I - Les femmes veulent, des hommes font de la résistance
Bébé au dos, boubou coloré, Mame Diarra C. apporte son grain de sel à la discussion : « On veut que les personnes, notamment les relais communautaires, qui viennent dans nos foyers parler de planification familiale, s’adressent également aux hommes, à nos maris. Le problème, c’est eux ! »
Dans une salle située à l’arrière-cour du dispensaire Dominique de Pikine, une ville de l’agglomération dakaroise, une vingtaine de femmes attendent dans une salle. Elles sont venues, ce matin du jeudi 24 avril, prendre part à une session de dialogue communautaire sur la santé maternelle néonatale et infantile et la planification familiale. Au fil des minutes, la salle s’avère trop petite pour accueillir toutes les invitées. La petite cour finit par refuser du monde. On installe rapidement une bâche pour se couvrir du soleil. D’autres chaises sont louées pour faire face à la demande.
Mme Lala Diop, point focal de Dakar, après les mots de bienvenue de Mme Véronique Bassène, revient sur l’ordre du jour de la rencontre : « C’est le moment de parler de la planification familiale. Il y en a parmi vous qui la pratiquent ; certaines ont renoncé. D’autres n’ont pas recours aux méthodes de contraception ».
Mme Thioune Yacine Diagne prend le relais pour parler brièvement du repositionnement de la planification familiale. Elle revient sur les rumeurs non fondées qui, au Sénégal, entravent la progression du nombre de femmes qui utilisent les méthodes modernes de contraception. « Les prestataires ici présentes vous donneront la bonne information », lance-t-elle aux femmes. L’ambition du réseau Siggil Jigéen est de contribuer, par le plaidoyer, au « retour de la grande affluence d’antan dans les centres de Santé. » Mme Thioune est convaincue que « la relance de la planification familiale contribuera à la réduction de la mortalité maternelle. »
« Formulez clairement vos besoins et précisez vos attentes. Parlez de vos difficultés, même si nous ne sommes pas dans un tribunal. Nous sommes dans un espace de dialogue pour la promotion de l’espacement des naissances », déclare Mme Bassène qui invite ensuite l’assistance à intervenir.
Mme Hann Ndèye Coumba Guèye, Mme Dembélé Sokhna Sarr Seck et Mme Sougou Ngoma Top, des sages-femmes assises autour d’une table, sont prêtes à répondre aux réponses des femmes. Plus tard, au cours des discussions, les uns après les autres, elles prendront la parole pour expliquer, s’expliquer, conseiller, interpeller « leurs sœurs et filles » pour « leur bien et le bien-être de la communauté. »
Fatou N. (1), une femme d’une trentaine d’années, se saisit du micro. Elle déplore la qualité de l’accueil dans les centres de Santé. La plainte de Nogoye F. est plus précise : « la nuit, on est souvent mal accueilli et le ticket de 1.000 FCfa est cher ».
Une des trois sages-femmes réplique plutôt gentiment : « nous sommes entre nous. Nous sommes à votre écoute. Nous allons nous pencher sur le problème de l’accueil et l’améliorer. C’est librement que vous décidez de venir nous voir et choisir une méthode de contraception. A chaque patiente, on explique les avantages et les inconvénients de toutes les méthodes. Nous devons dialoguer. Les patientes doivent nous parler franchement. »
Sira K. : « Il est important d’aller voir le personnel de Santé »
Ngoné G., une quinquagénaire, prend le relais : « Je dis à mes belles-filles d’aller voir des professionnelles de la Santé avant de pratiquer la planification. Je leur conseille d’éviter d’acheter des pilules au marché. Je veux leur éviter des problèmes. »
Sira K., ronde et la trentaine bien sonnée, lui emboîte le pas : « C’est juste ce qu’elle dit. Il est important d’aller voir le personnel de Santé ». Elle illustre ses propos par sa propre expérience : « il y a une dizaine d’années, on m’a posé un Dispositif intra-utérin (Diu). J’ai respecté tous les rendez-vous avec le personnel de Santé pour des contrôles. Je n’ai eu aucun problème avec mon appareil. Lors de ma dernière visite, le médecin m’a d’ailleurs félicitée ».
Une des sages-femmes a le sourire aux lèvres en entendant ces témoignages. Elle souligne, d’une part, « l’importance du respect des rendez-vous pour les femmes sous contraception en vue d’un bon suivi » et, d’autre part, le « danger auquel certaines patientes s’exposent en utilisant des pilules vendues dans les marchés ou en s’approvisionnant à crédit auprès de leurs amies ».
