ETUDE DEVELOPPEMENT LOCAL ET DECENTRALISATION, SENEGAL - TOGO - ZIMBAWE

INTER RESEAUX Développement rural
Groupe Développement local et décentralisation



 


 

 

 

 

 

 

 

 

 



SYNTHESE DES RESULTATS ET COMPTE RENDU DE L'ATELIER INTERNATIONAL DE RESTITUTION (Dakar, avril 1998)

 

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Septembre 1998

 

 

 


S O M M A I R E

 

 

PROBLEMATIQUE DE L'ETUDE

 

THEMES ET POINTS D'ANALYSE

 

Première partie LES RESULTATS  DES ETUDES

 

1 - Synthèse de l'étude Togo

 

     1.1 - Les objectifs de l'étude définis par le groupe Togo

     1.2 - Méthodologie et déroulement

     1.3 - Résultats de l'étude

 

2 - Synthèse de l'étude Sénégal

 

2.1 - Les objectifs de l'étude rappelés et repris par le groupe Sénégal

2.2 - La méthodologie

2.3 - Les résultats des études

2.4 - Conclusion et recommandation issues des études

 

3 - Synthèse de la mission au Zimbabwe

 

3.1 - Les objectifs de la mission

3.2 - Méthodologie et déroulement

3.3 - Les résultats

3.4 - Perspectives

 

Deuxième partie : SYNTHESE DE L'ATELIER INTERNATIONAL DE DAKAR

 

1 - Présentation des invités du Zimbabwe

 

2 - Présentation des travaux du groupe Togo et débats

 

3 - Présentation des travaux du groupe Sénégal

 

4 - Témoignages sur les évolutions du développement local en France

 

5 - Les questions à approfondir définies par les 3 groupes de travail

 

6 - Perspectives pour les groupes locaux et le groupe France

 

 


 

PROBLEMATIQUE DE L'ETUDE

 

Pour le Groupe France, le "développement local" est caractérisé par un ensemble d'actions cohérentes entre elles, menées par des acteurs locaux qui souhaitent ainsi améliorer leurs conditions de vie dans leur territoire.

 

Ces actions s'appuient sur la valorisation des ressources locales et sont gérées collectivement dans le cadre d'instance de décision auxquelles participent les différentes catégories d'acteurs locaux.

 

Et plus précisément :

 

-    un ensemble d'actions cohérentes, c'est-à-dire, non pas seulement une succession de micro-réalisations sans articulation réelle entre elles, mais un programme collectif de la société pour changer les choses en réalisant des actions en fonction d'un schéma, ou d'une vision globale.

 

Ces actions ne sont pas imposées de l'extérieur mais nées de la volonté et de l'initiative des acteurs locaux eux-mêmes.

 

-    les acteurs locaux recoupent les organisations rurales, les associations traditionnelles et modernes, les opérateurs privés, les élus des communes, les agents de l'Etat, les collectivités territoriales.

Les administrations et les services techniques peuvent jouer un rôle d'appui.

 

-    le territoire est un espace de solidarité dans lequel les habitants ont une histoire commune à laquelle ils sont attachés collectivement et individuellement.

C'est un espace cohérent pour différentes raisons : écologique, économique, culturelle, politique, lié aux migrations.

 

-    la valorisation des ressources locales concerne à la fois les ressources humaines du territoire mais aussi la mobilisation des ressources techniques, matérielles, financières locales qui vont contribuer au financement du développement en étant complétées par des ressources externes au territoire.

 

-    des instances locales de décision et de gestion sont constituées de représentants des différentes catégories d'acteurs locaux qui contrôlent de plus en plus de pouvoir exercé au niveau du territoire.

 

Pour nous, la "décentralisation" est la délégation par l'état central d'une partie de ses compétences et de ses ressources à des collectivités d'élus.

 

Dans ce cadre, des communes sont mises en place ainsi que d'autres collectivités territoriales (Conseils Généraux et Régionaux).

 

Dans les pays africains où des processus de décentralisation sont en cours, de nouveaux acteurs apparaissent : les élus locaux. Et de nouveaux enjeux également : articulation entre les organisations populaires (rurales, urbaines) existantes et les conseils communaux, relations entre le niveau local et le niveau national en matière de répartition des pouvoirs, en matière de répartition des ressources....

 

Parce qu'elle souhaite la responsabilisation des acteurs locaux dans la gestion de leurs affaires, la décentralisation peut renforcer ou contrarier les dynamiques de développement local.

 

í        Complémentarités ou rivalités ? Synergies ou frictions ? Les interactions entre ces deux processus, celui du développement local et celui de la décentralisation, constituent un point central de l'étude.

 

 

THEMES ET POINTS D'ANALYSE

 

 

Les thèmes suivants sont ceux qui intéressent particulièrement le Groupe de travail "Développement Local et Décentralisation". Ils représentent en quelque sorte "la préoccupation du Nord" dans ce travail.

 

Ils ne constituent pas pour autant un cadre strict et fermé : au contraire notre Groupe souhaite mieux connaître les "préoccupations du Sud" et propose que celles-ci soient intégrées dans la présente étude afin d'être le plus utile possible aux partenaires africains des trois pays choisis.

 

Toute liberté est donc laissée aux Comités de Pilotage africains afin qu'ils ajoutent leurs propres préoccupations aux présents termes de référence de l'étude.

 

Liberté également pour reformuler les questions lorsque celles-ci ne correspondent pas aux situations des pays concernés. Il est également possible de retirer les questions qui ne sembleraient pas pertinentes.

 

Conscient de la bizarrerie que peut constituer le terme "Développement Local", le Groupe est ouvert à d'autres suggestions pour nommer autrement ce processus ! Ouvert aussi à tout bouleversement de ce concept pour mieux appréhender la réalité telle qu'elle est vécue sur le terrain par les partenaires africains.

 

Les acteurs du développement local

 

Le point de départ du processus :

 

-    Qu'est-ce qui a provoqué une réaction et la décision d'agir, quelle est l'histoire de l'action des gens de ce territoire ?

-    Qu'est-ce qui fait le ciment entre les gens d'ici ?

-    Quel est le rôle de la culture dans tout cela (dans l'idée de démarrer quelque chose et dans la réalisation des activités) ?

 

Les acteurs locaux :

 

-    Quelles sont les relations principales entre les différentes catégories d'acteurs locaux les plus actifs : organisations paysannes, autres types d'organisations rurales, élus, politiciens, services techniques, autorités locales telles que chef de village, chefs religieux, chefs de terre, autorités administratifs telles que préfet, sous-préfet, chef de canton, et autres types d'acteurs locaux ?

-    Quelle est l'histoire de la vie des personnes qui ont conduit les autres dans l'action ? Par leurs témoignages (filmés si possible) reconstituer l'histoire des actions.

-    Certaines catégories d'acteurs telles que les femmes, les jeunes, les vieux, les éleveurs, ont-ils joué un rôle spécial ? Ont-ils contribué à la réussite ou au contraire ont-ils essayé de bloquer les actions car n'y ayant pas intérêt ?

-    Voit-on apparaître de nouveaux métiers liés aux nécessité du développement local ?

 

Les instances de gestion du développement local

 

-    Quelles sont les instances et les modalités de discussion, consultation, négociation, et de prise de décision : assemblées générales, comités locaux de développement, commissions paysannes... ?

D'une manière générale pour la planification de l'aménagement du territoire ? Et pour les différents domaines d'activités : ressources naturelles, foncières en particulier.

-    Quelles sont les manières de gérer les conflits ?

-    Quelles sont les différentes ressources financières existantes pour financer le développement du territoire :

*    les sources internes (impôts, cotisations, épargne, revenus générés par des activités spéciales telles que champs collectifs...),

*    les sources externes (contributions de l'état central, aide des projets...).

-    Quelles sont les instances et les modalités de gestion locale de ces financements ?

-    Quelles sont les activités financées à crédit et celles financées par des subventions ? Quelles sont les procédures de financement ?

-    Quels sont les méthodes et les outils de travail de ces différentes instances ?

 

 

Résultats des initiatives de développement local

 

-    Quels sont les résultats des différentes actions menées dans le domaine agricole, foncier, ressources naturelles, santé, éducation, artisanat, culturel, sportif... ? En termes quantitatifs : production, revenus, nombre d'emplois, etc.

-    Mais également en termes qualitatifs : organisation des gens, identité culturelle ou de groupe, qualité de vie, communication entre les gens, etc.

 

Le développement local et la décentralisation

 

-    Quels sont les impacts, positifs et négatifs, de la décentralisation sur les actions de développement ? Les collectivités locales facilitent-elles ou freinent-elles le travail des organisations rurales ?

-    Et inversement, quel est l'impact des expériences de développement sur les instances nées de la décentralisation ?

Les responsables paysans participent-ils aux conseils communaux et autres instances ?

Les compétences et savoir acquis par les acteurs locaux sont-ils utiles aux collectivités locales (conseils, délégation de tâches...) ?

La décentralisation a-t-elle permis de générer de nouvelles ressources financières pour le développement local ? Existe t-il par exemple des fonds disponibles au niveau des communes et autres collectivités locales ?

Ou au contraire a-t-elle conduit à réduire les ressources endogènes que les gens investissaient auparavant dans le développement en exerçant des ponctions sur les revenus par le biais de nouveaux impôts locaux ?

-    La décentralisation a-t-elle permis de construire de nouveaux espaces de concertation et de prise de décision ? A t-elle augmenté la marge de manoeuvre des ruraux ?

 

Par rapport à l'environnement plus global

 

-    Comment s'articule le travail réalisé au niveau du territoire avec des niveaux plus larges comme celui du département, de la province, de la région ou de la capitale ?

-    Quels sont les atouts et les problèmes posés par un travail au niveau local ? Sur les plans économique, technique, social, culturel, politique, religieux, etc. ?

-    Dans votre territoire, qu'elles sont les relations entre les villages, les petites villes et la capitale ? Cela permet-il d'expliquer le succès ou les difficultés des actions de développement local ?

 

Propositions de méthodes et d'outils pour le développement local

 

-    Quelles sont les manières de faire, méthodes, outils qui vous paraissent bonnes et qui pourraient être utiles à d'autres ?

-    D'après vous, faut-il susciter des dynamiques de développement lorsqu'elles n'existent pas ? Ou bien est-ce trop risqué car cela aboutit à créer de fausses dynamiques qui ne se mettent en place que pour profiter de l'aide ?

-    Comment faire, quelles précautions prendre pour éviter les dérives et dérapages ?

-    Quelles sont les propositions pour améliorer les instances de gestion du développement local ?

-    Comment améliorer les mécanismes de financement local ?

-    Comment mieux échanger les expériences ?

-    Autres propositions ?

 


 

Première partie

 

RESULTATS DES ETUDES

(Togo - Sénégal - Zimbabwé)

 

 

 

1.         SYNTHESE DE L'ETUDE TOGO

 

1. 1      Les objectifs de l'étude définis par le groupe Togo

 

Le Groupe Togo a, selon ses propres termes, "recentré" les objectifs de l'étude sur "la définition du concept de développement local et son application dans le contexte togolais en lien avec le processus de décentralisation"[1].

 

Le recentrage de l'objectif général s'est appuyé sur un certain nombre de constatations faites par le Groupe Togo qui tendaient à démontrer que la caractérisation du développement local proposée dans les termes de référence initiaux n'était pas totalement adaptée.

 

Les principales constatations sont rapportées de la manière suivante :

 

·     Les acteurs locaux

 

"Les acteurs locaux organisés pour le développement local sont rares. Les hommes et les femmes s'engagent beaucoup plus dans des actions individuelles ou des activités salariales pour leur survie. Les formes d'organisation traditionnelles d'entraide disparaissent, cédant la place à des organisations de type moderne qui n'arrivent pas à déclencher des dynamiques organisationnelles pour le développement local". "Les opérateurs privés sont installés dans les villes et représentent surtout des intérêts économiques extérieurs qui ne favorisent pas toujours le développement local". "L'appui-accompagnement que doivent jouer les administrations et les services techniques ne se réalise pas."

 

·     Le territoire

 

"Le territoire n'est pas compris par ses habitants comme un espace de solidarité qu'il faut continuellement créer et gérer".

 

·     La valorisation des ressources locales

 

"La valorisation des ressources locales est une problématique qui se pose aussi en termes de création et de gestion".

 

"C'est aussi une question de gestion rigoureuse des ressources naturelles, humaines, matérielles, techniques et financières. Cette gestion rigoureuse s'impose car les ressources existantes sont menacées. Elles deviennent rares (quantité), elles perdent aussi de leur valeur (qualité)".

 

·     La constatation des différences existantes avec la définition du développement local proposée par le Groupe France dans les termes de références.

 

"Le manque de structuration pour un développement local fait que des instances de décision et de gestion n'arrivent pas à se constituer réellement, à s'organiser, à s'affirmer et à prendre leur responsabilité dans le contrôle de pouvoir exercé au niveau du territoire".

 

·     La constitution d'instances locales de décision et de gestion.

 

Cinq objectifs opérationnels ont été définis : recueillir des données sur le concept de développement local et son application dans le contexte togolais ; inventorier des expériences de développement local dans les cinq régions économiques du pays ; étudier certaines de ces expériences pour dégager des pistes de réflexions sur l'évolution des approches et des méthodes concernant le développement local ; identifier des outils les plus opérationnels possibles pour appuyer les initiatives de développement local.

 

1.2       Méthodologie et déroulement

 

Le groupe "Développement Local et Décentralisation/Togo "s'est créé à partir de personnes qui étaient en relation individuellement avec l'Inter-Réseaux (correspondance, abonnement à Grain de Sel) autour de la réalisation de cette étude. Constitué d'une trentaine de personnes, le Groupe a mis en place un Comité de Pilotage de l'étude comprenant 10 membres (2 membres par région)[2] avec un bureau exécutif de 3 personnes (coordonnateur, secrétaire et trésorier). Pour la réalisation proprement dite de l'étude, le Comité de Pilotage a retenu l'appui technique du bureau d'étude "BERAF/DLP"[3]. Le bureau exécutif a travaillé en étroite concertation avec le BERAF/DLP.

 

L'étude a été menée en plusieurs étapes :

 

·   Choix "d'agents de collecte" d'informations sur le terrain dans les cinq régions économiques et administratives du pays.

·   Etude documentaire du BERAF sur le concept de développement local.

·   Rédaction de notes de travail et formation des agents par le BERAF sur le développement local et la collecte de données.

·   Collecte des informations générales et analyse approfondie de 15 expériences. Missions d'appui du BERAF et du coordonnateur dans chaque région.

·   Synthèse et analyse des résultats par le BERAF.

·   Tenue d'un atelier de restitution de l'étude avec les membres du Groupe.

·   Atelier national comprenant les membres du Groupe et des partenaires extérieurs (ONG, administrations, Bailleurs).

 

Au total 6 rencontres nationales, 5 rencontres régionales et 5 séances de travail avec les agents sur le terrain[4] se sont tenus de décembre 1996 à février 1998.

