Tambacounda, 10 janv (APS) - Des imams des régions de Tambacounda (Est) et Kédougou (Sud-est) ont, lors d'un atelier sur l’argumentaire islamique contre la mendicité et la maltraitance des enfants, estimé que ces deux problèmes relèvent d'une série de responsabilités partagées entre les parents, les maîtres coraniques, l’Etat et la société toute entière.
Au moins 26 imams de ces deux régions ont pris part jeudi à un atelier sur l’argumentaire islamique contre la maltraitance et la mendicité des enfants. La rencontre était organisée par le Partenariat pour le retrait et la réinsertion des enfants de la rue (PARRER), l’ONG ''La Lumière'', l’Unicef et le ministère de la Famille, de l'Enfance et de l'Entrepreneuriat féminin.
Certains participants ont fustigé les nombreuses rencontres organisées sous l'égide du gouvernement sans aucun suivi et la propension des pouvoirs publics à dégager de grosses sommes pour le système éducatif conventionnel. Ils estiment que tout cela se fait au détriment de l’enseignement coranique.
D’autres ont mis en cause les parents qui confient leurs enfants à des marabouts, dont ils savent qu’ils n’ont pas les moyens de les prendre en charge et sans rien leur donner en retour. L’attitude de ces maîtres coraniques, qui acceptent cette responsabilité tout en étant sûrs de ne pouvoir l’assumer, a aussi été décriée.
''Si l’Etat veut que la mendicité [des +talibés+] cesse, il faut qu’il se préoccupe de l’éducation coranique autant qu’il le fait pour [le système éducatif conventionnel]'', a dit l’imam Mamadou Salif Bâ du quartier Plateau de Tambacounda. Il a suggéré que l’Etat recense les maîtres coraniques, pour les embaucher ensuite, afin qu'ils puissent assurer convenablement leur responsabilité envers les pensionnaires les ''talibés''.
''Si les maîtres coraniques vont percevoir leur salaire au Trésor, on pourra alors à juste titre leur dire de ne plus inciter les +talibés+ à mendier'', a-t-il soutenu, soulignant que l'Etat peut facilement mettre fin à la mendicité, parce qu’il en a les moyens.
Dans le même sillage, l’imam Wilane de la grande mosquée de Saré Guiléle, à Tambacounda, a mis en cause l’Etat, les parents des enfants ''talibés'' et les populations, relevant que l’école coranique déjà mal-en-point pendant la colonisation, l’a encore été davantage après les indépendances.
Il a déploré le manque de suivi des nombreuses rencontres auxquelles il a eu à être convié sur la question. Ces rencontres ont été organisées par l’Etat qui, à son avis, contribue faiblement à l’amélioration des conditions d'études dans les écoles coraniques.
''L’économie du Sénégal repose sur les sortants des +daaras+ (écoles coraniques)'', a fait valoir l’imam, relevant que l’Etat devait avoir davantage d’égards envers ces structures d’éducation religieuse. Elles méritent plus que les montants modiques qu’il accorde par exemple à l’école coranique de Coky (région de Louga), lors des cérémonies de sortie de ses élèves.
Cette école comptait 3.500 personnes en 2012, a-t-il souligné, soutenant qu'aucun de ses pensionnaires ''ne mendie'' parce que les populations locales participent à son fonctionnement. Selon l'imam Wilane, les parents des ''talibés'' doivent assumer leur responsabilité vis-à-vis de leur progéniture.
Selon lui, la société a aussi sa part de responsabilité, car si dans chaque quartier, les famille se portaient volontaires pour assurer deux repas à un ou deux ''talibés'', le problème serait résolu. L’imam a aussi attiré l’attention sur la nécessité de ''faire la distinction entre ceux qui font vivre les +daaras'' et ceux qui vivent des +daaras+''.
L’imam Ahmad Kâ a fait part de son souhait de voir le projet des ''daaras modernes'', en veilleuse depuis quelque temps, réactualisé. Il a suggéré que l’Etat mette en place une commission pour recenser l’ensemble des structures d’enseignement coranique, afin de faire la différence entre ceux qui dispensent des apprentissages et ceux qui ne le font pas.