Suit ce cri du cœur : « aidez-nous en respectant les rendez-vous. Le ticket de consultation ne coûte que 500 francs. Une femme ne doit pas rester six mois sans se faire consulter. Si vous le faites, vous nous faciliterez le travail. Nous avons même donné à certaines d’entre vous nos numéros privés de téléphone ».
Le non-respectt des rendez-vous et la tendance de certaines patientes à fréquenter d’autres centres de Santé ne peuvent pas contribuer à la fiabilité des statistiques sur la planification familiale, précise une sage-femme.
Les deux à trois interventions qui suivent parlent des rumeurs et des effets indésirables de certaines méthodes. Témoignages d’utilisatrices : « la pilule m’a fait grossir. Je dors trop. Je m’essouffle trop vite » ; « quand on oublie de prendre la pilule, on saigne » ; « ma tension artérielle a augmenté quand je me suis mise sous contraception ».
Les trois sages-femmes en ont souvent entendu de plus incroyables. Comme ce bébé qui vient au monde avec le stérilet de sa mère entre les lèvres ! Les trois prestataires prennent la parole, reviennent sur les effets indésirables et la durée de vie de certaines méthodes avant d’inviter les femmes « à chercher la bonne information et à s’informer à la bonne source, à respecter les tranches horaires dédiées à la santé maternelle, néonatale et infantile et à la planification familiale ».
Mame Diarra C. : « Le problème, ce sont les hommes »
Soukeyna B. intervient. Visiblement, sa période de procréation est derrière elle. Sans élever la voix, elle pose une question : « où est-ce qu’on peut bénéficier de services de planification familiale ? » Réponse d’une sage-femme : « ces services sont offerts partout au Sénégal dans énormément de structures de Santé. Tous les prestataires formés pourront vous les offrir ».
Une de ses collègues revient sur un sujet qui lui tient manifestement à cœur : « les patientes nous prennent souvent au dépourvu et demandent une méthode, notamment la contraception d’urgence pour ne pas tomber enceinte, au lendemain du retour impromptu ou non d’un mari émigré ». (2) Une autre sage-femme prend la balle au rebond en sentant que le sujet mérite plus d’attention : « Il y a toujours une méthode pour régler les problèmes de celles qui nous sollicitent. A tout moment, on peut vous aider à faire face à vos problèmes. Venez-nous voir ».
Bébé au dos, boubou coloré, Mame Diarra C. apporte son grain de sel : « On veut que les personnes, notamment les relais communautaires qui viennent dans nos foyers nous parler de planification familiale, s’adressent également aux hommes, à nos maris. Ce sont eux le problème ! »
Cheveux poivre et sel, lunettes de correction sur le nez, caftan bleu ciel, Ibrahima G. monte au créneau. L’humour suinte de ses propos : « les hommes d’aujourd’hui sont dévalués. Ils ne peuvent plus faire face à toutes les charges du ménage en ces temps difficiles ». Un rire contagieux traverse l’assistance. Encouragé par cette complicité, Ibrahima poursuit : « Parlez à vos hommes. La femme est le meilleur relais pour la promotion de la planification familiale. Transmettez à vos époux les informations recueillies ici ».
Une sage-femme lui emboîte le pas. « Les grossesses nombreuses et rapprochées finissent par altérer la beauté de la femme, à abîmer son corps et à faire fonctionner nos ménages. Disons-nous des vérités puisque nous sommes entre nous : quand ces choses arrivent, les hommes ont tendance à aller voir ailleurs ». L’assistance approuve bruyamment. Le message est apparemment bien passé : espacer les naissances, c’est préserver sa santé, conserver son mari et avoir un bien-être familial.
Sources :
1 - Les prénoms des femmes de la communauté ont été modifiés.
2 - Lire à ce sujet l’étude-diagnostic sur la contraception d’urgence au Sénégal - Ministère de la Santé et de la Prévention médicale - Février 2006.
Les relais communautaires font passer l’information
Préserver sa santé, conserver son mari et avoir un bien-être familial ! « Cela, je l’ai fait depuis longtemps ! », soutient Adama Nd., la quarantaine, forte corpulence, teint noir et boubou ample. Son mari est un militaire qui, comme la plupart des hommes en tenue, « préfère avoir une famille nombreuse ». Adama témoigne : « Au bout de quelques grossesses, j’ai compris que cela ruinait ma santé et les finances du ménage. Je me suis mise sous contraception ». Adama en parle à son conjoint qui a approuvé son choix. Elle explique son choix : « Avec une famille nombreuse de 12 enfants à gérer, sans compter le loyer à payer alors que les revenus ne sont pas très importants, cela nous posera des problèmes. Pour le moment, on vit dans un camp militaire, mais il faut penser à demain, à la retraite qui signifiera un retour dans notre communauté d’origine ».