Le rapport de l'étude comprend deux volumes : un volume de synthèse et un volume rassemblant les expériences de développement local choisies pour l'étude approfondie dans les cinq régions administratives /économiques du Togo. L'atelier national en mars 1998 a réuni 48 personnes et a permis la restitution et l'analyse des résultats.

 

1.3       Résultats de l'étude

 

Les résultats de l'étude peuvent être synthétisés selon trois volets : l'inventaire des organisations de base et des structures d'appui dans les cinq régions économiques du pays, les points de vue sur le développement local dans le contexte togolais, les liens entre développement local et décentralisation.

 

1.3.1    Rappel du contexte

 

Le Togo a été fortement marqué depuis les indépendances par un développement décidé et mis en oeuvre de manière descendante en adoptant des "plans quinquennaux de développement" qui avaient pour objectif de réduire les disparités régionales et de promouvoir le développement régional et local. Les résultats de ces plans ont été assez insatisfaisants.

Outre une centralisation des pouvoirs entre les mains d'un Etat omnipotent, il l'a été aussi du point de vue géographique : les villes ont surtout été privilégiées et en particulier Lomé.

 

Une politique de changements a été entamée depuis 1992 : préparation d'une réforme de décentralisation (la loi de décentralisation a été votée en assemblée nationale le 11 février 1998, ses décrets d'application ne sont pas encore connus), ouverture au secteur privé... Cependant, une crise économique importante affecte durablement le pays depuis le début des années 1990 : baisse des investissements privés extérieurs, ajustement structurel, dévaluation du Franc CFA etc.

 

1.3.2    Inventaire des organisations de base et des structures d'appui et études de cas

 

Pour chacune des régions et pour presque chaque préfectures en leur sein le groupe a recensé d'une part, les organisations de base (groupements de production et de commercialisation, groupements agricoles villageois, comités villageois de développement (CVD)) et, d'autre part les organisations d'appui (ONG, Eglises...).

 

195 organisations[5] ont été recensées ainsi que leurs types d'activités (essentiellement agricoles). 73 structures d'appui gouvernementales et non gouvernementales ont également été identifiées.[6]

 

D'après les résultats de l'inventaire réalisé par le groupe Togo, un nombre non négligeable d'organisations de base existe. Cependant, excepté peut-être dans la Région des Plateaux, elles sont soit peu structurées (actions de productions agricoles très ponctuelles), soit relativement peu représentatives ayant été créées par les services techniques ou pour pouvoir capter des financements issues d'ONG ou de projets de développement.

 

Quinze cas ont été retenus pour une étude approfondie : huit groupements, cinq comités villageois et deux privés. D'après l'étude, il semble que les populations s'engagent dans des "actions concrètes", qu'elles s'intéressent "beaucoup plus aux activités génératrices de revenus pour des solutions aux problèmes des membres dans la production, le stockage, la transformation, la commercialisation des produits agricoles..." "qu'à des activités socio-économiques (cases de santé, salles de classes, retenues d'eau, forages...) excepté lorsqu'il y a l'appui des partenaires extérieurs".

 

1.3.3    Les points de vue sur le développement local

 

L'étude présente différents points de vue recueillis dans chacune des régions.

 

La synthèse de ces points de vue peut-être faite selon deux axes : par type d'acteur et par région.

 

Le passé très centralisateur a laissé une empreinte forte dans les conceptions du développement des différents acteurs.

 

Les représentants des services administratifs interviewés disent être convaincus de la nécessité d'impliquer les populations locales dans les choix de développement qui les concernent mais aussi dans le financement de ces choix dans le cadre de projets de développement. Il est vrai que devant le manque de succès des plans quinquennaux, il a été nécessaire de repenser le système de développement et de donner la parole aux bénéficiaires. De cette nécessité sont nés différents programmes d'appui à la mise en place d'infrastructures de base dont l'identification est faite par les populations. Ces programmes sont mis en oeuvre directement par les services de l'Etat ou confiés à des ONG.

 

Pour la majorité des associations de base, c'est "l'Etat qui doit assurer le développement", les décisions, les ressources doivent venir de lui. L'Etat est mentionné à la fois comme "la providence" qui apporte tout, où plus exactement qui devrait tout apporter, mais aussi comme la principale source de ponction sur les ressources locales sans retombées perceptibles.

 

Si dans la plupart des régions, le développement est perçu comme devant venir "d'en haut" que ce soit par les services techniques  (sans toutefois beaucoup d'illusion sur la réalité d'une telle manne) ou par les projets avec l'appui des bailleurs de fonds, on constate toutefois que dans la région des Plateaux, le discours est un peu différent. L'Etat est plutôt mentionné comme devant être un facilitateur. Ceci est sans doute à mettre en relation avec le fait que la Région des Plateaux est la plus "riche". Elle dispose en effet des ressources liées à la filière café-cacao. C'est aussi cette région qui est la plus revendicatrice. Si l'Etat prélève des ressources, financières ou naturelles, il devrait le faire avec l'assentiment des autochtones et s'engager à ce que l'essentiel des retombées économiques leur reviennent.

 

Pour toutes les régions, les appuis/conseils sont peu nombreux et concentrés surtout dans des projets de développement qui, souvent contraints par le respect de leurs programmes et de leurs lignes financière, ne laissent pas aux gens le temps de réfléchir et de s'organiser.

 

La  synthèse des différents points de vue amène à une définition du développement local assez générale. Il semble se définir en opposition. Il est le contraire du développement décidé seulement par les services de l'Etat sans participation des bénéficiaires. Il s'oppose aux stratégies individualistes. En fait le concept de développement local coïncide avec ceux de l'auto-promotion, du développement participatif voire des micro-réalisations. Cependant, pour qu'un processus de développement puisse se mettre en place, une grande importance est donnée par tous les acteurs (fonctionnaires ou issus d'organisations de base) à la nécessité d'un renforcement de la cohésion sociale et de l'entraide, au fait qu'il y ait des personnes reconnues par tous qui puissent s'engager pour la collectivité dans la négociation d'actions avec les niveaux de décision supérieurs à la communauté. L'insuffisance des appuis techniques et des conseils expliquerait la difficulté de la plupart des initiatives à aboutir.

 

1.3.4    La définition du développement local du groupe Togo

 

Dans son document de synthèse, validé au cours de l'atelier national du 12 mars 1998, le groupe Togo a définit de la manière suivante ce qu'il entendait par développement local[7] :

 

Le développement local est tout un processus qui part de la base en tenant compte des efforts et des initiatives des populations. C'est dans ce sens qu'il faut préciser le concept de développement local et la décentralisation qui :

 

·      S'inscrivent dans une option de développement par l'autopromotion ;

·      Sont tout un processus stratégique qui met en mouvement les communautés pour la prise en charge de leur développement dans une démarche active et participative ;

·      Privilégient la méthode d'animation globale ;

·      Se situent dans des relations de partenariat.

 

Le Développement Local traduit toute une philosophie de développement, toute une organisation et des actions concrètes pour des solutions aux situations qui posent problème pour le bien-être des populations. Il s'agit d'une vision et des approches qui mettent en mouvement les populations qui sont appelées à s'organiser au niveau d'un territoire donné pour leur développement intégral par l'autopromotion. C'est dans ce sens qu'il faut parler du Développement Local et de la Décentralisation.

 

Le Développement Local doit être :

 

·      Un développement interne des communautés locales grâce à leurs propres dynamiques organisationnelles. Cela veut dire que ces communautés doivent s'organiser pour prendre en main leur progrès à partir :

 

*              d'une vision et des approches de développement par l'autopromotion communautaire et solidaire ;

*              d'une découverte et d'une analyse de leurs réalités qui leur permettront de déterminer leurs priorités, préciser les objectifs opérationnels et décider les actions à entreprendre ;

*              d'une politique de développement avec un accent sur la création et la gestion des ressources naturelles, humaines, matérielles/techniques et financières ;

*              d'une valorisation de leur savoir, avoir et pouvoir ;

 

·      Une conquête par les communautés locales de la place qui leur revient dans l'ensemble de la société économiquement, politiquement et culturellement.

 

Cette action de Développement Local ne peut être le fait de personnes. Pour agir efficacement, les acteurs socio-économiques que sont les membres des communautés locales doivent s'associer et s'organiser pour réaliser l'ensemble de leurs objectifs en tenant compte des priorités déterminées.

 

 

Les agents de l'Etat, des ONG, des Programmes de Coopération bilatérale et multilatérale doivent éviter d'orienter et de diriger les actions de développement d'en haut. Ils doivent devenir en quelque sorte les points d'appui au Développement Local :

·      en aidant et stimulant les communautés locales dans leurs efforts d'analyse et de réflexion ;

·      en fournissant des appuis techniques adaptés au progrès des organisations de base tout en veillant à ce que leurs interventions n'entravent pas la liberté de décision des communautés locales et ne créent pas les liens de domination et de dépendance.

 

 

Le groupe constate que :

 

"Au Togo, le Développement Local et la Décentralisation ont été abordés sous l'angle de l'Aménagement du Territoire et la Planification Décentralisée du Développement".

 

"Les planificateurs, technocrates et beaucoup d'hommes politiques comprennent le développement local comme un processus de modernisation à l'image de la société industrielle".

 

·      Les politiques de développement rural sont orientées surtout vers les cultures de rente au détriment des cultures vivrières pour gagner des devises servant principalement à importer des biens pour les populations urbaines.

 

·      Dans les grandes décisions politiques et économiques, les paysans ont rarement droit à la parole.

 

·      Le langage que parlent les cadres et les administrateurs n'est pas souvent celui que maîtrisent les paysans...

 

"Le résultat de tout cela est que le développement apparaît aux populations des villages comme des actions à partir des projets qui sont financés par l'Etat ou des Bailleurs de Fonds : ONG, Programmes de Coopération bilatérale ou multilatérale...".

 

1.3.5    La décentralisation

 

Ainsi que le mentionne le groupe, "la loi de décentralisation a été votée le 11 Février 1998. Par cette loi, sont abrogées toutes dispositions antérieures contraires notamment les dispositions des lois n° 81/8 et n° 81/9 du 23 juin 1981 portant organisation du territoire en ce qu'elles sont relatives aux collectivités locales".

 

La loi portant décentralisation stipule dans son article 1er que :

"Le territoire national est divisé en collectivités territoriales dotées de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Les collectivités territoriales sont :

            - la commune ;

            - la préfecture ;

            - la région".

Les collectivités territoriales sont appelées à s'administrer librement par des conseils élus. Elles constituent le cadre institutionnel de la participation des citoyens à la vie locale. Elles définissent leur politique de développement local et les priorités de financement des projets relevant de leurs domaines de compétences. Elles peuvent conclure des conventions de prêts sur le plan national dans le cadre de la mise en œuvre de leurs actions de développement.

 

Le Conseil des Ministres du 18 février 1998 a adopté le décret créant une commission nationale de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

"Cette commission servira de cadre de concertation et de suivi des politiques du Gouvernement en matière d'aménagement du territoire et de décentralisation. Elle contribuera à assurer une meilleure coordination des actions de promotion du Développement Local.

Ce décret prévoit également la mise en place dans chaque région et dans chaque préfecture d'une commission régionale et d'une commission locale de l'aménagement du territoire et de la décentralisation".[8]

Cependant, exception faite de la conception du Directeur de la Décentralisation en la matière ("C'est dire que les collectivités sont autonomes et peuvent prendre des décisions qui sont exécutoires mais rendent compte à l'Etat de leur gestion"), la décentralisation dont il est fait mention par les personnes interviewées s'apparente plutôt à une déconcentration des services administratifs quand elle est décrite par des représentants des services techniques ("C'est donner une certaine autonomie aux différentes parties d'une administration qui était centralisée"). Elle est aussi conçue comme une répartition des biens et services sur tout le territoire national ("Contrairement à la centralisation qui se caractérise par la concentration en un même lieu de toutes les compétences ou tous les secteurs des biens et services d'un pays ou d'une région, la décentralisation suppose la répartition des compétences ou de secteurs des biens et des services en fonction des besoins prioritaires de chaque milieu. Elle se caractérise par la prise en compte des besoins réels, des potentialités et des disponibilités de chaque milieu").

 

Le partage des pouvoirs est évoqué mais sans précision ("C'est le transfert des pouvoirs de décision autonome aux collectivités locales qui l'exercent par leurs dirigeants locaux sous le contrôle et la surveillance du pouvoir central").

 

En ce qui concerne les représentants des organisations de base, ils n'y font pas explicitement allusion. Est-ce parce qu'il n'en ont pas connaissance ? Les seules mentions qui ont été relevées concernent les équilibres des ressources entre villes et campagnes ("Au lieu de centraliser les choses en ville, il faut laisser les collectivités pendre en main leur développement : les taxes perçues au village développent la ville au détriment des collectivités rurales").

 

 

2.         SYNTHESE DE L'ETUDE SENEGAL

 

 

2. 1      Les objectifs de l'étude rappelés et repris par le groupe Sénégal

 

Les objectifs pour les trois pays africains sont de connaître la vision des africains sur le développement local, de créer des aires de débat afin d'enrichir la réflexion sur l'évolution des approches et des méthodes sur le sujet, et définir les outils les plus opérationnels possibles pour appuyer les initiatives du développement local.

Pour le Sénégal, il s'agit précisément de dégager une vision nationale du développement local et de définir les outils, les méthodes, les démarches les plus aptes à renforcer les dynamiques de développement local.

 

2. 2      La méthodologie

 

Pour mener à bien cette étude, le groupe Sénégal a créé cinq comités de Région (Dakar, Kaolack, Saint-Louis, Thiès, Ziguinchor) chargés chacun d'analyser une dynamique de développement local située sur le territoire de sa région. Avant d'arriver aux choix de ces dynamiques, des sélections ont été effectuées par le Comité de Pilotage national[9] en rapport avec les groupes régions sur les cas proposés au terme d'une série de rencontres[10]. Les critères de choix étaient les suivants :

 

-      une volonté de changement portée par les acteurs,

-      l'existence d'un terroir (connaissance du terroir et de ses ressources),

-      la diversité des acteurs mis en jeu,

-      la mobilisation des ressources propres,

-      l'ouverture locale et extérieure pour compléter les besoins,

-      le renforcement de l'IEC,

-      l'interaction entre les acteurs,

-      les relations entre les structures de développement,

-      la mise en place de cadres de développement local.

 

Cinq études ont été effectuées :

 

-      le cas du PROADEL (Région de St Louis),

-      d'une dynamique de développement d'un quartier à une gestion partenariale de commune : l'expérience CODEJA / CODEKA,

-      le collectif départemental de Mbour,

-      la dynamique de l'association nationale pour le bien-être de la population, à Yeumbeul,

-      le PADEB à Bignona.

 

Ces études de cas ont été lancées en juillet 1997 et chacune d'elles a été sanctionnée par un rapport. Un document de synthèse des cas, élaboré en février 1998, tente d'esquisser une philosophie et une approche sénégalaises du DL.

 

2. 3      Les résultats des études

 

2.3.1    Elément de définition du concept de développement local

 

Le DL sera la mise en oeuvre d'actions cohérentes entre elles par des acteurs locaux dans un processus évolutif dans le temps et l'espace, à l'échelle d'un territoire avec la participation des populations aux choix politiques et aux choix d'orientations économiques pour l'amélioration de leurs conditions de vie.

