir de matières premières importées à plus de 95 %. Les articles du conditionnement secondaire étuis, notices et cartons peuvent, cependant, être produits localement. Il s'agit principalement de formes sèches : comprimés, gélules, sachets et très peu de formes liquides ou à usage externe. Les formes injectables se limitent aux solutés pour perfusion, là où certaines unités ne pratiquent que du conditionnement à partir de semi fini importé.

Abdoulaye SIDY
Wal Fadjri

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Economie du développement


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