L’imam Cheikh Omar Agne de la grande mosquée de Tambacounda a, quant à lui, loué les mérites du ''daara'' traditionnel dont il est un produit, disant ne pas regretter d’en avoir fait l’expérience. Il a invité les participants à ne pas faire une fixation sur la mendicité des ''talibés'' étant donné que d’autres types de personnes, dont des adultes, font la manche pour d’autres raisons sans être inquiétés.
L’adjoint du gouverneur de Tambacounda, chargé du développement, Abdourahmane Ndiaye, a suggéré aux chefs religieux de profiter des rares tribunes qui leurs sont offertes lors des ''gamous'' et autres évènements religieux, pour interpeller les délégations gouvernementales, qui y sont présentes sur la condition des ''talibés''.
Pour lui, si toutes les familles religieuses adoptaient le même langage sur la question, les autorités seraient tenues de faire quelque chose, car elles se rendraient compte que c’est une préoccupation majeure.
Il a invité les imams des deux régions à se mettre ensemble pour confectionner un document dans lequel ils évoqueront toutes leurs propositions en faveur de l’éradication de la mendicité et de la maltraitance des enfants, lequel sera remis au président de la République.
Si la plupart des ''talibés'' sont des Sénégalais, ''40 à 45%'' d’entre eux viennent du Mali, de la Guinée Bissau et même de la Guinée, et parfois de la Gambie, a affirmé Cheikh Amadou Bamba Diaw, directeur exécutif du PARRER. Il revient dès lors à l’Etat de prendre des mesures pour sécuriser les frontières, a-t-il ajouté.
''Je suis assuré qu’il n’est pas normal que quelqu’un puisse traverser la frontière avec une dizaine ou une vingtaine d’enfants, sans qu’on lui demande les papiers de ces enfants'', a dit M. Diaw.
Ces maîtres coraniques doivent fournir au moins un papier faisant état de l’autorisation du parent à transporter l’enfant, a-t-il estimé, ajoutant : ''On ne doit pas prétexter de la libre circulation des personnes et des biens dans notre espace pour laisser passer des enfants qui ne sont pas en compagnie de leurs parents directs.''
ADI/ESF
Au moins 26 imams de ces deux régions ont pris part jeudi à un atelier sur l’argumentaire islamique contre la maltraitance et la mendicité des enfants. La rencontre était organisée par le Partenariat pour le retrait et la réinsertion des enfants de la rue (PARRER), l’ONG ''La Lumière'', l’Unicef et le ministère de la Famille, de l'Enfance et de l'Entrepreneuriat féminin.
Certains participants ont fustigé les nombreuses rencontres organisées sous l'égide du gouvernement sans aucun suivi et la propension des pouvoirs publics à dégager de grosses sommes pour le système éducatif conventionnel. Ils estiment que tout cela se fait au détriment de l’enseignement coranique.
D’autres ont mis en cause les parents qui confient leurs enfants à des marabouts, dont ils savent qu’ils n’ont pas les moyens de les prendre en charge et sans rien leur donner en retour. L’attitude de ces maîtres coraniques, qui acceptent cette responsabilité tout en étant sûrs de ne pouvoir l’assumer, a aussi été décriée.
''Si l’Etat veut que la mendicité [des +talibés+] cesse, il faut qu’il se préoccupe de l’éducation coranique autant qu’il le fait pour [le système éducatif conventionnel]'', a dit l’imam Mamadou Salif Bâ du quartier Plateau de Tambacounda. Il a suggéré que l’Etat recense les maîtres coraniques, pour les embaucher ensuite, afin qu'ils puissent assurer convenablement leur responsabilité envers les pensionnaires les ''talibés''.
''Si les maîtres coraniques vont percevoir leur salaire au Trésor, on pourra alors à juste titre leur dire de ne plus inciter les +talibés+ à mendier'', a-t-il soutenu, soulignant que l'Etat peut facilement mettre fin à la mendicité, parce qu’il en a les moyens.