 

Cette définition laisse entrevoir les dimensions essentielles du développement local à savoir :

 

-      l'échelle spatiale,

-      le partenariat avec différents acteurs,

-      la participation des populations locales,

-      la globalité des actions mises en œuvre,

-      l'extension et l'évolution de la démarche,

-      les moyens du développement local.

 

a - L'échelle spatiale

 

Le territoire (naturel et humain) incarne une identité collective, fruit d'un histoire commune, d'une réalité et d'un avenir commun (l'importance du fait territorial est démontrée à contrario par les difficultés provoquées par la non prise en compte des réalités socio-culturelles dans le découpage des collectivités). Les habitants d'un même territoire vivent ensemble les mêmes difficultés.

 

b - La participation des populations locales

 

Elle est une condition de la pérennité du développement local. Les habitants d'un même territoire décident de solutionner ensemble leurs problèmes. La participation peut s'exprimer par des avis (lors de consultations) par des moyens financiers, par de l'investissement humain, par l'exercice de responsabilités.

 

"Les populations cherchent, dans une telle approche à recouvrer leur identité culturelle (ensemble des connaissances acquises) et leur génie créateur pour cesser de copier les autres réalités sociales différentes de la leur".

 

c - Le partenariat avec différents acteurs

 

Ce sont les services techniques, les services administratifs, les associations du territoire concerné, les acteurs régionaux, les partenaires financiers, les ONG.

 

"Le partenariat entre acteurs, à partir d'activités de concertation organisées est une clef de voûte de l'approche développement local. Car elle mise sur le potentiel humain, le dynamisme et les ressources du milieu, l'entrepreneurship et l'identité pour faciliter l'approche globale".

 

d - La globalité des actions mises en oeuvre

 

"C'est l'approche globale qui (nous) permet de comprendre les mécanismes du sous développement local dans ses aspects économiques, politiques, sociaux, environnementaux et culturels ; d'identifier les principaux champs d'intervention susceptibles de sortir les populations du cercle vicieux du sous-équipement local après un diagnostic collectif".

 

Si la complémentarité des secteurs est fortement affirmée, l'importance de l'économique est rappelée, car "la vision du sénégalais en matière de développement local est que la participation du citoyen à la vie locale ne peut être effective que si cette initiative de développement local peut amener une activité économique sur place, avec des chances de réussite certaines"... notamment en ville pour occuper les jeunes désoeuvrés.

 

e - Extension et évolutions de la démarche

 

·   Les moyens financiers

-   Accroître la capacité financière des populations est un élément central du processus.

 

·   L'expertise exogène

     -   Elle permet d'appuyer, d'accompagner les initiatives et de renforcer les capacités des populations.

         

·        Méthodes et outils

          - une approche communautaire, responsabilisante et participative,

-      une approche systémique,

-      une concertation des acteurs entre eux,

-      une animation, une sensibilisation et une formation des populations locales.

    

·        Cette présentation du concept de développement local s'achève sur des critères d'évaluation du développement local

          - au niveau micro-local : qualité de vie, conscience citoyenne, formes de participation,

-   au niveau macro-local : nouvelles logiques de relation entre acteurs, formation d'une nouvelle mentalité.

    

2.3.2    Le développement local et la décentralisation

 

a - La notion de décentralisation

 

Le groupe Sénégal présente les grandes étapes de la décentralisation, rappelle les orientations générales de la décentralisation au Sénégal et soulève quelques questions dont elle a fait l'objet, concernant notamment le choix entre déconcentrer (pour conserver un Etat fort) et décentraliser.

 

b - L'impact de la décentralisation sur le développement local

 

Impacts positifs :

 

·   La planification globale des initiatives de développement local dont les collectivités sont désormais chargées. Cette planification devrait permettre de transformer des initiatives locales de développement en initiatives de développement local.

·   L'avènement d'un cadre de concertation, dans le cadre fédérateur de la collectivité locale.

·   Le financement du développement local.

·   L'expérience des anciennes autorités locales (anciens élus) pour contribuer au processus de développement local.

 

Impacts négatifs :

 

·   Le clientélisme politique, entraîné et amplifié par la décentralisation.

 

"L'irruption de considérations partisanes sur le champ du développement se présente comme une donnée inéluctable dès l'instant que de plus en plus d'élus initient, avec les autres acteurs locaux, des stratégies de développement local. Quelle est alors la frontière entre la politique et le développement local ? "

     

·   L'incohérence des découpages territoriaux.

 

c - L'impact du développement local sur la décentralisation

 

Impacts positifs :

 

·     Création de ressources pour les collectivités locales (par la création d'activités et de revenus, donc de la possibilité de payer des taxes et impôts).

·     La limitation de l'exode rural, qui peut donc améliorer l'effort de planification.

·     Des élus formés au service du développement local.

 

Impacts négatifs :

 

·     "La prolifération anarchique des initiatives locales de développement échappant au contrôle des autorités locales fait planer le risque d'une fragilisation de la décentralisation dans la mesure où les populations n'attendent rien des élus".

 

La collectivité locale est rarement considérée comme un acteur incontournable pour un développement local réussi [...] Les élus ont souvent déçu en mettant en avant des intérêts électoraux, en recourant à la corruption au lieu d'apporter un soutien actif aux initiatives naissantes de développement local.

 

Enfin aucun texte n'oblige les élus à travailler en partenariat avec les populations.

Les acteurs notent enfin une tension sournoise entre élus et services déconcentrés de l'Etat qui se sentent dépouillés de leurs prérogatives et de leur pouvoir.

 

 

2. 4      Conclusion et recommandations issues des études

 

·     Le développement local devrait précéder la décentralisation. Celle-ci, sur une échelle large devrait harmoniser, appuyer et consolider les dynamiques de développement local qui à leur tour concrétiseraient la décentralisation.

    

·     Une analyse plus profonde du rôle de la religion et de la culture dans le développement local, des rapports entre ressources générées par le développement local et la fiscalité, de la place des femmes et des jeunes devrait être faite.

 

 

3. SYNTHESE DE LA MISSION AU ZIMBABWE

 

 

3. 1      Les objectifs de la mission

 

Comme pour le Togo et le Sénégal, il était initialement prévu qu'une étude puisse être menée au Zimbabwe par un groupe local. L'IRED avait été contacté pour être le coordonnateur de ce groupe. Des changements institutionnels étant intervenus au sein de l'IRED à Harare et l'équipe étant relativement surchargée, cette solution a été abandonnée. Les contraintes de planning n'ont pas permis de trouver un autre partenaire à même de réunir dans les temps un groupe local solide. Il a ainsi été décidé d'organiser une mission de l'un des animateurs du groupe France pour appréhender la problématique du Zimbabwe en matière de développement local et de décentralisation.

 

Les objectifs de cette mission de 10 jours, réalisée par un des co-animateurs du groupe France (Marie-Jo Demante) étaient :

 

·      un "défrichage" des concepts de développement local et de décentralisation au Zimbabwe,

 

·      la prise de contact avec différentes institutions (administration, ONG, associations de base) intéressées à former un groupe de réflexion au Zimbabwe sur ces thématiques et à participer à l'atelier international de Dakar.

 

 

3. 2      Méthodologie et déroulement

 

La mission a été organisée grâce à l'appui de l'association Africa Resources Trust (prise de rendez-vous, logistique, documentation, traduction). Cette association qui a pour mandat de faire la promotion du Programme Campfire[11], siège a Harare mais a plusieurs représentations aux Etats Unis et en Europe dont une en France. C'est par le biais de la représentation française que les contacts ont pu être pris.

 

Dix sept institutions ont été rencontrées[12] et un atelier final d'une demi-journée à permis de réunir six d'entre elles à la fin de la mission pour, d'une part que Marie-Jo Demante puisse restituer les résultats de ses entretiens et visites et, d'autre part, évaluer leur intérêt à poursuivre une réflexion en commun.

 

3.3       Les résultats

 

3.3.1    Rappel du contexte zimbabwéen

 

Le Zimbabwe a conçu son développement de 1980  (année de la fin de l'hégémonie du pouvoir colonial blanc sur l'ensemble du pays et arrivée au pouvoir du parti Zanu PF)  jusqu'au début des années 1990 selon des méthodes de planification sectorielle du développement  mises en oeuvres par les services déconcentrés de l'Etat dans les différentes régions. Il s'agissait d'essayer d'améliorer rapidement et de manière significative le niveau de développement  économique et social des communautés rurales et urbaines noires qui, dans le régime précédent, avaient essentiellement été considérées comme de la main d'oeuvre au profit des entreprises agricoles ou industrielles de la minorité blanche au pouvoir. Il s'agissait parallèlement de construire une nation autour d'un projet commun où les clivages raciaux qui avaient prévalus seraient bannis. Le Parti, pour cela, se basait sur une population enthousiaste et prête à s'investir après plusieurs années de combat pour la libération..

 

En plus des actions directement financées par l'Etat sur les ressources propres du pays, le Zimbabwe a bénéficié d'appuis de la communauté internationale (Nations Unies, Grande Bretagne, Union Européenne, Allemagne, France (dans une moindre mesure)) pour la mise en oeuvre de projets de développement. Jusqu'au début des années 1990, ils étaient gérés, en grande partie par l'Administration. Depuis cette période, les ONG nationales se sont développées et participent activement aux différents projets de développement. Beaucoup d'ONG appuient directement les communautés de base et les petits producteurs pour la mise en place d'infrastructures, la formation, le micro-crédit etc. Malgré le nombre croissant d'associations nationales soutenues par des financements extérieures, les relations entre elles et le pouvoir central  ne sont pas toujours fluides : suspicion de l'Etat vis à vis des associations soupçonnées de créer des contre-pouvoirs revendicateurs ; manque de confiance des ONG vis à vis de l'Etat considéré comme trop autoritaire.

 

Les ONG d'appui deviennent nombreuses mais agissent pour la plupart à très petite échelle et sans véritable coordination ce qui entraîne une moindre efficacité.

 

Les pouvoirs traditionnels restent forts en particulier vis à vis de la gestion coutumière du foncier et des ressources naturelles en général.

 

En termes économiques, le pays est encore très marqué par un capital en grande partie possédé par des entreprises "blanches". En milieu rural, le contraste reste important entre de petites exploitations vivrières noires (quelques hectares) peu équipées et les "fermes commerciales" blanches (plusieurs milliers d'ha) qui produisent la majeure partie des cultures d'exportation. Une réforme agraire est à l'étude depuis plusieurs années.

 

 

3.2.2    Le concept de développement local

 

Il n'est pas utilisé en tant que tel. "Local développement" a plutôt un sens de développement localisé, à petite échelle.

 

En opposition aux politiques de développement planifiées essentiellement mises en oeuvre par les représentations déconcentrées des différents ministères techniques, on parlera de développement à la base, de développement des communauté de base etc... Ce concept recouvre plus ou moins celui d'auto-promotion. Il s'agit d'appuyer les communautés rurales ou urbaines à identifier leurs problèmes, les solutions à  ces problèmes et de trouver les moyens financiers et techniques pour les mettre en oeuvre.

 

La notion "d'empowerment" est également importante : donner les outils pour que les communautés de base aient le pouvoir de négocier avec les autres niveaux de décision pour la mise en place de leur choix de développement. Celle de "capacity building " l'est aussi : augmenter par la formation (gestion, planification, compétences techniques) et  l'expérience (learning by doing) les capacités des populations à décider et gérer en connaissance de cause.

 

 

3.3.3    Les liens entre développement local et décentralisation

 

Le Zimbabwe a voté en 1988 une loi de décentralisation[13] qui visait à ériger en collectivité territoriale le niveau "district" qui correspond plus ou moins au niveau départemental[14]. La loi a commencé à être appliquée à partir de 1992-1993. Des gouvernements locaux ont été mis en place, les "Urban District Councils" en milieu urbain et les "Rural District Councils" en milieu rural. Les conseils de districts ruraux sont composés pour 2/3 de représentants élus et pour 1/3 de représentants désignés (qui représentent les catégories n'ayant pas le droit de vote aux élections locales : les mineurs, les ouvriers agricoles mais aussi les chefs traditionnels et les représentants des fermes commerciales blanches). Les représentant élus le sont au niveau du "ward"[15], équivalent d'un canton français. Les conseils de district en milieux rural et urbain sont habilités à collecter des taxes (sur les entreprises, les constructions diverses, les marchés) et à recevoir des apports extérieurs de ressources (aide extérieure). Outre les tâches d'Etat Civil, les conseils de district ont pour tâches principales la planification du développement, la décision d'implantation des infrastructures sociales, de désenclavement, hydrauliques... et la mise en oeuvre de celles-ci. Ils ont également pour mandat d'attribuer les terres pour l'habitat et l'agriculture. Ils disposent pour cela de petits services techniques et administratifs ainsi que de l'appui des services déconcentrés de l'Etat présents dans chaque district. 

 

La loi prévoit que la planification locale du développement se fasse par remontée successive et priorisation des projets : des  communautés de base au ward, du ward au district. Cette planification progressive est censée se faire au cours d'assemblées réunies aux différents niveaux.

 

Dans la réalité, il semble que cette planification soit bien difficile et que la participation des communautés de base tienne du voeu pieu. Les conseils de district ruraux, en particulier, ont peu de moyens humains et financiers. Ils restent très dépendants des moyens alloués par l'Etat central via ses services déconcentrés. Dans la plupart des cas, ils ne peuvent mettre en oeuvre que ce qui est programmé par l'Etat, faute de ressources propres. A l'heure actuelle, les compétences techniques des conseillers pour juger de la validité d'un projet et pour en assurer la gestion sont faibles. Il en est de même pour leur services techniques. Là aussi, ils sont très dépendants des services de l'Etat. De plus, toute décision du conseil doit recevoir l'aval des services de l'Administration concernée à priori. Ainsi, très vite les communautés de base se fatiguent de faire "remonter" des projets qui ont fort peu de chances d'être mis en oeuvre. Les projets identifiés se présentent sous forme de "shopping list", sans priorisation. Quand elles ont les contacts nécessaires, elles préfèrent souvent essayer de mobiliser leurs propres ressources et tenter d'en obtenir de l'extérieur pour monter leur propre projet plutôt que de s'appuyer sur le district. Par ailleurs, pour résoudre certaines questions, les communautés considèrent que le niveau du district n'est pas le plus adapté. Il s'agit par exemple de la gestion des ressources naturelles où les décisions doivent pouvoir être prises sur des espaces plus restreints.

 

Il n'empêche que du point de vue du gouvernement central, le dernier niveau de décentralisation est celui du district. Le district council est, pour lui, seul habilité à planifier et à décider du développement sur son territoire.

 

La mise en oeuvre effective de la décentralisation avec la participation des populations n'est pas facilitée du fait également que les conseillers sont fort souvent soupçonnés par les communautés de base d'être plus intéressés par leur positionnement politique que par le service à rendre à leurs concitoyens : "on se méfie de ces gens là".

