Appliquée dans la plus part des Etats africains, la politique d'une langue unique officielle est considérée comme un frein à la démocratie et au développement, selon de nombreuses études. Une théorie entièrement approuvée par l'ensemble des panélistes prenant à la table ronde, initiées par le Réseau Lexicologie, Terminologie, Traduction (Ltt), sur le thème : «Les expériences de traduction et d'interprétation en milieux multilingues et les enjeux d'une formation universitaire». La rencontre, qui entre dans le cadre de la célébration hier, vendredi 21 février 2014 à l'Ucad II, de la Journée internationale des langues maternelles, a servi de cadre aux différents participants pour faire un plaidoyer en faveur d'une pluralité de langues officielles au Sénégal.
La table ronde organisée hier, 21 février, à l’Ucad II, par le Réseau Lexicologie, Terminologie, Traduction (Ltt), sur le thème: «Les expériences de traduction et d’interprétation en milieux multilingues et les enjeux d’une formation universitaire» a servi de cadre pour un plaidoyer en faveur de la pluralité des langues officielles au Sénégal. Les différents panélistes, requis pour entretenir le public sur la question du jour, sont tous unanimes sur le fait que la politique d’une langue unique officielle constitue un frein à la démocratie et au développement.
En effet, Fatou Kiné Camara, présidente de l’Association des Femmes Juristes du Sénégal (Ajs) reste persuader que le système d’une seule langue officielle est un facteur d’exclusion, de discrimination, donc un frein à la démocratie. Se basant sur les études de différents experts, notamment ceux du Programme des Nations Unies pour le Développement (Pnud), Fatou Kiné Camara a soutenu que «ce choix unique dresse des barrières et modère les avantages dont jouissent les individus, que ce soit sur les plan politique, social ou économique».
Un facteur d’exclusion
Selon la juriste, le fait est que ceux qui ne parlent pas la langue officielle ne peuvent pas participer aux débats législatifs car les projets de loi sont exprimés dans la langue officielle. Par conséquent, elle a trouvé que «cela participe à leur exclusion de l’éducation, de la vie politique et de l’accès à la justice de leur pays». Une chose qui lui a fait dire qu’il ne peut pas y avoir de réelle démocratie s’il n’y a qu’une seule langue officielle que les populations ne comprennent pas.
Dans son plaidoyer pour la pluralité de langues officielles au Sénégal, Fatou Kiné Camara a montré, de part ses différentes recherches, que le système de la langue officielle unique est aussi un frein pour le développement. En atteste, il y a une étude qui a fait le constat «d’une coïncidence entre les régions les plus pauvres économiquement, les moins techniquement avancés et celles où la langue de l’administration et de l’enseignement est foncièrement différente de celle du pays».
Pour étayer cette assertion, la présidente de l’Ajs a convoqué les études de Cheikh Anta Diop, en 1974, qui disait: «l’apprentissage du savoir et du savoir faire dans une langue étrangère tend à la sous utilisation des facultés intellectuelles en matière de science». Elle a aussi fait appel aux études des linguistes, qui affirment que pour développer les facultés intellectuelles de l’enfant il faut axer le savoir dans la langue qu’il maitrise, sa langue maternelle. Assez pour prendre l’exemple du sous développement au Sénégal où 90% de la population ne parlent pas français, alors que la langue officielle est le français.
La mondialisation ne doit pas pousser à se défaire des langues locales
Un avis partagé par Mme Anna Grzybowska, chef de l’unité programmation à la Direction générale des interprétations et conférences du Parlement européen. Pour elle, cette politique peut constituer un frein pour l’égalité des citoyens, car «elle limite l’éligibilité par rapport à la langue», tel que l’a compris le Parlement européen. Ainsi a-t-elle expliqué que la pratique du multilinguisme au Parlement européen répond aux exigences de s’ouvrir à tous les citoyens européens.
Dans le même registre Noël Muylle, Directeur général honoraire de l’Interprétation à l’Union Européenne a déclaré qu’«il n’y a pas de grandes et petites langues». Et de renchérir que «toutes les langues sont égales en Europe, selon le règlement numéro 1 en Europe». Selon lui, il ne faut pas se mettre à l’idée qu’il y a la mondialisation et qu’il faut se défaire des langues locales. Il a reconnu par ailleurs, qu’il y a des langues plus ou moins répandus à travers le monde.
Introduction du bilinguisme dans le système éducatif
Cependant, Noël Muylle, non moins expert du «projet Afrique» de création d’écoles de traduction pour l’Office des Nations Unies à Nairobi, a soutenu qu’il faut, pour une question de commodité, une langue internationale et une nationale. Un avis partagé par Fatou Kiné Camara. En effet selon elle, «aujourd’hui, si on veut gagner le défi, de l’enseignement très rapide de nos langues dans les écoles, il faut commencer par les manuels secondaires bilingues».
