Selon le rapport annuel du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM), la France concentre de fortes inégalités sociales, se distinguant ainsi des autres pays européens dans le domaine de la santé.
C’est un peu notre fierté. Pas une semaine ne se passe sans que l’on vante l’excellence du modèle social français et de son système de santé, que l’on ne rappelle les enjeux liés à sa préservation. Dans son rapport annuel, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) remet en cause ces idées reçues: "Il existe en France d'assez nettes inégalités sociales de santé si nous nous comparons aux autres pays européens", assène le document.
Le rapport distingue les facteurs liés au système de soins, telles que les inégalités d'accès aux soins, et les facteurs liés au milieu ou au mode de vie. Sur ce point, le HCAAM dit manquer d'indicateurs pour mesurer précisément le lien entre inégalités de santé et inégalités financières d'accès aux soins.
Un accès aux soins égal pour tous?
Rappelant que l'assurance maladie doit "garantir un égal accès aux soins pour tous", le HCAAM se demande "si elle contribue de manière adéquate à l'indispensable effort de correction ou de compensation qu'il faut mettre en place". "La réduction des inégalités sociales de santé est un enjeu des politiques publiques, mais aussi un enjeu pour l'assurance maladie et le système de soins financé par l'assurance maladie", souligne le rapport. L’institution rappelle à cet égard la nécessité de mettre en place une prise en charge globale "de l'état de santé de chacun" à travers un "parcours de soins" pour répondre aux inégalités de santé. Selon l’enquête SPS de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé. (IRDES) réalisée en 2010 et citée par le rapport, la part des personnes sans couverture complémentaire «ayant renoncé à des soins pour des raisons financières au cours des 12 derniers mois» est passée de 30,4% à 32,6% entre 2008 et 2010. Elle s’élevait à 25,1% en 2002.
Les inégalités augmentent avec l’âge
En se basant sur des données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) corrélées avec celles de l'assurance maladie, le HCAAM note que "sauf aux grands âges, la dépense totale de soins est très peu différenciée entre les différentes catégories socioprofessionnelles". Ainsi, chez les hommes de plus de 75 ans, une différence significative apparaît entre cadres et ouvriers: les ouvriers et les employés dépensent environ 1.700 euros de plus par an que les cadres, essentiellement parce qu'ils sont plus malades.
De même, la dépense de prothèses dentaires, qui entraîne des "reste à charge" importants, est sensiblement plus faible chez les ouvriers que les cadres alors que leurs besoins sont plus importants. Enfin, le taux de renoncement à des soins pour raisons financières des ouvriers et ouvriers non qualifiés est environ 1,5 fois plus élevé que celui des cadres.
Nos voisins européens n’ont pas à rougir
Autre enseignement de ce rapport : le système de santé français ne serait pas si efficace.
Provenant d’une étude internationale de 2008 sur les inégalités sociales de santé dans 22 pays européens, les données présentées dans le document montrent que les différences sociales de mortalité sont importantes en France en comparaison des autres pays d’Europe de l’Ouest. En faisant la comparaison entre pays des inégalités relatives du taux de mortalité toutes causes confondues en fonction du niveau d’éducation chez les hommes et les femmes, la France se caractérise par un indice d’inégalités –l’IRI- parmi les plus élevés par rapport aux pays d’Europe de l’Ouest. La Belgique, l’Italie, la Suède, la Norvège affichent notamment des indices moins élevés.
L’Indice Relatif d’Inégalité (IRI), un indice très usuel dans la mesure des inégalités sociales de santé, permet de rendre compte, par un chiffre unique, de l’écart de santé associé à un certain écart social. Concrètement, cet indice fait directement le croisement des «indices d’inégalités sociales» et des «indices d’inégalité d’état de santé», pour décrire directement une «inégalité sociale de santé».
Un accès aux soins plus facile pour les hauts revenus
En faisant la comparaison entre pays des inégalités relatives du taux de mortalité toutes causes confondues en fonction de la catégorie sociale chez les hommes, les inégalités de mortalité selon la catégorie sociale placent également la France dans une situation peu favorable relativement à d’autres pays européens comparables.
L’excellence des praticiens peut-elle gommer en partie ces inégalités? Pas vraiment. En effet, si la France fait partie des pays où le recours à un spécialiste est le plus élevé (0,6 visite par an par personne), la différence d’accès selon le revenu est la plus élevée, «marquant ainsi une nette inégalité dans le recours», note le Haut conseil.