 

Un point d'achoppement important entre communautés de base et conseils de district en milieu rural est la gestion du foncier. Dans de nombreux cas, le conseil ne fait qu'entériner les décisions prises par les chefferies traditionnelles. Cependant, dans les zones à forte pression foncière ou dans celles ou ont été réalisés des aménagement valorisant le foncier, il arrive que le district prenne les décision d'attribution de son propre chef sans consulter les pouvoirs anciens. Il n'est pas rare que des agriculteurs installés depuis plusieurs années se fassent expulser par le district. Beaucoup d'autres sont considérés comme squatters alors qu'ils ont rempli les devoirs traditionnels, souvent les seuls qu'ils connaissent.

 

Conscient des différents problèmes qui se posent pour une décentralisation réelle, l'Etat a élaboré avec l'aide de la Grande Bretagne et de la Commission Européenne un programme de "capacity building" a l'intention des élus des districts.

 

Des réflexions sont également en cours sur les niveaux de décentralisation et leur efficacité. Des moyens d'impliquer plus largement les communautés de base semblent être recherchés. Parallèlement, la place des chefferies traditionnelles dans ce dispositif est à l'étude.

 

 

3. 4      Perspectives

 

Les différentes structures rencontrées se sont montrées intéressées à participer à un groupe de travail sur les liens entre développement local et décentralisation avec d'autres pays africains. Toutes ont fait part du manque d'information qu'elles ressentaient concernant les expériences des pays africains en dehors de la zone australe.

 

En plus d'une représentante du "Ministry of local Government", trois ONG se sont portées candidates pour participer à l'atelier international de restitution de Dakar.


 

Deuxième partie

 

SYNTHESE DE L'ATELIER INTERNATIONAL

DE DAKAR

 

 

L'atelier international de Dakar s'est déroulé les 9 et 10 avril 1998. Il a été organisé en trois parties :

·     présentation des études et débats,

·     travaux thématiques en ateliers,

·     synthèse et perspectives.

Il a réuni 43 personnes (voir liste en annexe). En plus de représentants du Sénégal (28 personnes), du Togo (2), du Zimbabwe (3), de la France (6), il a pu bénéficier de la présence de représentants béninois (2), camerounais (1) et burkinabé (1) qui participaient les jours précédents à un séminaire de l'Union Européenne sur la coopération décentralisée.

Prévu initialement pour  3 jours, il a été perturbé par la fête de Tabaski et n'a, de fait, pu se dérouler que sur 2 journées. Cette courte durée l'a indéniablement amoindri, en particulier pour ce qui est de la synthèse des débats et de l'approfondissement des perpectives de travail.

 

 

1 - Présentation des invités du Zimbabwe

 

Le Zimbabwe n'ayant pas fait l'objet d'une étude proprement dite, il a été demandé aux trois représentants de ce pays de préparer des allocutions présentant la problématique développement local et décentralisation du point de vue de leurs organisations.  Il s'agissait de :

 

·     l'association des Conseils de District Ruraux représentée par son directeur ;

·     l'ONG Zimabwe Trust (spécialisée en l'appui aux organisations rurales et en formation et particulièrement impliquée dans un important programme de gestion participative des ressources naturelles) représentée par son secrétaire général ;

·     et de l'ONG Minicaland Development Association, organisation locale de l'est du pays qui intervient en appui aux communautés de base, représentée par son chargé de programme.

 

Il était initialement prévu une participation du Ministry of Local Government. Celui-ci a dû s'excuser en dernière minute.

Les présentations ont fait l'objet de débats, malheureusement souvent entravés par des problèmes de traduction. A cause de ces difficultés, il a été impossible de prendre des notes suffisamment conséquentes pour en transcrire une synthèse fidèle ici. Ne seront donc reproduites ci-dessous que la traduction des allocutions de chacun des représentants[16].

 

 

1.1       " Décentralisation et stratégies pour le renforcement des capacités - le cas du Zimbabwe ": - Salomon Chikate, Directeur de l'association des Conseils de District Ruraux au Zimbabwe 

 

Premièrement, je voudrais faire part de mes remerciements et de ma gratitude aux organisateurs de ce projet et plus particulièrement de cette importante réunion, et de fournir ainsi une rare occasion aux praticiens et chercheurs du développement pour se rencontrer et échanger les expériences de leur pays respectif, alors qu'un vent de décentralisation et de démocratisation souffle sur notre terre d'Afrique.

 

Ma présentation suivra l'ordre suivant :

 

1.         Une présentation brève de l'organisation que je représente et de moi-même ;

2.         ce que je considère comme l'interface entre la décentralisation et le renforcement des capacités ;

3.         la nécessité d'un cadre politique approprié ;

4.         la nécessité d'une législation pour asseoir la transformation du processus de dévolution des droits ;

5.         la nécessité d'un cadre institutionnel qui fonctionne parfaitement ;

6.         conclusion.

 

 

Remarques introductives

 

Je me considère comme un praticien du développement et mon employeur, l'Association des Conseils de District Ruraux du Zimbabwe est une organisation qui représente les cinquante-sept autorités locales rurales dans notre pays.

 

Ces 57 autorité locales ont été reconstituées suite à la fusion en 1993 des 55 Conseils de District, qui représentaient auparavant les zones communales, et des 55 Conseils Ruraux, qui représentaient auparavant les zones d'agriculture commerciale en majorité blanches.

 

L'interface entre la décentralisation et le renforcement des capacités

 

Outre la nécessité de développer et de transformer le cadre politique, promulguer et réformer des dispositions législatives, et créer et restructurer les institutions, le besoin le plus évident est de faire en sorte que les différent niveaux et institutions ont les capacités nécessaires en matière d'infrastructure, ressources humaines, et développement institutionnel.

 

Créer uniquement le cadre sans les ressources financières et humaines nécessaires préalablement, c'est condamner les institutions des niveaux inférieurs à l'échec permanent.

 

Au Zimbabwe, parallèlement aux activités de décentralisation, il existe un programme de renforcement des capacités dont l'objet est de permettre aux autorités locales d'obtenir la capacité nécessaire pour fournir des services à ceux qui les ont élues.

 

La décision politique du gouvernement central de fusionner les deux types de gouvernements locaux fut considéré comme une initiative pragmatique pour unifier le système de gouvernement local et à la fois pour éliminer le parallélisme et la duplicité qui ont apporté beaucoup de désaccord dans la stratégie de développement.

 

Afin de satisfaire ses citoyens, l'Association des districts ruraux a entrepris les activités suivantes :

 

·     La diffusion d'information comme outil pour éliminer les lacunes de communication créés par les grandes distances géographiques qui séparent les autorités locales rurales.

·     La formation et la transmission de compétences diverses, qui font office d'outils pour le renforcement des capacités.

·     Le lobbying et la représentation qui sont le mécanisme pour convaincre le gouvernement central de la mécessitié d'octroyer des droits aux institutions de niveau inférieur.

·     Des services de recherche et développement qui contribuent à soulever les questions clefs et les faits s'y attachant, pour un processus de lobbying réussi.

 

Le cadre politique

 

A la fois d'un point de vue conceptuel et pratique, la décentralisation engendre un système compliqué de distribution du pouvoir entre les autorités centrales et locales. Cependant, la complexité de la décentralisation ne devrait pas nous décourager et nous conduire à la résignation. Comme il a été observé justement : "la liberté est autant marquée par son amour pour la complexité que la dictature par sa brutalité".

 

Par conséquent, nous devrions envisager la complexité de la décentralisation comme un défi qui devrait nous inciter à promouvoir un cadre politique qui permet à toutes les parties en présence de participer de façon significative et continue à la définition de la politique.

 

Les contraintes à la décentralisation au niveau politique s'articulent normalement autour de question conceptuelles et des expériences historiques d'un pays donné. C'est pourquoi, il est approprié à ce stade de traiter brièvement de ces contraintes.

 

Le concept de décentralisation ne recouvre pas lui-même une signification unique, globale ou invariable, mais plutôt différentes connotations et accents. Ainsi, il pourrait être redéfini comme suit :

 

"La décentralisation peut vouloir dire beaucoup de chose, de la déconcentration, où le pouvoir central exerce le pouvoir à travers des satellites éparpillés dans le pays, à la délégation, où le pouvoir central garde le contrôle mais prête temporairement le pouvoir à des unités subordonnées, à la réelle dévolution, où les gouvernements locaux ont le pouvoir et les moyens financiers pour prendre des décisions obligatoires qui ne peuvent pas être réfutées par les autorités supérieures, tant que celles-ci sont compatibles avec la loi".

 

Les trois concepts de la décentralisation ci-dessus ne sont pas exclusifs mutuellement et dans la réalité certains cas peuvent avoir différents dosages des trois éléments avec un plus dominant que les autres. Par exemple, la plupart des lois et institutions des autorités locales au Zimbabwe sont basées de façon prédominante sur la délégation et beaucoup moins sur la dévolution de responsabilités et de pouvoirs aux autorités locales.

En tant qu'association gouvernementale locale, il nous semble que les différents concepts de décentralisation ne devraient pas être compris en isolation des besoins et expériences spécifiques d'un pays donné.

 

Par exemple, il peut y avoir un réel conflit entre l'intégration de la nation et la décentralisation et cela explique en partie le rythme lent de la décentralisation dans la première décennie de l'indépendance au Zimbabwe. L'intégration nationale visait à éliminer les barrières raciales du pays, réduire les importantes inégalités et construire la nation. Le processus culmina par la fusion des anciens Conseils Ruraux blancs et des Conseils de Districts noirs en Conseils de Districts Ruraux en 1993, ce qui retira un obstacle important sur la voie vers plus de décentralisation au Zimbabwe.

 

Un des facteurs qui est également favorable à plus de décentralisation est le fait que les autorités locales au Zimbabwe favorise l'autonomie "positive" et non pas "négative". L'autonomie dans le sens "négatif" signifie que la communauté a un intérêt à se "protéger" de l'influence centrale et de "l'infiltration". L'autonomie dans le sens "positif", c'est lorsque le problème auquel est confronté la communauté est sa capacité - ou manque de capacité - à avoir accès aux ressources centrales et à influencer son environnement. Si ce facteur conceptuel est pleinement pris en compte, il y aura moins de résistance à un degré plus fort de décentralisation de la part des conseils locaux.

 

Le cadre législatif

 

De manière à ce que la décentralisation s'approfondisse et perdure, la politique adoptée doit être traduite en textes législatifs quand nécessaire.

 

Il ne faut pas trop insister sur la nécessité d'avoir une disposition constitutionnelle qui mette en place spécifiquement une gouvernance décentralisée. Quand les pouvoirs fondamentaux du gouvernement local ne sont pas établis de façon constitutionnelle, on peut facilement les remettre en question par voie législative.

 

De plus, les pouvoirs garantis statutairement peuvent être éliminés par d'autres lois votées par le Parlement, d'autant plus que toutes les dispositions statutaires du gouvernement local sont préfacées par la phrase : "sujet à ce texte de loi et toute autre loi". Il est donc non seulement nécessaire d'avoir une législation, mais d'avoir une législation unifiée qui parle la même langue.

 

Dans la situation du Zimbabwe, la décentralisation législative est plus une délégation qu'une dévolution de pouvoirs. Je vous dis ceci parce que notre Ministre de la Gouvernance Locale a le pouvoir de suspendre les conseils et certaines résolutions des autorités locales quand il considère que ces résolutions sont contraires à la procédure.

 

 

 

 

 

Le partage des ressources

 

Dans une gouvernance décentralisée, le partage des ressources est d'une importance cruciale car dans une large mesure il détermine la nature des relations entre le gouvernement central et le gouvernement local. Plus le gouvernement central peut contrôler de près les dépenses locales, plus le gouvernement local est obligé de jouer un rôle d'agence subordonnée et dépendante du gouvernement central. Par contre, plus de liberté financière permet une plus grande influence et contrôle au niveau local sur les fonctions entreprises. Une pleine responsabilité au niveau local des dépenses nécessiterait l'abolition du contrôle central sur à la fois les dépenses et la recherche de financement par le gouvernement local.

 

Reconnaissant l'importance cruciale du partage des ressources au niveaux central et local, la Commission d'Enquête sur l'imposition recommanda en 1986 au Zimbabwe que les finances locales soient gérées selon une base solide plutôt que de dépendre de contributions annuelles du gouvernement central et que la base d'imposition du gouvernement local soit élargie. Cependant, ces recommandations n'ont pas encore été mises en oeuvre.

 

Le concept de "services gratuits" qui fut largement diffusé par beaucoup de gouvernements centraux en Afrique dans les esprits des populations locales doit maintenant être éliminé de la pensée des communautés rurales et remplacé par la perception que les services coûtent effectivement de l'argent et cet argent doit provenir dans un premier lieu de la commuanuté elle-même.

 

Les membres du parlement et les fonctionnaires du gouvernement central devraient cesser de saper les efforts des autorités locales en critiquant de façon injustifiée les impôts et les taxes imposées par les autorités locales.

 

Développement institutionnel

 

Il est important que les autorités réalisent que les institutions ne sont pas une fin en elles-mêmes, mais seulement un moyen de réaliser des objectifs législatifs, financiers et de développement et de mettre en oeuvre des politiques. La tendance à mettre en place des bureaucraties qui ne prennent pas connaissance des besoins ressentis par les sociétés locales doit être évitée à tout prix.

 

Certaines des institutions dont nous parlons à cette conférence ne sont bonnes que sur papier et ne sont pas nécessairement là pour servir les intérêts des communautés locales.

 

Dans beaucoup de pays, jusqu'à 90 % des contributions du gouvernement central pour le bénéfice des structures locales est dépensé pour des structures bureaucratiques aux niveaux régional et provincial, avec seulement 10  % qui parvient à la population locale.

 

Au Zimbabwe, la structure la plus basse dans les zones rurales est le comité de développement du village. Le VIDCO, comme nous l'appelons, n'a pas de budget propre, mais il prépare et soumet des plans au niveau supérieur qui est le comité de développement d'arrondissement ou ward. Le WADCO rassemble tous les plans des villages du ward, les analyse et les soumet à travers le conseiller du ward qui est membre du conseil de district rural.

 

Au niveau du district, outre le Conseil de District Rural, il y a un comité appelé comité de développement du district (CDD) composé de fonctionnaires techniques représentants les différents ministères au niveau du district.

 

Le CDD travaille comme le comité technique et de synthèse du Conseil et apporte son assistance par des contributions techniques aux plans des wards avant qu'ils soient soumis aux Conseil.

 

Au niveau de la province, il y a un gouverneur et des bureaux des administrateurs de province, qui sont purement des bureaux de coordination et d'administration du gouvernement central. Ils ne gèrent aucun budget au non des districts.

 

Il y a des Conseils de Province dont le travail est d'approuver et de transmettre les plans des districts. Le niveau suivant est le gouvernement national composé des divers ministères. Les ministères font des propositions au parlement non seulement pour leurs administrations centrales mais aussi pour les propositions émanant des Conseils de Districts Ruraux.

 

 

Conclusion

 

Dernièrement, du fait de très fortes pressions de la part des chefs traditionnels, notre gouvernement a décidé d'introduire des structures parallèles pour les chefs traditionnels allant du village jusqu'au niveau national.