Dans le même sillage, l’imam Wilane de la grande mosquée de Saré Guiléle, à Tambacounda, a mis en cause l’Etat, les parents des enfants ''talibés'' et les populations, relevant que l’école coranique déjà mal-en-point pendant la colonisation, l’a encore été davantage après les indépendances.
Il a déploré le manque de suivi des nombreuses rencontres auxquelles il a eu à être convié sur la question. Ces rencontres ont été organisées par l’Etat qui, à son avis, contribue faiblement à l’amélioration des conditions d'études dans les écoles coraniques.
''L’économie du Sénégal repose sur les sortants des +daaras+ (écoles coraniques)'', a fait valoir l’imam, relevant que l’Etat devait avoir davantage d’égards envers ces structures d’éducation religieuse. Elles méritent plus que les montants modiques qu’il accorde par exemple à l’école coranique de Coky (région de Louga), lors des cérémonies de sortie de ses élèves.
Cette école comptait 3.500 personnes en 2012, a-t-il souligné, soutenant qu'aucun de ses pensionnaires ''ne mendie'' parce que les populations locales participent à son fonctionnement. Selon l'imam Wilane, les parents des ''talibés'' doivent assumer leur responsabilité vis-à-vis de leur progéniture.
Selon lui, la société a aussi sa part de responsabilité, car si dans chaque quartier, les famille se portaient volontaires pour assurer deux repas à un ou deux ''talibés'', le problème serait résolu. L’imam a aussi attiré l’attention sur la nécessité de ''faire la distinction entre ceux qui font vivre les +daaras'' et ceux qui vivent des +daaras+''.
L’imam Ahmad Kâ a fait part de son souhait de voir le projet des ''daaras modernes'', en veilleuse depuis quelque temps, réactualisé. Il a suggéré que l’Etat mette en place une commission pour recenser l’ensemble des structures d’enseignement coranique, afin de faire la différence entre ceux qui dispensent des apprentissages et ceux qui ne le font pas.
L’imam Cheikh Omar Agne de la grande mosquée de Tambacounda a, quant à lui, loué les mérites du ''daara'' traditionnel dont il est un produit, disant ne pas regretter d’en avoir fait l’expérience. Il a invité les participants à ne pas faire une fixation sur la mendicité des ''talibés'' étant donné que d’autres types de personnes, dont des adultes, font la manche pour d’autres raisons sans être inquiétés.
L’adjoint du gouverneur de Tambacounda, chargé du développement, Abdourahmane Ndiaye, a suggéré aux chefs religieux de profiter des rares tribunes qui leurs sont offertes lors des ''gamous'' et autres évènements religieux, pour interpeller les délégations gouvernementales, qui y sont présentes sur la condition des ''talibés''.
Pour lui, si toutes les familles religieuses adoptaient le même langage sur la question, les autorités seraient tenues de faire quelque chose, car elles se rendraient compte que c’est une préoccupation majeure.
Il a invité les imams des deux régions à se mettre ensemble pour confectionner un document dans lequel ils évoqueront toutes leurs propositions en faveur de l’éradication de la mendicité et de la maltraitance des enfants, lequel sera remis au président de la République.
Si la plupart des ''talibés'' sont des Sénégalais, ''40 à 45%'' d’entre eux viennent du Mali, de la Guinée Bissau et même de la Guinée, et parfois de la Gambie, a affirmé Cheikh Amadou Bamba Diaw, directeur exécutif du PARRER. Il revient dès lors à l’Etat de prendre des mesures pour sécuriser les frontières, a-t-il ajouté.
''Je suis assuré qu’il n’est pas normal que quelqu’un puisse traverser la frontière avec une dizaine ou une vingtaine d’enfants, sans qu’on lui demande les papiers de ces enfants'', a dit M. Diaw.
Ces maîtres coraniques doivent fournir au moins un papier faisant état de l’autorisation du parent à transporter l’enfant, a-t-il estimé, ajoutant : ''On ne doit pas prétexter de la libre circulation des personnes et des biens dans notre espace pour laisser passer des enfants qui ne sont pas en compagnie de leurs parents directs.''
ADI/ESF