Rapport du Fmi : La stabilité financière s'améliore, les risques restent élevés



La crise a entraîné des pertes mondiales estimées à 3 400 milliards de dollars alors qu'une nouvelle détérioration des prêts bancaires est attendue. Les prévisionnistes du Fmi soutiennent que les décideurs se doivent d'assurer une expansion suffisante du crédit pour soutenir la reprise économique, concevoir des stratégies de sortie appropriées, et gérer les risques liés à l’importance des emprunts publics.

La stabilité financière dans le monde s’est améliorée après les efforts consentis pour contrer la crise et la reprise de la croissance. Les risques globaux restent, néanmoins, élevés et le risque de retournement demeure non négligeable. Le rapport du Fonds monétaire international sur la stabilité financière dans le monde, publié le 30 septembre 2009, évalue les pertes mondiales, de 2007 à 2010, à environ 3 400 milliards de dollars. Ces chiffres sont inférieurs à ceux prévus dans le précédent rapport du genre, du fait de la hausse de la valeur des titres. Toutefois, les institutions financières restent confrontées aux défis de reconstituer leurs fonds propres, consolider leurs gains et s’affranchir progressivement du soutien financier public.

La dépréciation des titres détenus par les institutions financières a commencé à s’atténuer, mais la détérioration du crédit va continuer d’entraîner un accroissement des pertes accusées sur les prêts pendant les prochaines années, prévoit le Fmi. La révision à la baisse, par les banques, de la valeur comptable de leurs portefeuilles de prêts et de titres entre le milieu de 2007 et le milieu de 2009 a atteint 1 300 milliards de dollars. Les prévisionnistes du Fmi estiment à 1 500 milliards de dollars les pertes de valeurs réelles et potentielles jusqu’à la fin de 2010 qui n’ont pas encore été comptabilisées.La croissance du crédit au secteur privé a, par ailleurs, continué de se contracter dans les grands pays. La faiblesse de l’activité et le désendettement des ménages freinent la demande de crédit du secteur privé et la capacité de financement des secteurs bancaire et non bancaire reste limitée. Les besoins globaux d’emprunt ne diminuent toutefois pas aussi rapidement en raison de l’accroissement des déficits publics. Ce qui aura pour effet de limiter l’offre de crédit.

Les risques se dissipent dans les pays émergents

L’Asie et l’Amérique latine ont particulièrement bénéficié de la stabilisation des marchés principaux et d’une reprise des entrées d’investissements. Les refinancements et les risques de défaillance restent, néanmoins, relativement élevés dans le secteur des entreprises ; celles-ci devant refinancer une dette en devises de 400 milliards de dollars au cours des deux prochaines années. En revanche, la situation est préoccupante dans les pays émergents d’Europe, où les recettes des entreprises sont en forte baisse sous l’effet de la récession et où plusieurs grosses faillites ont déjà eu lieu. La même situation est observée en Asie et en Amérique latine où les petites entreprises sont confrontées aux mêmes problèmes.En outre, les pays fortement tributaires des ressources extérieures et des financements internationaux sont devenus vulnérables. Le transfert des risques du secteur privé sur les bilans publics fait craindre des pressions à la hausse sur les taux d’intérêt à plus long terme, si les gouvernements ne font pas montre d’un attachement crédible à la stabilité budgétaire et n’ancrent pas les attentes. Il est attendu que le montant net des émissions souveraines diminue sur la période 2010-2012, mais il restera probablement bien supérieur à la moyenne des années 2002 à 2007 ; les déficits budgétaires restant élevés. Le rapport du Fonds monétaire relève que les risques systémiques ont diminué. Toutefois, les pouvoirs publics ont, encore, des défis à relever. Ils doivent assurer une croissance suffisante du crédit pour soutenir la reprise économique qui s’amorce ; concevoir des stratégies de sortie appropriées ; gérer les risques liés aux pressions qui pèsent sur les bilans des administrations publiques ; et maintenir l’équilibre entre la réglementation et les forces du marché en réduisant les risques systémiques futurs.

Reprise des marchés de titrisation

Le Fmi suggère la réduction des incitations aux ‘surenchères de notation’ et l’arbitrage des obligations réglementaires liées aux notations, en veillant à ce que les agences de notation révèlent leur méthodologie et rendent publiques les données relatives à leurs notations, tout en réduisant la dépendance des notations au plan réglementaire. Les obligations de rétention doivent être adaptées au type de produit financier considéré, à ses risques sous-jacents et aux perspectives économiques, faute de pouvoir assurer ce type de rétention. Les décideurs devraient, cependant, mettre en place un dispositif de rétention sub-optimal qui couvre la plupart des situations. Le renforcement de la communication et de la transparence des états financiers, notamment dans le cas des engagements hors bilan, sont fortement préconisés. En revanche, la rémunération des titriseurs doit être axée sur un horizon au plus long terme et les produits titrisés doivent être simplifiés et normalisés afin d’améliorer la liquidité ; mais aussi de faire en sorte que les prix reflètent mieux les transactions effectives.

Interventions sur les marchés durant les crises

Au vu de l’objectif à court terme consistant à apaiser les marchés, les annonces d’injections de liquidités ont été les plus efficaces durant les phases initiales de la crise ; tandis que les recapitalisations bancaires et les rachats d’actifs par l’Etat ont été les plus efficaces durant ses phases ultérieures. S’agissant de l’efficacité à long terme, les prix de marché de certains instruments financiers ont commencé à se stabiliser et l’émission de titres de créance a repris en réaction aux mesures de crise sans précédent adoptées par les pouvoirs publics. Le retrait des interventions de crise devrait être guidé par le souci du rétablissement d’une confiance durable dans la santé des institutions et des marchés financiers. Une communication claire sur le ‘dénouement’ de ces mesures est importante pour préserver la stabilité du marché et la gestion des attentes.

L’atténuation des tensions dans le secteur bancaire et un retour relatif à l’autosuffisance sur les marchés obligataires les plus touchés sont autant de signes prometteurs. Ils semblent indiquer que les interventions publiques les plus vastes que le secteur financier ait connues depuis la Grande dépression ont contribué à maîtriser les craintes de risque systémique. La riposte des pouvoirs publics à la crise a été rapide. Et elle a, dans une certaine mesure, réussi à calmer les marchés financiers et à rétablir leur fonctionnement. A mesure que la crise de liquidité cédait le pas à une crise de solvabilité, les annonces de recapitalisation bancaire et d’achats d’actifs par les pouvoirs publics ont été des plus efficaces, car ces mesures ont contribué à alléger le risque de crédit.

Quand et comment les pouvoirs publics devraient-ils retirer les mesures de crise ?

De manière générale, le retrait des interventions de crise des banques centrales et des gouvernements dans le système financier doit être guidé par le souci du rétablissement d’une confiance durable dans la santé des institutions et des marchés financiers. Comme les conditions économiques et financières changent d’un pays à l’autre, aucune règle uniforme ne permet de préciser quand et dans quel ordre les pouvoirs publics devraient démonter les dispositifs mis en place en période de crise. Cela dit, certains principes généraux peuvent s’appliquer. La stratégie à suivre pour définir le moment et les modalités du retrait doit prévoir la gestion des attentes des marchés ainsi qu’une communication claire de ce moment et de ces modalités. Il importe de planifier pour prévenir les risques d’arbitrage entre secteurs ou entre pays.

Khady BAKHOUM
Wal Fadjri

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