 

Mon association a prévenu le ministre de la gouvernance locale que, sans réelle définition et coordination, les nouvelles structures pourraient conduire au désastre.

 

 

1.2       " L'approche de CAMPFIRE au Zimbabwe : un véhicule pour la décentralisation, la gouvernance locale et le développement rural ? " - Champion Chinoyi, secrétaire général de Zimbabwe Trust

 

 

Préambule

 

CAMPFIRE (Communal Areas Management Programme For Indigenous Resources ou Programme de gestion des ressources indigènes dans les zones communales) est parmi les premières initiatives consistant à tester la notion selon laquelle conférer des droits de propriété déterminés et les bénéfices économiques s'y référant aux communautés locales qui partagent l'accès à un ensemble de ressources naturelles donné engendrera une gestion responsable.

 

CAMPFIRE illustre un nouveau paradigme de développement communautaire basé sur la conservation qui suppose que tirer parti de la valeur des ressources naturelles peut offrir les incitations permettant à des systèmes d'utilisation durable de perdurer. Le programme défend l'idée qu'une communauté gérera ses ressources de façon durable lorsqu'elle en reçoit directement les bénéfices, que ceux-ci dépassent les coûts de gestion et quand l'accès à ces ressources est garanti dans le temps.

 

Le programme est devenu, en dix ans, le fer de lance de politiques qui promeuvent la gestion communautaire de la faune sauvage en Afrique australe. Les principes fondamentaux qui étayent le concept s'appliquent, au delà de la faune sauvage, à toute la gestion des ressources naturelles en général et touchent le coeur de certaines questions fondamentales relatives aux politiques sociales qui affectent la plupart des pays en développement.

 

CAMPFIRE représente une réponse cohérente à des problèmes sociaux, politiques, écologiques et éthiques qui se retrouvent dans de nombreux endroits dans le monde dans des débats concernant la gestion de pools de ressources, l'utilisation durable des ressources naturelles, les relations des peuples indigènes et des communautés locales avec l'Etat, et la dévolution de l'autorité politique dans le contexte de la globalisation des marchés économiques. Bien que le processus de décolonisation en Afrique ait donné lieu à des Etats dominés par des élites nationales politiques et économiques qui ont tenté de gouverner selon des régimes populistes, le coeur de l'Afrique rurale demeurent largement traditionaliste. Alors que les gouvernements évoluent, à travers des politiques d'ajustement structurel, d'un contrôle centralisé à un libéralisme de marché, cette situation pourrait en fait accentuer l'écart socio-économique entre la ville et la campagne..

C'est dans ce contexte que CAMPFIRE au Zimbabwe a été conçu, non seulement pour représenter une stratégie de gestion durable des ressources naturelles mais aussi comme une dévolution du pouvoir du centre vers la périphérie de la société, l'octroi de pouvoirs aux communautés et un développement rural durable.

 

Genèse historique de CAMPFIRE

 

Le Programme CAMPFIRE a commencé comme une initiative purement zimbabwéenne, répondant à un certains nombre de conditions historiques. Sa conception initiale est issue d'une agence gouvernementale zimbabwéenne et non pas d'ONGs locales. Elle n'a pas non plus été importée par des programmes d'aide internationale.

Les premières racines de CAMPFIRE se développent dans le secteur de la faune et la flore sauvage au début des années 1960 : le Département des Parcs Nationaux et de la Gestion de la Vie Sauvage (DNPWLM) développe une nouvelle approche, à l'opposé de la philosophie traditionnelle protectionniste, basée sur la conservation à travers l'utilisation durable, et qui avance que "la capacité de tirer des bénéfices économiques directs de la faune et la flore sauvages devrait apporter des incitations plus efficaces pour la conservation de la faune et la flore sauvage". Cette nouvelle politique donna lieu en 1975 au Parks and Wildlife Act qui concrètement octroyait aux propriétaires des terres isolées (principalement des résidents blancs) l'autorité sur la faune sauvage sur leur ranchs et fermes- avec des droits légaux pour posséder, gérer, vendre et acheter les animaux comme ils l'entendaient. En conséquence, les populations d'animaux sauvages ont augmenté considérablement et l'industrie de la faune a connu un essor sans précédent, mais les populations des terres communales restèrent exclues des bénéfices.

 

Les terres communales du Zimbabwe d'aujourd'hui sont par la loi sur les territoires inaliénables de l'Etat. L'Etat possède toutes les ressources sur ces terres, y compris toutes les espèces de faune et flore sauvages qui peuvent faire l'objet d'une exploitation commerciale. Ni des individus, ni des groupes ne peuvent posséder la terres ou les ressources. Le système foncier actuel est une résultante du contexte colonial dans lequel les populations locales depuis longtemps établies ont perdu non seulement leurs droits traditionnels sur leurs territoires mais aussi leurs droits sur la terre qu'on leur "attribua" appelées "zones communales". Celles-ci se trouvent en dehors des terres arables les plus rentables qui s'étendent du centre à la frontière Est du pays. Les Zones Communales se caractérisent par une faible productivité, des précipitations irrégulières et des sols fragiles.

 

Après l'indépendance en 1982 le gouvernement tenta d'accorder aux habitants des terres communales certains bénéfices de la loi de 1975 en permettant aux Conseils de Districts Ruraux (CDRs) de recevoir le statut "d'autorité compétente" et le contrôle sur la gestion de leur faune. La politique de l'Etat ne voulait pas abandonner le concept de "terres communales", craignant que "l'individualisation des exploitations en commun, étendue aux ressources communes, résulterait en une fragmentation de la gestion à un degré où tout bénéfice possible serait réduit à néant". CAMPFIRE au Zimbabwe a donc été basé au départ sur le concept de propriété communale (c'est à dire au sein des districts) comme unité compétente pour la gestion de la faune sauvage. CAMPFIRE conceptuellement inclue toutes les ressources naturelles mais il s'est plutôt concentré sur la gestion de la faune sauvage sur les zones communales, en particulier celles adjacentes aux parcs nationaux, où les hommes et les animaux sont en compétitions pour de maigres ressources. Cette concentration sur la faune s'est faite jour parce que celle-ci avait le potentiel pour générer des retombés financières importantes et immédiates en vue d'une distribution immédiate et d'être investies. C'est également la ressource qui peut engendrer des coûts considérables pour les communautés qui cohabitent avec elle. Outre sa haute valeur utilitaire, la faune s'avère être la meilleure option d'utilisation de la terre dans des zones marginales pour l'agriculture. Sa grande valeur utilitaire fut également considérée comme jouant un rôle vital de catalyseur en développant la volonté des populations d'entreprendre des initiatives de conservation. Le concept est maintenant étendu à d'autres ressources naturelles.

 

Les CDRs sont les unités administratives légales de gouvernance les plus basses, responsables d'administrer les terres communales. Les CDRs, avec à leur tête des fonctionnaires élus, sont composés de Ward Development Committees (WADCOS) ou Comités de développement d'arrondissements, qui eux-mêmes sont composés de Village Development Committees (VIDOCS) ou Comités de développement des villages. Ces structures furent imposées par le gouvernement central (Ministère de la gouvernance locale) aux réalités locales et "souvent ne suivent pas les limites de territoires et d'appartenance à des groupes établis traditionnellement".

 

Ces unités, si elles sont déléguées par les CDRs, pourraient potentiellement avoir des droits légaux de propriété et d'exploitation sur la terres et les ressource. En fait, à cause des besoins financiers de plus en plus importants des CDRs et de l'incapacité du gouvernement à fournir des services sociaux (cliniques, écoles, entretien des routes, etc.), les CDRs ont tenté d'accaparer et de contrôler autant que possible les recettes financières du district issues des ressources naturelles pour leurs propres besoins. Les Wadcos et Vidcos n'ont pas de statut juridique et ont très peu de reconnaissance réellement significative au niveau local où les conflits avec les autorités traditionnelles et les unités de gestion demeurent importants.

 

Afin d'éviter l'appropriation par les CDRs des revenus issus de la gestion de la faune, l'octroi du statut "d'autorité compétentes pour la faune" a été accompagné d'une condition : les CDRs ne pouvaient retenir que 15% des revenus sous forme de taxe, jusqu'à 35% pour les coûts de gestion du district et devaient redistribuer pas moins de 50% aux communautés qui ont généré les ressources. Ainsi, l'autorité pour gérer la faune a été confiée aux conseils à condition que les bénéfices et la gestion soient décentralisés aux communautés productrices qui constituent le niveau approprié.

 

En fin de compte, les principes élaborés de CAMPFIRE et leur mise en oeuvre représentent un effort combiné d'écologistes, d'économistes et de sociologues visant à rassembler les concepts de décentralisation, de gouvernance locale et de développement rural durable et ainsi en faire un programme pour les hommes, l'environnement et le développement.

 

Cette stratégie est apparue d'une grande importance si on prend en compte le fait qu'au Zimbabwe et en Afrique en général la terre et les ressources tirées de la terre fournissent la base unique de capitaux sur laquelle les communautés rurales peuvent construire leur développement socio-économique. L'économie du Zimbabwe est basée sur l'agriculture et les communautés rurales dépendent de l'agriculture pour survivre. Environ 70% des emplois au niveau national et 80% de l'économie toute entière sont directement ou indirectement dépendant des ressources naturelles. De plus il était de plus en plus évident que la mauvaise gestion des ressource naturelles engendrait un cercle vicieux de destruction des ressources naturelles, de pauvreté continue et d'instabilité sociale et politique. Ces problèmes menaçaient sérieusement la capacité à produire des produits agricoles pour le marché intérieur et l'exportation et des revenus du tourisme sur lesquels l'économie du pays dépend. En essayant de s'attaquer à ces problèmes complexes, il devint impératif d'envisager des stratégies qui donneraient de réels pouvoirs sur les dimensions locales de leur existence, en termes de dévolution de pouvoir, de droits garantis sur la terre et les ressources de la terre et des incitations économiques pour un développement durable. C'est pourquoi, les principes de CAMPFIRE se basent sur la dévolution de pouvoirs aux communautés et l'économie des ressources naturelles comme le secteur de la faune sauvage le montre.

 

Afin de mesurer le succès de CAMPFIRE comme véhicule pour la décentralisation, la gouvernance locale et le développement, il faut baser notre discussion sur un certain nombre d'hypothèses et de principes comme définis ci-dessous.

 

Les principes de CAMPFIRE

 

1.         Tant que la faune restera propriété exclusive de l'Etat, personne n'investira dans cette ressource, et par conséquent sa durabilité à long terme est compromise. Ceci est particulièrement vrai pour la faune dans les zones de propriété commune ou de libre accès - comme les zones communales.

2.         Le concept de "patrimoine commun et de libre accès" doit être remplacé par le contrôle et la garde efficace d'un territoire géographiquement défini par les communautés résidentes dont le bien-être est fortement dépendant de la durabilité à long terme des ressources. L'unité qui possède la ressource devrait être le plus près possible de l'unité qui produit, gère et bénéficie de cette ressource.

3.         Une possession garantie et une gestion décentralisée des ressources naturelles à travers la dévolution de pouvoirs économiques aux communautés locales ou communautés de producteurs pour contrôler les bénéfices et la gestion sont essentiels. L'unité qui possède la ressource devrait être aussi petite que possible, compte tenu des contraintes écologiques et socio-politiques.

4          La création d'incitations économiques est essentielle pour faire des ressources naturelles un mode d'occupation des sols compétitif quand cela a un sens du point de vue économique. Les bénéfices économiques issus directement de la gestion contrôlée des ressources naturelles (renouvelables) et la commercialisation par ceux qui sont le plus étroitement associés à cette ressource conduiront à l'utilisation durable, à la conservation et au développement. Les bénéfices doivent être suffisamment importants pour provoquer la réponse de gestion durable voulue.

5.                C'est lorsque les communautés locales expérimentent elles-mêmes des bénéfices économiques tangibles tirés des ressources naturelles locales qu'elles apprécient le plus leur valeur pour leur propre existence et qu'elles feront en conséquence les efforts, sacrifices et prendront les initiatives nécessaires pour les protéger (gérer) pour leur propre bénéfices à long terme.

 

En fonction de ces principes, dans quelle mesure CAMPFIRE s'est développé et a travaillé pour répondre à ses objectifs fondamentaux de décentralisation, dévolution de pouvoirs aux communautés, gouvernance locale et de développement ?

 

 

Les points forts du programme CAMPFIRE

 

En déléguant le contrôle étatique sur les bénéfices de la faune aux autorités locales et grâce au désir réel de certains districts de déléguer plus loin ces droits aux "wards" et aux villages, le principe de dévolution de pouvoir aux communautés sur leurs ressources a été établi et les coûts de la conservation ont été intériorisés par l'autorité locale de gestion.

En augmentant la valeur de la faune sauvage (c'est à dire : corriger les distorsions dans les estimations, les allocations non appropriées des coûts de conservation et du bénéfice tiré de l'utilisation des ressources naturelles) le potentiel de la faune sauvage comme mode d'occupation des sols a été renforcé. Plus d'espaces sont disponibles pour la faune aujourd'hui au Zimbabwe qu'à n'importe quelle époque depuis le début du siècle, résultat direct du fait d'avoir permis à la fois aux secteurs privé et communal de gérer cette ressource.

Les institutions au niveau communautaire ont évolué, ce qui démontre la capacité des communautés, motivées par le fait de posséder des ressources de valeur, de s'organiser efficacement.

 

CAMPFIRE a démontré la validité de la dévolution de droits de jouissance sur des ressources de propriété commune.

La combinaison de politiques qui cherchent à octroyer des pouvoirs aux communautés et augmenter la valeur des ressources a apporté les incitations nécessaires pour une meilleure gestion. Les indicateurs d'une gestion améliorée sont :

 

·     le développement d'institutions de propriété commune motivées ;

·     une planification de l'utilisation de la terre et une gestion du patrimoine des villages améliorées ;

·     Rendements des utilisations fourragères améliorés (pâturage, eau) ;

·     Infrastructure sociale, bien-être, sécurité alimentaire et des foyers.

 

 

 

Faiblesses du programme CAMPFIRE

 

La plupart des faiblesses de CAMPFIRE proviennent de deux facteurs principaux : (1) sa tentative pour que des droits soient octroyés aux communautés mais concernant une seule ressource (la faune sauvage) dans tout un ensemble de ressources naturelles ; et (2) son incapacité à régler le problème de dualité d'autorité (coutumière et statutaire) directement. Par conséquent, les problèmes suivants persistent :

 

·     Les habitants des terres communales n'ont pas de droits de possession clairement définis et garantis comme ceux des propriétaires de fermes et ranchs commerciaux et ils sont plus vulnérables aux planifications et réglementation imposées de l'extérieur, en dehors de leurs communautés.

·     La désignation des CDRs comme “autorités compétentes” n'engendre pas nécessairement la dévolution des coûts et bénéfices de propriétaire aux communautés productrices.

·     La législation relative à la faune sauvage soutient les CDRs directement et les communautés indirectement. Le lien de cogestion entre ces deux niveaux d'organisation socio-écologiques est flou. Le premier niveau (les communautés productrices) n'ont pas autant leur mot à dire que le second niveau (les CDRs).