Elle a justifié cette position par le rapport du Pnud 2004, qui stipule que «les stratégies bilingues améliorent l’apprentissage, contribuent à une identité multiculturelle». Elle a toutefois précisé que l’objectif n’est pas de supprimer les langues occidentales. «L’objectif, pour le Pnud, est de donner aux langues locales un statut égale aux supérieures, la langue officielle» a-t-elle soutenu. Selon elle cela réduirait les abandons scolaires et renforcerait ainsi les compétences humaines.
Jean Michel DIATTA
Sud Quotidien
La table ronde organisée hier, 21 février, à l’Ucad II, par le Réseau Lexicologie, Terminologie, Traduction (Ltt), sur le thème: «Les expériences de traduction et d’interprétation en milieux multilingues et les enjeux d’une formation universitaire» a servi de cadre pour un plaidoyer en faveur de la pluralité des langues officielles au Sénégal. Les différents panélistes, requis pour entretenir le public sur la question du jour, sont tous unanimes sur le fait que la politique d’une langue unique officielle constitue un frein à la démocratie et au développement.
En effet, Fatou Kiné Camara, présidente de l’Association des Femmes Juristes du Sénégal (Ajs) reste persuader que le système d’une seule langue officielle est un facteur d’exclusion, de discrimination, donc un frein à la démocratie. Se basant sur les études de différents experts, notamment ceux du Programme des Nations Unies pour le Développement (Pnud), Fatou Kiné Camara a soutenu que «ce choix unique dresse des barrières et modère les avantages dont jouissent les individus, que ce soit sur les plan politique, social ou économique».
Un facteur d’exclusion
Selon la juriste, le fait est que ceux qui ne parlent pas la langue officielle ne peuvent pas participer aux débats législatifs car les projets de loi sont exprimés dans la langue officielle. Par conséquent, elle a trouvé que «cela participe à leur exclusion de l’éducation, de la vie politique et de l’accès à la justice de leur pays». Une chose qui lui a fait dire qu’il ne peut pas y avoir de réelle démocratie s’il n’y a qu’une seule langue officielle que les populations ne comprennent pas.
Dans son plaidoyer pour la pluralité de langues officielles au Sénégal, Fatou Kiné Camara a montré, de part ses différentes recherches, que le système de la langue officielle unique est aussi un frein pour le développement. En atteste, il y a une étude qui a fait le constat «d’une coïncidence entre les régions les plus pauvres économiquement, les moins techniquement avancés et celles où la langue de l’administration et de l’enseignement est foncièrement différente de celle du pays».
Pour étayer cette assertion, la présidente de l’Ajs a convoqué les études de Cheikh Anta Diop, en 1974, qui disait: «l’apprentissage du savoir et du savoir faire dans une langue étrangère tend à la sous utilisation des facultés intellectuelles en matière de science». Elle a aussi fait appel aux études des linguistes, qui affirment que pour développer les facultés intellectuelles de l’enfant il faut axer le savoir dans la langue qu’il maitrise, sa langue maternelle. Assez pour prendre l’exemple du sous développement au Sénégal où 90% de la population ne parlent pas français, alors que la langue officielle est le français.
La mondialisation ne doit pas pousser à se défaire des langues locales
Un avis partagé par Mme Anna Grzybowska, chef de l’unité programmation à la Direction générale des interprétations et conférences du Parlement européen. Pour elle, cette politique peut constituer un frein pour l’égalité des citoyens, car «elle limite l’éligibilité par rapport à la langue», tel que l’a compris le Parlement européen. Ainsi a-t-elle expliqué que la pratique du multilinguisme au Parlement européen répond aux exigences de s’ouvrir à tous les citoyens européens.
Dans le même registre Noël Muylle, Directeur général honoraire de l’Interprétation à l’Union Européenne a déclaré qu’«il n’y a pas de grandes et petites langues». Et de renchérir que «toutes les langues sont égales en Europe, selon le règlement numéro 1 en Europe». Selon lui, il ne faut pas se mettre à l’idée qu’il y a la mondialisation et qu’il faut se défaire des langues locales. Il a reconnu par ailleurs, qu’il y a des langues plus ou moins répandus à travers le monde.
Introduction du bilinguisme dans le système éducatif
Cependant, Noël Muylle, non moins expert du «projet Afrique» de création d’écoles de traduction pour l’Office des Nations Unies à Nairobi, a soutenu qu’il faut, pour une question de commodité, une langue internationale et une nationale. Un avis partagé par Fatou Kiné Camara. En effet selon elle, «aujourd’hui, si on veut gagner le défi, de l’enseignement très rapide de nos langues dans les écoles, il faut commencer par les manuels secondaires bilingues».
Elle a justifié cette position par le rapport du Pnud 2004, qui stipule que «les stratégies bilingues améliorent l’apprentissage, contribuent à une identité multiculturelle». Elle a toutefois précisé que l’objectif n’est pas de supprimer les langues occidentales. «L’objectif, pour le Pnud, est de donner aux langues locales un statut égale aux supérieures, la langue officielle» a-t-elle soutenu. Selon elle cela réduirait les abandons scolaires et renforcerait ainsi les compétences humaines.
Jean Michel DIATTA
Sud Quotidien