Fabien Piliu
La Tribune
C’est un peu notre fierté. Pas une semaine ne se passe sans que l’on vante l’excellence du modèle social français et de son système de santé, que l’on ne rappelle les enjeux liés à sa préservation. Dans son rapport annuel, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie (HCAAM) remet en cause ces idées reçues: "Il existe en France d'assez nettes inégalités sociales de santé si nous nous comparons aux autres pays européens", assène le document.
Le rapport distingue les facteurs liés au système de soins, telles que les inégalités d'accès aux soins, et les facteurs liés au milieu ou au mode de vie. Sur ce point, le HCAAM dit manquer d'indicateurs pour mesurer précisément le lien entre inégalités de santé et inégalités financières d'accès aux soins.
Un accès aux soins égal pour tous?
Rappelant que l'assurance maladie doit "garantir un égal accès aux soins pour tous", le HCAAM se demande "si elle contribue de manière adéquate à l'indispensable effort de correction ou de compensation qu'il faut mettre en place". "La réduction des inégalités sociales de santé est un enjeu des politiques publiques, mais aussi un enjeu pour l'assurance maladie et le système de soins financé par l'assurance maladie", souligne le rapport. L’institution rappelle à cet égard la nécessité de mettre en place une prise en charge globale "de l'état de santé de chacun" à travers un "parcours de soins" pour répondre aux inégalités de santé. Selon l’enquête SPS de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé. (IRDES) réalisée en 2010 et citée par le rapport, la part des personnes sans couverture complémentaire «ayant renoncé à des soins pour des raisons financières au cours des 12 derniers mois» est passée de 30,4% à 32,6% entre 2008 et 2010. Elle s’élevait à 25,1% en 2002.
Les inégalités augmentent avec l’âge
En se basant sur des données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) corrélées avec celles de l'assurance maladie, le HCAAM note que "sauf aux grands âges, la dépense totale de soins est très peu différenciée entre les différentes catégories socioprofessionnelles". Ainsi, chez les hommes de plus de 75 ans, une différence significative apparaît entre cadres et ouvriers: les ouvriers et les employés dépensent environ 1.700 euros de plus par an que les cadres, essentiellement parce qu'ils sont plus malades.
De même, la dépense de prothèses dentaires, qui entraîne des "reste à charge" importants, est sensiblement plus faible chez les ouvriers que les cadres alors que leurs besoins sont plus importants. Enfin, le taux de renoncement à des soins pour raisons financières des ouvriers et ouvriers non qualifiés est environ 1,5 fois plus élevé que celui des cadres.
Nos voisins européens n’ont pas à rougir
Autre enseignement de ce rapport : le système de santé français ne serait pas si efficace.
Provenant d’une étude internationale de 2008 sur les inégalités sociales de santé dans 22 pays européens, les données présentées dans le document montrent que les différences sociales de mortalité sont importantes en France en comparaison des autres pays d’Europe de l’Ouest. En faisant la comparaison entre pays des inégalités relatives du taux de mortalité toutes causes confondues en fonction du niveau d’éducation chez les hommes et les femmes, la France se caractérise par un indice d’inégalités –l’IRI- parmi les plus élevés par rapport aux pays d’Europe de l’Ouest. La Belgique, l’Italie, la Suède, la Norvège affichent notamment des indices moins élevés.
L’Indice Relatif d’Inégalité (IRI), un indice très usuel dans la mesure des inégalités sociales de santé, permet de rendre compte, par un chiffre unique, de l’écart de santé associé à un certain écart social. Concrètement, cet indice fait directement le croisement des «indices d’inégalités sociales» et des «indices d’inégalité d’état de santé», pour décrire directement une «inégalité sociale de santé».
Un accès aux soins plus facile pour les hauts revenus
En faisant la comparaison entre pays des inégalités relatives du taux de mortalité toutes causes confondues en fonction de la catégorie sociale chez les hommes, les inégalités de mortalité selon la catégorie sociale placent également la France dans une situation peu favorable relativement à d’autres pays européens comparables.
L’excellence des praticiens peut-elle gommer en partie ces inégalités? Pas vraiment. En effet, si la France fait partie des pays où le recours à un spécialiste est le plus élevé (0,6 visite par an par personne), la différence d’accès selon le revenu est la plus élevée, «marquant ainsi une nette inégalité dans le recours», note le Haut conseil.
Fabien Piliu
La Tribune