·     Bien que la gestion de la faune est été déléguée aux CDRs, les droits sur les autres ressources naturelles disponibles dans les zones communales sont toujours contrôlées légalement par des agences gouvernementales. Le contrôle de ces agences techniques tend à éclipser les autorités locales.

·     Il n'existent pas des droits et responsabilités clairement définis aux niveaux des villages et des "wards" en ce qui concerne la gestion des ressources naturelles.

·     Des arrangements institutionnels peu clairs, y compris les droits de propriété, ont entravé l'émergence de capacités de gestion fonctionnelles au niveau local.

·     L'autorité concernant l'accès aux ressources est partagée entre les autorités coutumières et statutaires, par exemple :

     -      les frontières coutumières et statutaires des villages ne sont pas clairement définies ;

-      les organisations coutumières sont plus fortes que les organisation statutaires au niveau du village et plus faibles à des niveaux plus élevés et vice versa ;

-      CAMPFIRE renforce les unités statutaires de gestion et peut être perçu comme une menace pour les autorités coutumières ;

-      la prolifération d'institutions indépendantes manquant de mécanismes de coordination et d'autorité peut causer des conflits quand le consensus ne se développe pas facilement.

 

L'effet combiné de ce qui précède est une autorité fracturée aux niveaux de la communauté et de l'autorité locale.

 

 

Conclusion

 

Selon l'analyse ci-dessus, il est clair qu'au Zimbabwe le modèle de décentralisation comme expérimenté par CAMPFIRE relève plutôt de la cogestion (Etat et partenaires ruraux) et non pas d'une réelle décentralisation de l'autorité aux communautés rurales pour qu'elles se gèrent par elles-mêmes. Cette situation démontre la tendance des politiques africaines de gouvernement à manipuler leur propre peuple dans le but de protéger les intérêts de l'élite politique. Les CDRs apprécient CAMPFIRE parce qu'il est devenu pour eux un mécanisme pour obtenir de nouvelles sources de revenus, délégué de l'Etat. Ils apprécient également les financements des bailleurs de fonds qui accompagnent ces programmes.

 

Tant que la politique qui consiste à reléguer l'ensemble des populations rurales pauvres au contrôle de l'Etat qui possède les terres communales subsistera et tant que les ressources des terres communales demeureront à la fois officiellement propriété de l'Etat et officieusement terres de propriété coutumière, l'autorité et la gestion seront compromises, les tendances au libre accès se maintiendront et la décentralisation du pouvoir et la gouvernance locale deviendront hors de portée. Le dualisme dans le contrôle de l'accès aux ressources des zones rurales est chose commune en Afrique. C'est une caractéristique que tous les programmes similaires à CAMPFIRE doivent prendre en considération. A cet égard, les droits fonciers (conditions selon lesquelles la terre et les ressources de la terre sont détenues et utilisées) deviennent un sujet fondamental en vue d'obtenir une réelle décentralisation du pouvoir et un développement durable.

 

La prudence s'impose lorsque l'on entend au sujet du développement rural que l'autorité étatique devrait être décentralisée, les responsabilités déléguées, la planification participative renforcée et que les communautés devraient être plus responsabilisées quant à leur propre développement. Bien que bien intentionnée, il arrive souvent que "la dévolution de pouvoirs" finisse par signifier la cooptation d'élites et dirigeants locaux pour des programmes guidés par le gouvernement central. La décentralisation ajoute alors seulement un autre niveau à la hiérarchie déjà très obstructionniste qui relie le centre à la périphérie de la société. Il faut par conséquent faire preuve de prudence afin qu'une réelle décentralisation du pouvoir ne finisse pas discréditée avant qu'elle ait été réellement expérimentée.

 

 

1.3.      " Comparaison entre différents niveaux d'institutions de développement rural, traditionnelles et institutionnelles :  les perspectives d'une organisation non-gouvernementale " - Emmanuel Kumbula, chargé de Programme de Manicaland Development Association  :

 

 

Dans un premier temps, Monsieur Kumbula a présenté la structuration des instances décentralisées prévues par la loi de décentralisation et celles utilisées par les sociétés traditionnelles (voir schéma page suivante) :

 

 

Il a ensuite défini les caractéristiques des deux types de structures :

 

Assemblée de village :

 

·     le pouvoir est transmis par succession ;

·     des techniciens influents et expérimentés sont représentés au premier niveau ;

·     les structures hiérarchiques ont 3 niveaux ;

·     la participation aux questions de développement est partagée au premier niveau.

 

 

 

Schéma des deux structures:

 

Ministère du Gouvernement Local



 


Assemblée de Province

Administrateur de Province



 


Traditionnelle                                                                                                                                  Institutionnelle

Assemblée de WADCO                                    Assemblée du District                       Conseil de District Rural







 


Assemblée de Village                                                                                                       Président de WADCO

                                                                                                                                             Conseiller



 

 


                Foyers                                                                                                                 Président de VIDCO



 


                                                                                                                                                             Foyers

 

 

Structures du Conseil de District Rural :

 

·     le pouvoir est issue de l'élection ;

·     les technocrates sont dans la majorité et comprennent des jeunes fonctionnaires qui ne sont pas capables de prendre des décisions ;

·     les structures hiérarchiques ont plusieurs niveaux ;

·     le pouvoir est autocratique ;

·     les décisions sont retardées et dépendent de consultations.

 

 

Analyse approfondie des deux structures

 

Assemblée de village :

 

Forces :

·     le respect accordé aux décisions et au pouvoir,

·     l'allégeance par les parties concernées est plus facile à obtenir,

·     les connaissances traditionnelles sont reconnues,

·     il y a une continuité dans les visions préapprouvées,

·     la détermination.

 

Faiblesses :

·     les changements ou l'adoption peuvent être très lents (l'évolution),

·     le système est plus facile pour les dictatures,

·     le népotisme et la corruption peuvent être naturels,

·     la persécution des opposants est difficile à contrôler.

 

 

 

 

 

Structures à pouvoir élu et nommé :

 

Forces :

·     démocratie,

·     ouvert aux changements,

·     dynamisme,

·     adaptivité,

·     sensibilité aux questions d'égalité des sexes plus marquée.

 

 

Faiblesses :

·     la corruption peut être rampante,

·     les programmes secrets,

·     les idéologies conflictuelles,

·     la politique politicienne,

·     l'apathie est tolérée

 

 

Questions relatives aux processus de développement

 

Les structures administratives

 

Il est important d'adopter des structures de développement qui ont la capacité de mettre en oeuvre de façon efficace le projet. Ces structures devraient être efficaces dans la prise de décision, rentables et clairement définies pour pouvoir gérer les conflits.

 

La propriété du projet

 

Il est très important d'identifier à travers des recherches approfondies les détenteurs du projet du point de vue de la planification du projet à sa mise en oeuvre. L'utilisation d'outils de planification nous permet d'identifier les détenteurs concernés du projet.

 

Le suivi et l'évaluation

 

Ils visent à analyser les processus de développement du projet. Grâce à l'usage d'outils appropriés, il est plus facile d'identifier si nos actions suivent encore notre mission. Des indicateurs variables peuvent être établis à des stades importants du projet de développement pour guider nos actions.

 

 

 

Constitution de réseaux

 

Il est important de créer une solidarité avec des partenaires qui peuvent nous apporter leur assistance afin d'atteindre nos objectifs. Parfois, nous avons besoin d'apprendre des autres qui font mieux que nous et nous devons savoir qui ils sont. Nous avons également besoin de capitaliser les informations les plus techniques pour notre projet et cela se fera dans les meilleures conditions en créant des réseaux.

 

 

Conclusion et recommandations

 

Les structures de Village et de Ward ne sont pas légalement constituées au Zimbabwe. Nous demandons instamment que des recherches soient initiées pour identifier la légitimité de ces institutions et qu'elles soient opérationnelles immédiatement.

 

Ces structures de développement rural présentent des avantages comparatifs dans le développement rural parce que :

 

1.         les initiatives de développement seront mises en oeuvre par les détenteurs du projet ;

 

2.         le gouvernement central se donnera les moyens de restructurer le service civil et consacrera plus de ressources au développement rural à travers les Programmes d'Investissement dans le Secteur Public (PISP). Actuellement, plus de ressources sont investies dans les frais de fonctionnements des services public et les CDR ont tendance à hériter des mêmes structures.

 

Le rôle du gouvernement central se concentrera sur la planification et l'évaluation des processus de développement rural et la maintien de services essentiels qui sont déterminés régulièrement.

 

 

2.         Présentation des travaux du groupe Togo et débats

 

La présentation a été faite par Monsieur Same Djobo, coordonnateur du Groupe Togo et Monsieur Viossi Nicolas Houmey, membre du Comité de Pilotage.

 

Introduction

 

L'étude a été réalisée avec les membres de l'Inter Réseaux. Un bureau d'étude, le BERAF a apporté son appui.

 

La méthodologie de l'étude a été définie en octobre 97 à Kara :

 

-   étude d'orientation,

-   terrain pour y cibler les acteurs de développement local,

-   recueil d'informations et croisement,

-   approfondissement et analyse des informations.

 

L'étude a été effectuée en 4 phases :

 

1.  Elaboration par le COPI  (Comité de Pilotage) de réflexions pour informer / former les membres du réseau en perspective de cette étude (5 documents, analysés par Jacques Mercoiret).

 

2.  Début de l'étude de terrain, une fois l'équipe préparée.

 

3.  Mise en commun des résultats entre agents de collecte, responsables des équipes régionales et BERAF.

 

4.  Tournée des 5 régions, par le coordonnateur et le BERAF, pour recueillir les non dits.

 

Après la présentation du contexte socio-économique du Togo et celle de la liste des cas étudiés lors de l'étude, deux études de cas sont détaillées.

 

Présentation des deux études de cas :

 

a -   Un paysan, éclairé par les cours de l'INADES, a bien réussi. Il a pris alors l'initiative de traduire le cours en langue nationale et constitue un groupement en 1988.

       7 autres groupements ont suivi, jusqu'à constituer une union de groupements en 1996 (les producteurs de maïs de ces groupements prennent en compte l'environnement en assurant la régénération des terres dégradées et en utilisant des techniques qui préservent l'environnement).

 

       L'union des groupements a demandé un appui à INADES Formation pour un diagnostic du contexte (local, national, international), la mise en évidence des contraintes et des problèmes, l'identification des ambitions de la population (l'entrée par les potentialités étant plus dynamiques que par les problèmes).

       Le diagnostic a permis à l'union de groupements de ne plus faire du pilotage à vue. Une problématique de développement a été élaborée par les groupements, qui se sont lancés des défis et ont choisi des actions à mener pour relever ces défis.

       L'objectif était de parvenir à un plan d'action stratégique à 5 ans qu'ils puissent effectuer sans appui extérieur.

 

b -   Une personne crée une ferme dans la région de Kara : c'est un ancien encadreur que son projet a aidé à s'installer.

       Il a une famille constituée de 4 femmes et 10 enfants. Il utilise parfois la maison d'oeuvre locale. Il est devenu le plus gros exploitant de la Région : 30 ha de maïs, 10 de riz, 2,5 de coton, 1 de niébé, 1 d'arachide.

       Avec d'autres agriculteurs, il a créé une Union de groupements de la zone, et une caisse d'Epargne et de crédit.

       Conclusion : un seul individu peut influencer une dynamique organisationnelle dans une zone. Ce ne sont pas seulement les organisations et les associations qui ont cette capacité, mais un individu, avec de la volonté et des techniques, peut y parvenir.

 

 

Réflexions et commentaires

 

·   Le Développement local peut être suscité par des initiatives privées, des groupements, des communautés, des associations, des comités de village.

    

·   Des ONG appuient des organisations de base mais en ont-elles les capacités ? Une étude gouvernementale sur ce sujet conclue que les groupements initiés et appuyés par des ONG ne peuvent pas se constituer en organisations professionnelles, ni susciter des dynamiques.

    

·   Conditions d'un développement local :

 

-      Organisation des groupes à partir du niveau le plus bas pour leur permettre d'avoir un cadre méthodologique d'animation, de promotion, de gestion des ressources humaines.

-      Relecture de leur milieu par les gens eux-mêmes, par une connaissance participative.

 

·   Développement des ressources :

 

-      Engagement des groupes dans des activités génératrices de ressources, créatrices d'emplois, soucieuses de préserver les ressources naturelles, tournées vers l'intérêt collectif.

-      Création de relations de partenariat pour un soutien et non une assistance, à partir de ce que veulent les communautés.

 

Questions / débat

 

Q-   On se demande si l'entrée par les besoins et les potentialités est pertinente car avant de fixer des objectifs il faut identifier les problèmes et les priorités. S'il y a erreur au niveau du diagnostic, les objectifs risquent de ne pas être pertinents.

 

Q-   Le Développement local n'est-il pas un moyen d'aider l'Etat à se recomposer ?

 

Q-   Le plan d'action proposé par l'Inades est annuel. Mais un PDL n'est-il pas quelque chose d'exhaustif, de durable, qui évite d'avoir à recommencer chaque année ?

 

Q-   On ne voit pas dans les 2 cas où se situent les autres acteurs du développement local : l'administration, les élus, les institutions bancaires, les services techniques ? Sont-ils dans des rapports de complémentarité ou de conflit ?

 

Q-   L'exposant a souligné l'importance des références traditionnelles pour le développement local, comme les fétiches. Cette proposition est importante, car il y a la vérité de la journée et celle de la nuit dont il faut tenir compte.

 

Q-   Dans le 2e cas, un fermier réussit, d'autres suivent son exemple. Pourquoi considère-t-on cela comme un succès par rapport à d'autres programmes plus classiques ?

 

Q-   Une personne peut être à la base d'une dynamique de développement local : mais la réflexion concernant le processus a-t-elle été suffisamment poussée ?

 

 

Réponses des intervenants togolais

 

Le fermier présenté dans le 2e cas a reçu très peu d'aide, il a travaillé avec ses propres moyens et avec l'épargne réalisée avec son salaire, avant son départ du projet.

 

Tenir compte de l'environnement immédiat, des traditions et des coutumes. Par exemple, le trésorier élu qu'on forme n'est pas le vrai trésorier, qui lui reste dans l'ombre.

 

L'identification des problèmes est un préalable. Mais il faut faire attention car les gens ont tendance à dire leurs besoins et non les vrais problèmes. Une analyse des vrais problèmes est nécessaire ainsi que leur hiérarchisation.

 

Mais au delà des problèmes et potentialités, il faut dégager une problématique de développement de la zone qui tienne compte de toutes les ressources.

 

Un plan stratégique est défini pour 5 ans.

 

Un plan d'action opérationnel, correspondant à un budget, sur un an.

 

Des coutumes comme le vaudou ne sont pas orientées vers le développement, mais elles sont socialement importantes : il faut donc en tenir compte. Le féticheur est un acteur.

 

Recomposer l'Etat ? Mais qui est l'Etat ? Qui sont les dirigeants ? Ils sont coupés de la population. Pour redonner du souffle et des perspectives à la population, l'autopromotion s'impose. Mais ce serait plus rapide si l'Etat jouait son rôle.

 

 

3.         Présentation des travaux du groupe Sénégal

 

La présentation a été faite par M. Rosnert Ludovic Alissountin.

 

Le groupe Développement Local Décentralisation Sénégal s'est attelé à travers des études de cas réalisées dans cinq régions du Sénégal, à caractériser la notion de développement local et à déterminer ses rapports dynamiques avec la décentralisation.

 

La rapport de synthèse de ces études de cas a été présenté à l'Atelier National qui s'est tenu à la Chambre de Commerce de Dakar les 27 et 28 février 1998 autour de la problématique générale de la définition de la conception sénégalaise du Développement Local. Le rapport de cet atelier enrichi des réactions des différents partenaires fait l'objet de la présente communication pour le compte du Groupe Sénégal à l'Atelier International qui a regroupé le Sénégal, le Togo, le Zimbabwe et la France.

 

La démarche adoptée consiste à définir la notion de développement local et à identifier ses rapports avec l'environnement global.

 

 

La définition de la notion de développement local :

 

La définition de la notion de développement local apparaît comme une mission difficile. En effet, les dynamiques de développement local étudiées ont des formes variées, poursuivent des objectifs divers et ont connu des sorts différents, d'où la difficulté de trouver une définition précise qui puisse ramasser toute la diversité qui s'attache aux pratiques de développement local.

 

Une démarche plus prudente consiste à identifier les éléments constants qu'on retrouve dans toute dynamique de développement local.

 

Les éléments constitutifs du développement local

 

On distingue :

 

·     L'échelle spatiale : c'est l'espace qu'on cherche à maîtriser à travers une dynamique de développement local. La notion de territoire renvoie surtout à des aspects physiques. Celle de terroir est plus chargée et renvoie à une dimension psychologique s'exprimant par une volonté historique et constamment réaffirmée d'un groupe d'individus de partager un espace commun. La question est de savoir si le territoire de collectivités décentralisées sur le plan administratif, correspond à des terroirs sur le plan social. L'étude du Programme d'Appui au Développement Local de la communauté rurale de Sinthiou Bamambé (Saint Louis du Sénégal) montre bien que le découpage administratif de la communauté rurale a ignoré les aspects sociologiques de la zone, ce qui peut occasionner des distorsions pour un programme applicable à l'échelle de la communauté rurale.

 

·     La participation des populations locales : c'est un principe absolu du développement local. Elle matérialise la prise de conscience et l'engagement effectif. Même pour des programmes initiés de l'extérieur, la pratique actuelle consiste à requérir un apport de la part des bénéficiaires qui marquent ainsi leur adhésion au programme.

 

·     La concertation : elle rationalise la participation des populations. Elle répond au souci de démocratie, de mobilisation de l'ensemble des acteurs et de décisions consensuelles.

 

·     L'extension et l'évolution de la démarche. Au fur et à mesure des expériences vécues et des résultats enregistrés, de nouvelles ambitions se créent, de nouveaux acteurs s'impliquent etc.

 

·     Le partenariat : il évite le cloisonnement des acteurs. L'étude a montré que les expériences les plus solides sont celles qui ont associé Etat, élus locaux, ONG, populations locales, techniciens etc.

 

En faisant la synthèse de ces éléments on peut dire que le développement local serait une volonté des acteurs mobilisés de s'approprier la gestion de leur espace vital. Mais est-il nécessaire que ces acteurs locaux conçoivent un projet au départ de l'action ?

 

Le développement local part souvent d'initiatives spontanées, d'actions basées au départ beaucoup plus sur une volonté de mobilisation pour le progrès que sur une planification savante. Le projet au sens savant du terme n'est pas nécessaire au départ de la dynamique de développement local, mais il importe qu'au fur et à mesure, les initiatives locales de développement soient transformées en initiatives de développement local, c'est-à-dire en un ensemble d'actions cohérentes orientées vers des objectifs précis.

 

D'autres éléments sont perceptibles à travers certaines initiatives de développement local telles que la globalité des actions mises en œuvre, la cohérence des actions, les rapports harmonieux avec l'environnement etc.

 

Tous ces éléments doivent être renforcés par des outils appropriés.

 

 

Les outils du développement local

 

Ils sont nombreux : on peut retenir comme outils pertinents :

 

·     La formation, l'animation et la sensibilisation : elles permettent de renforcer l'éveil des consciences. La formation doit s'adresser aussi bien aux acteurs locaux qu'aux personnes extérieures qui appuient les acteurs locaux. On se rend compte souvent que les intervenants extérieurs utilisent des approches universitaires, sophistiquées qui n'ont pas de répondant au plan local.

 

·     Les contrôles : ils permettent aux acteurs de vérifier que les moyens ont été utilisés conformément aux objectifs. Ils visent de manière générale à assurer la transparence dans la gestion. L'objectif ici n'est pas de sanctionner, mais d'évaluer et d'améliorer la gestion.

 

·     La contractualisation : le contrat est un outil de transparence et de clarté. Il fixe au départ les rôles et les responsabilités de chaque acteur. Une fois les contrats conclus, les acteurs ont les mains libres et ne répondront qu'à un contrôle d'efficacité à posteriori.

 

·     Le diagnostic : les actions à mener doivent être basées sur l'identification des besoins des bénéficiaires et des moyens disponibles.

 

·     L'effort d'autofinancement : les acteurs locaux ont rompu avec cette pratique peu stimulante consistant à financer les actions entreprises par des moyens exclusivement extérieurs ou à se voir imposer des projets conçus et financés de l'extérieur. Des stratégies d'autopromotion se développent et à côté des cotisations, on distingue l'investissement humain et les apports en nature.

 

Mais l'autofinancement n'exclut pas un appui de bailleurs extérieurs. Or, on se rend compte que par rapport aux autres activités économiques, les actions de développement local n'intéressent pas vraiment les bailleurs traditionnels tels que les banquiers. Par ailleurs, sur la plupart des programmes financés, les bénéficiaires ne sont pas consultés.

 

Les budgets des collectivités locales ne sont pas suffisamment consistants pour financer durablement les initiatives de développement. On se rend  compte notamment pour les communes que plus de 80 % des recettes sont consacrées à des dépenses de personnel. Les rares financements consentis par les collectivités locales vont vers les associations sportives et culturelles à la veille des élections....

 

Pour certains, les problèmes de financement du développement local doivent être analysés moins en termes de manque de moyens que d'utilisation rationnelle et transparente des moyens disponibles.

 

Il faut donc souhaiter que l'effort d'autofinancement soit renforcé par la transparence dans la gestion et que les programmes de financement initiés par des bailleurs extérieurs soient dûment discutés avec les bénéficiaires. La contractualisation permet de clarifier les engagements financiers et de faciliter le contrôle.

 

A côté de ces outils pertinents de développement local, l'étude a également révélé les écueils et les facteurs bloquants.

 

Les facteurs bloquants

 

Les populations ont identifié comme obstacles au développement local :

 

·     Le cloisonnement des acteurs qui est contraire à une démarche synergique et consensuelle.

 

·     Le cloisonnement de l'information : c'est l'information qui éclaire l'action. Mais certains leaders s'en accaparent sans les faire descendre à la base.

 

·     Les procédures : quand elles sont trop lourdes, elles bloquent les processus.

 

·     Le conservatisme culturel : l'attachement à la culture a parfois occasionné un renfermement sur les racines, préjudiciable à l'ouverture et à la tolérance indispensables au développement local.

 

Le bénévolat est-il un frein au développement local ? Il est vrai que l'acteur de développement local doit avoir une motivation autre que pécuniaire, mais il faut bien avouer que dans un pays pauvre, l'engagement bénévole finit par lasser, en l'absence d'une activité complémentaire génératrice de revenus personnels.

 

Tous ces éléments ne donnent pas une définition précise de la notion de développement local, mais permettent de mieux l'appréhender. A l'atelier National, les participants ont estimé en définitive que chercher à tout prix à définir le développement local, contribuerait à le figer alors qu'il adapte aux divers problèmes qu'il cherche à résoudre. Les définitions données partent souvent de préjugés qui se vérifient rarement. La diversité est peut être l'une des principales caractéristiques du développement local. Le développement local prend des aspects variés selon les terroirs parce que les éléments de l'environnement sur lesquels ils s'appuient varient d'un espace à un autre. Après cette tentative de définition du développement local, il convient d'étudier les rapports entre le développement local et son environnement.

 

 

Le développement local et son environnement

 

Le principal élément de cet environnement c'est la décentralisation. Mais les études de cas ont montré des éléments intéressants tirés des rapports entre le développement local et, respectivement, la culture et la religion.

 

Développement local et décentralisation

 

Au Sénégal, la décentralisation commencée depuis la période coloniale a connu une étape décisive en 1996 avec l'érection de la région en collectivité locale, l'allégement du contrôle effectué par l'Etat sur les collectivités locales, et le transfert massif de compétences jusque là exercées par l'Etat.

 

La collectivité locale est définie par la loi comme une personne morale de droit public dotée de la personnalité juridique, de l'autonomie financière et d'une assemblée élue au suffrage universel. Quels sont donc les impacts réciproques entre développement local et décentralisation ?

 

La décentralisation a sur le développement local des impacts positifs (planification globale des initiatives de développement local, avènement d'un nouveau cadre de concertation, financement du développement local par les collectivités locales), mais aussi des aspects négatifs (avènement du clientélisme électoral, incohérence des découpages administratifs).

 

Le développement local a sur la décentralisation des aspects positifs (la création et la mobilisation de ressources pour la collectivité locale, la limitation de l'exode rural qui alimente le désordre urbain, l'émergence d'élus expérimentés qui ont auparavant animé des dynamiques de développement local).

 

Aucun impact négatif du développement local sur la décentralisation n'a été noté. Il est apparu que la décentralisation n'a pas de sens si elle ne conduit pas au développement local.

 

 

 

Développement local et culture

 

En minimisant l'aspect culturel on compromet les chances d'une initiative de développement local. En s'engageant dans une dynamique de développement local, les acteurs consciemment ou non s'appuient sur leur culture. Mais la culture est une arme à double tranchant pour le développement local. En effet, lorsque les acteurs restent enfermés dans des croyances peu progressistes, ils compromettent l'ouverture nécessaire à l'évolution de toute initiative locale. La culture ne doit pas éclipser la tolérance et l'ouverture.

 

Développement local et religion

 

La religion ne peut plus être considérée au Sénégal comme un aspect étranger au développement local. Des structures religieuses ou d'origine religieuse appuient de plus en plus des dynamiques de développement.

 

Au Sénégal, le courant religieux du mouridisme est à l'origine de nombreuses initiatives de développement local avec des moyens parfois très importants. La religion n'est donc plus statique, elle est dynamique et participe à l'éveil des consciences et à la mobilisation des acteurs.

 

Au total, on constate au Sénégal un foisonnement des initiatives locales de développement consécutif au désengagement de l'Etat. Ces initiatives ont besoin d'être appuyées et accompagnées notamment par une formation qui prendrait ses racines dans les réalités locales.

 

Sur le terrain, les acteurs ont parfois déploré la lourdeur des cadres juridiques. La loi sur les associations prohibe les activités à but lucratif ; la loi sur le Domaine National s'est montré très souvent inopérante et peu conforme à une logique de production capitaliste.

 

Mais au delà de l'environnement juridique, il faut aussi améliorer l'environnement financier et politique pour libérer des initiatives viables et rentables à la base.

 

 

Questions / débat

 

Q-   Les CR existent depuis 1972. De nouveaux acteurs ont accès à la terre. Qu'en est-il des rapports décentralisation - développement local dans ce contexte ?

 

Q-   On met souvent en évidence un aspect négatif de la décentralisation : le clientélisme développé par les luttes de partis. Par opposition le développement local est présenté comme un univers pur... Or dans le champ du développement local et dans les ONG, il y a des tensions, des conflits et des dérives. Le développement local peut-il fournir un "vaccin" contre ces risques ?

 

Q-   Le bénévolat est mentionné comme un écueil. Comment les animateurs endogènes vivent-ils ce bénévolat ?

 

Q-   Les cadres de concertation sont définis comme des outils. Mais n'est-ce pas là que s'exprime la démocratie ? C'est donc plus qu'un outil ! Dans ces cadres, la démocratie va-t-elle jusqu'au consensus ?

 

Q-   L'étude ne dit pas suffisamment ce que fait le développement local. Elle définit conceptuellement cette stratégie plutôt que de présenter les caractéristiques de ses actions de terrain. Or ce sont les réalisations de terrain qui permettent de bien comprendre les concepts.

       D'où la question : que font les gens concrètement sur le terrain pour se développer eux-mêmes ? et quels problèmes ont-ils ?

 

Q-   La synthèse des études de cas souligne les analogies des 5 situations étudiées, mais non les différences.

 

Des réponses ...

 

a - Autour des questions foncières

 

Au Sénégal, la plupart des terres sont gérées par le Domaine National. Les Collectivités locales (affectent) prêtent la terre sans droit de propriété. Une question se pose donc : l'absence de propriété ne provoque-t-elle pas l'insécurité et un mode d'exploitation plus laxiste ?

La loi souhaite que la gestion des terres se fasse dans le cadre d'un plan de gestion du terroir. Mais plusieurs terroirs peuvent exister dans l'aire d'une collectivité locale. Il y a un problème effectif d'accès à la terre car tous les citoyens peuvent y prétendre, les femmes comprises, alors que traditionnellement, elles ne peuvent y accéder que par les hommes.

 

Les changements du mode d'affectation des terres :

 

Depuis 1972, trois modes d'application de la règle ont été observés :

 

Ÿ   tentatives d'immatriculation privée des terres au profit des grandes familles possédantes,

Ÿ   redistribution des immatriculations à des proches,

Ÿ   monétarisation du foncier.

Sous l'influence des bailleurs de fonds, se pose la question de la privatisation. L'audit récent d'un cabinet propose soit le statu quo (usufruit, mise en valeur mais pas de propriété) ; soit la propriété ; soit une solution mixte : privatisation et loi sur le Domaine National.

Les solutions tiendront compte des modes traditionnels de gestion du foncier dans les différentes régions. Par exemple, affectation de terre, constat de mise en valeur après quelques années, puis privatisation (bail de 99 ans) et possibilité de transmission.

Exemple de Ross Béthio, où toutes les terres ont été partagées.

Donc en cas de demande, un résident doit céder de la terre après examen par le CR des questions suivantes :

 

Ÿ     la personne qui demande a-t-elle ou non des liens avec le village ?

Ÿ     veut-elle rester définitivement ou non ?

Ÿ     combien donne-t-elle ?

 

Exemple de Guédé (Podor) - Des jeunes ont créé l'Union des Jeunes Agriculteurs ; ils ont élaboré un programme de travail avec leurs parents. Puis, une fois la confiance établie, une convention de gestion du terroir a été passée, où femmes et jeunes ont un accès à la terre.

 

A Mbour, le tourisme envahit les terres agricoles ; les communes s'agrandissent au détriment des agriculteurs. Les conflits sont de plus en plus nombreux. Le Sénégal s'achemine vers la reconnaissance d'un marché foncier qui risque d'aviver les tensions et les concurrences.

 

Ÿ   Le foncier est la projection au sol des rapports sociaux. Le malaise de la décentralisation et celui du foncier sont liés car le foncier est le seul capital dont disposent les agriculteurs. L'extension du développement local est freinée par les pesanteurs foncières.

Ÿ   Le développement local et la décentralisation ne peuvent réussir que si les problèmes fonciers trouvent solution.

     Le Sénégal n'est pas élastique et si la population croît, certaines catégories seront privées de foncier. Si tout le monde a de la terre privée qu'il peut vendre, quelques businessmen vont s'approprier le Sénégal.

     Aujourd'hui au Sénégal il y a 3 situations :

*   les textes de lois en vigueur qui dessinent une politique foncière

*   le droit coutumier, traditionnel et les stratégies de résistance qu'il alimente

*   les nouveaux acteurs et la pression des bailleurs de fonds qui poussent à un grand marché foncier.

 

 

 

b - Politiques et politiciens

 

·   La politique fait partie du développement local. Certains exigent l'abandon de l'appartenance politique pour travailler dans le développement local, c'est à dire faire de la neutralité un moyen de lutte contre le jeu politicien.

     On aurait donc le schéma suivant :

 

  Jeu politicien à

développement local à

neutre

politique de qualité autour d'un "projet de société"

 

La démarche de planification et les cadres de concertation permettent à tous de s'exprimer, de se concerter, et évitent les luttes d'influence et les jeux politiciens.

A Mbour la démarche de développement local tente de réconcilier les élus, les politiciens, les organisations de la Société Civile.

Le développement local crée une dimension de durabilité qui transcende les clivages politiciens.

 

c - Le bénévolat

 

La question du bénévolat est délicate. Si on s'engage, comment vivre ? Soit on s'engage un peu de temps seulement ? soit à plein temps ? dans ce cas il y a problème.

Y a-t-il un métier de "développeur local" nécessaire ?

 

d - Les cadre de concertation :

 

Les cadres de concertation existent à tous les niveaux (CR, commune, département). Ils sont un lien de réflexion sur les orientations, les objectifs, les programmes, les complémentarités entre collectivités... Ils sont un lieu de proposition, négociation, affirmation d'une représentativité. Ils ont un rôle stratégique et politique.

Un participant propose la REGION comme lieu idéal de concertation entre acteurs : grands projets, Etat, bailleurs de fonds et collectivités locales.

Un autre estime que le département est plus proche des citoyens et des collectivités alors qu'ils ne s'identifient pas à la Région : elle leur échappe comme enjeu, comme entité, où ils auraient envie de s'investir...

La concertation est un processus long qui se construit en marchant, où les acteurs acquièrent progressivement des réflexes de citoyenneté, de démocratie.

 

4.         Témoignages sur les évolutions du développement local en France,

par Pierre Nardin (Vice-président de l'UNADEL et membre du groupe Développement Local et Décentralisation France)

 

·   Le développement local est un combat jamais gagné, toujours difficile, mais toujours passionnant.

 

·   Le développement local est une production de la société rurale agraire. En France, il s'est organisé et structuré en 1950, en réaction à l'exode rural, à l'industrialisation, au développement des villes tentaculaires. Cette tendance de fond demeure encore : préserver l'identité.

 

     En 1968, les enjeux du développement local étaient les suivants :

 

Ÿ   vivre et travailler au pays,

Ÿ   combat pour l'identité,

Ÿ   lutte contre la société de consommation,

Ÿ   résistance aux évolutions de la société qui ne tiennent pas suffisamment compte des hommes au profit des intérêts économiques.

 

En France, on est passé d'une société agraire à une société industrielle, où la référence n'est plus la terre, mais la propriété industrielle, le capital, l'argent. Cette évolution pose la question de la place des "pays" dans l'économie, comme celle des pays (Etat) dans l'économie mondiale.

 

En 68/70, des associations de développement sont nées à partir de la société civile. Un dialogue plus ou moins conflictuel s'est ouvert avec les élus. Au bout du compte, c'est l'instrumentalisation du développement local qui a dominé sur la politique de développement local.

 

On est très fort sur les outils, méthodes, démarches, mais on manque de l'essentiel, de l'âme du développement local.

 

Les deux déformations essentielles dont le DL peut être victime :

 

Ÿ   on compte souvent sur des leaders forts, des hommes providentiels, des gourous. Ils peuvent fragiliser la démarche en déresponsabilisant les citoyens.

Ÿ   la boîte à outils du développement local fait que les techniciens ont pris le pas sur les politiques. La notion de projet de développement local a pris la place de la politique de développement local.

 

Une deuxième tendance plus récente du développement local, c'est l'orientation sociale, liée aux 30 glorieuses où la croissance forte s'est souvent brutalement interrompue, avec la crise. 20% de la population française est au-delà du seuil de pauvreté avec son cortège de dérives : développement "bocal", repli nationaliste, peur de l'étranger.

Le développement local est devenu résistance à ces dérives : lutte contre l'exclusion, lutte pour l'emploi, contre le chômage.

 

En France, actuellement, il y a une double crise : existentielle et politique.

Argent et pouvoir sont les 2 moteurs essentiels de la vie. La société perd ses valeurs et ses références.

Le Développement local doit contribuer à créer une nouvelle mentalité, en définissant de nouvelles orientations, de nouvelles pratiques des valeurs d'échange, de solidarité.

 

Conclusions : Ce n'est pas l'économique qui est l'objectif premier, mais l'homme, ce qui suppose de passer du consommateur à l'acteur, de la collectivité à la communauté. Des propositions innovantes doivent être affirmées entre la pensée unique et la mondialisation du système libéral.

 

Il faut dépasser la dualité entre aménagement du territoire et politique de la cité. La politique de la cité doit prendre le pas sur l'aménagement du territoire.

 

Un réseau international du développement local a été lancé en Juin 97 autour d'une charte du développement local. Le développement local est un combat mais c'est aussi la fête.

 

 

Questions / débat

 

Q-   Difficultés à cerner le développement local en France : naissance d'une dynamique, quels acteurs, quelles interactions ?

 

Q-   On retire de l'exposé l'erreur faite en Afrique de mettre l'Economique au centre du processus alors que c'est l'homme qui devrait y être, avec le renforcement de ses capacités.

 

Q-   Comment peut-on établir la relation LOCAL - macro ?

 

Q-   Au Togo ils ont fait le choix de placer l'homme au centre du développement mais n'y sont pas parvenus. Comment les français s'y sont-ils pris ?

 

Q-   Le développement local est-il un instrument de lutte pour sauvegarder les intérêts d'un groupe ? ou une manière de vivre ? ou un idéal ?

 

[J. Mercoiret rappelle que le groupe France n'avait pas prévu de mener une étude analogue à celle effectuée au Togo, Sénégal et Zimbabwe].

 

 

Des réponses de Pierre Nardin...

 

·     Le développement local est un processus adapté aux réalités : il y a donc plusieurs définitions possibles du développement local. Il n'y a pas de recette internationalement valable.

 

·     La décentralisation en France est un fait majeur, mais elle n'est pas allée assez loin, jusqu'au détail de la réalité quotidienne des collectivités locales.

 

·     Le développement local naît quand des gens font le constat de problèmes, de dérives.... Ils se mettent ensemble, en associations, pour animer un processus ascendant, alors que la décentralisation est d'origine étatique (donc descendante).

En France le développement local commence quand les élus jouent le jeu de la participation et de l'appui à la mise en œuvre de ce que propose la société locale, après réflexion et concertation.

Le développement local se nourrit d'espoir et de prospective et non de concurrence et de manoeuvres égoïstes.

 

 

 

5.         Les questions à approfondir définies par les 3 groupes de travail

 

Groupe 1

 

1.   Les rapports entre les coutumes (qui entretiennent des hiérarchies, une stratification sociale, des droits et devoirs différents fondés sur l'appartenance familiale...) et l'idée de citoyenneté qui reconnaît l'égalité entre tous les citoyens.

La question de l'éducation civique est corollaire de la précédente : elle concerne également la formation "idéologique" et ethique des acteurs.

 

2.  Le développement local doit assurer en permanence la coexistence d'une organisation structurée, efficace et crédible avec des exigences d'ouverture, d'innovation, de créativité.

 

3.   La connaissance de l'environnement institutionnel a été retenue comme une priorité, en vue de faciliter le positionnement des porteurs d'initiatives de développement local pour leur permettre de définir des orientations et des enjeux à la fois réalistes et utopiques (projet de société).

 

4.  Le statut des animateurs et la production de ressources propres constituent également des questions importantes retenues par le groupe 1 pour être approfondies.

 

Groupe 2

 

1.   Les relations entre acteurs de base et collectivités locales, entre les différents niveaux / échelles d'action ont été retenues comme une question prioritaire à approfondir.

Le partenariat entre acteurs de statuts et de professions différentes rejoint cette préoccupation : il s'agit des politiques, des techniciens, des autorités coutumières et religieuses.

 

Les relations entre la population locale et les émigrés (fils du terroir) sont également à prendre en compte.

 

2.   La deuxième question proposée concerne la contradiction possible entre légitimité de consensus et légitimité démocratique (majorité) ; par ailleurs un cadre de concertation institutionnel est-il pertinent, ou doit-il rester souple ?

 

3.  Ont été proposées ensuite les questions suivantes, pour la suite des travaux des groupes par pays :

 

·     Les conséquences d'une dynamique de développement local qui grandit et évolue : comment se prémunir contre les risques d'une croissance mal maîtrisée ?

·     Quels sont les facteurs variables qui interviennent dans les dynamiques de développement local (par opposition aux analogies qui réunissent les initiatives de développement local dans une même définition) ?

·     Les relations entre développement local et la culture du groupe, de la société locale, concernée.

·     Le financement du développement local.

·     Les motivations des leaders et des responsables, en référence aux limites du bénévolat : comment entretenir ces motivations ?

 

Groupe 3

 

1.   Les relations entre le développement local et les valeurs culturelles de la société concernée constituent l'objet de la première question à approfondir. Corollaire de cette question : les relations entre développement économique et développement humain.

 

2.  L'analyse des questions foncières par rapport aux objectifs et aux moyens de la décentralisation est retenue comme prioritaire pour les membres du groupe.

 

3.   La question du bénévolat a également été retenue, en même temps que celle du statut des animateurs.

 

4.   Les enjeux du développement local constituent la dernière question importante proposée par le groupe pour un approfondissement collectif. Quelles opportunités la globalisation de l'économie mondiale offre-t-elle ? Quelles contraintes impose-t-elle ? Quelles valeurs la société locale veut-elle privilégier : démocratie, citoyenneté, ouverture, transparence ? ou repli, protection, sécurité ?

 

 

 

6.         Perspectives pour les groupes locaux et le groupe France

 

Propositions des trois groupes de travail

 

·     Elargir le réseau à d'autres pays et appuyer la constitution de réseaux locaux et nationaux, bien structurés et fonctionnels.

 

·     Le réseau devrait privilégier l'analyse des expériences concrètes de terrain, pour les capitaliser et en assurer la diffusion. Des ateliers de réflexion, des échanges, des voyages d'études, un bulletin de liaison et la collaboration avec des bulletins existants, l'utilisation d'Internet peuvent permettre aux membres du réseau de communiquer. Un groupe propose de renforcer les capacités des acteurs qui intègrent le réseau.

 

·     Les équipes du réseau devraient affirmer une approche du développement local qui soit pertinente et convaincante.

 

·     Elles pourraient créer une "université mobile" du développement local pour mieux capitaliser les expériences, les valoriser et les mettre à la disposition d'autres acteurs.

Elle pourraient intervenir par des prestations de formation, dans les institutions de formation qui s'intéressent au développement local.

 

·     Les ateliers se posent toutefois, en conclusion, la question de l'autonomie financière des groupes et du réseau : comment y parvenir ?

 

·     Les ateliers ont identifié les ressources suivantes :

 

*    ressources humaines,

*    ressources financières : cartes de membres, cotisations, vente de prestation,

*    appuis institutionnels.

 

Perspectives immédiates

 

Dans les pays participant à l'atelier : Zimbabwe, Togo, Sénégal, Burkina Faso, Cameroun, Bénin, France, les groupes existants ou à créer mettront en ordre les différents thèmes proposés à la réflexion commune, en fonction des spécificités de chaque pays. Ils élaboreront une problématique spécifique au contexte, à ses évolutions, en fonction des enjeux et motivations du groupe.

 

Chaque groupe proposera un programme, une organisation et un fonctionnement pour lui-même et pour le réseau. Les moyens nécessaires seront identifiés et les sources possibles également.

 

Des échanges coordonnés par le groupe France seront effectués d'ici 3 mois pour parvenir progressivement à un programme commun, où un pays assurerait la coordination d'un thème et où les modalités de travail seraient concertées.

 

L'absence de moyens, à ce stade de l'action commune, a été fortement soulignée par le groupe France.



 [1]            Cf Document de l'étude Togo. Volume 1.

[2]              cf Annexe 2 : composition du Groupe Togo

[3]              BERAF/DLP : Bureau d'Etude de Recherche-Action et de Formation permanente pour le Développement Local et Participatif - Lomé.

[4]              cf Annexe 3 : dates et lieux des rencontres.

[5]              Dont 173 groupements, 15 associations communautaires ou comités villageois de développement et 7 initiatives privées (p. 40, volume 1 - Etude Togo).

[6]              A noter la répartition géographique : 19 dans la Région maritime, 21 dans celle des plateaux, aucune dans la Région centrale, 4 dans la Région de Kara et 29 dans la Région des savanes.

[7]              cf Etude Togo, Volume 1, pages 74 et 75.

[8]              Cf. Togo - Presse n° 5217 du 19 février 1998, 3 pages.

[9]              cf Annexe 4 : liste des participants au Comité de Pilotage.

[10]             Cf Annexe 5 : liste des rencontres.

[11]             Communal Areas Programme For Indegineous Ressources.

[12]             Cf. liste en Annexe 6.

[13]             "Rural District Councils Act" et "Urban Councils Act"

[14]             Avant 1988, l'organisation du territoire se déclinait en "urban district councils", en "rural councils" représentant les fermes commerciales en majorité blanche et en "district councils" représentant les zones à petites exploitations noires.

[15]             Un ward regroupe en moyenne 6 villages et ne doit pas représenter moins de 6 000 habitants.

 

[16]             La traduction a été réalisée par Marianne Courouble de Africa Resources Trust et membre du Groupe Développement Local et Décentralisation qui participait à l'atelier.

 

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Ministère de l'Aménagement du territoire et des Collectivités locales.


Commentaires articles

1.Posté par RANDRIANATOANDRO Rija le 20/08/2009 10:10
Je voudrais savoir un peu plus renseignements à propos des études sur les rapports sociaux dans le processus de développement local

2.Posté par sewade alvine le 05/06/2010 18:59
je suis étudiante en année de maîtrise eb sociologie à abomey-calavi;
quel lien vous établissez entre la gouvernance locale et la question de la citoyenneté?

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