Pour Adama, « le vrai problème, ce sont effectivement les hommes. Certains hommes acceptent volontiers que leurs femmes pratiquent la PF. D’autres, en revanche, pensent encore que la religion musulmane s’oppose à la PF dans un couple uni par les liens du mariage (1). Ils pensent qu’ils doivent faire des enfants pour augmenter le nombre de musulmans ».
Selon Adama, « ces maris veulent contrôler les faits et gestes de leurs épouses. Cela pousse des femmes à recourir en cachette à la contraception moderne en allant dans un centre de Santé très éloigné de leur domicile ». Aujourd’hui, Adama est un relais communautaire au sein d’une association de développement de la ville voisine de Guédiawaye dans la grande banlieue de Dakar.
Mbousso K. est, elle aussi, un relais communautaire dans la même association. Elle déplore cette « concurrence malsaine qui pousse, dans les ménages polygamiques, des femmes à avoir un nombre élevé d’enfants avec des grossesses très rapprochées. Cela ruine leur santé ». Mbousso a quatre enfants. Après son premier enfant, elle a attendu quatre ans avant d’en faire un autre. Son dernier fils est âgé de 12 ans ! « Dieu merci, je n’ai aucun problème. Je m’entends bien avec mon époux qui a accepté que je pratique la PF. Nous voulons offrir une bonne éducation à nos enfants et un bon cadre de vie », soutient-elle.
Mbousso conseille à ses sœurs « de penser à leur avenir, de préserver leur santé, de ne pas perturber leur ménage avec un nombre d’enfants auxquels le mari ne pourrait pas, faute de moyens à cause des difficultés de la vie, s’occuper. »
Au cours des visites à domicile dans le quartier de Wakhinane Nimzatt de la ville de Guédiawaye, précise-t-elle, « nous parlons aux femmes en tant que relais communautaires. Nous les aidons à comprendre que l’espacement des naissances peut aider à économiser de l’argent pour acheter une maison. Nous conseillons aux femmes d’en discuter avec leurs maris. De plus en plus d’hommes sortent et écoutent ce que nous disons. Il y en a même qui viennent au siège de notre association pour chercher la bonne information ».
Mbousso K. a l’air d’une femme épanouie. Son physique et son beau visage montrent qu’elle a bien pris soin d’elle. Sans doute deux arguments de choc pour retenir un homme à la maison. Et revient en écho, l’avertissement de la sage-femme : « quand les grossesses nombreuses enlaidissent et abîment le corps, les hommes ont tendance à aller voir ailleurs ! »
E. B. S.
1. Lire l’interview de M. Abdoul Aziz Kébé, universitaire et islamologue sénégalais sur la planification accordée au journal « le Soleil » du 26 juillet 2007
Un moyen efficace de réduire la mortalité maternelle
Des milliers de Sénégalaises voudraient avoir accès aux services de PF sans en avoir la possibilité. Si leurs besoins étaient satisfaits, la prévalence de la contraception moderne connaîtrait un formidable bond et moins de femmes et d’enfants perdraient leur vie.
Organisé par le réseau « Siggil Jigeen » (1) appuyé par Intrahealth International, le dialogue communautaire vise deux objectifs. Le premier est d’améliorer « la qualité des services de santé maternelle néonatale et infantile et la planification familiale ». Le second objectif est de renforcer les bonnes pratiques chez les femmes utilisatrices des services.
La session de dialogue communautaire est, selon ses initiateurs, « une réunion au cours de laquelle des prestataires de services d’une communauté et cette même communauté échangent des informations, des opinions, des problèmes d’intérêt commun afin de trouver des voies et moyens pour améliorer les conditions de vie. » (2)
La session de dialogue communautaire organisée au dispensaire Dominique de Pikine s’inscrit dans la dynamique de repositionnement de la planification enclenchée depuis la conférence d’Accra, au Ghana (2005). Quelque 300 délégués des pays de l’Afrique de l’Ouest avaient participé aux travaux de cette conférence. Cette rencontre internationale faisait suite à d’autres, notamment celle que le Bureau de l’Oms pour l’Afrique a organisée en 2004 afin de relancer les programmes de planification familiale (PF).
Notre pays dispose également d’une Feuille de route pour accélérer la réduction de la morbidité et de la mortalité maternelles et néonatales. Le Sénégal a aussi l’ambition d’atteindre, en 2015, les Objectifs du millénaire pour le développement (Omd). Deux des huit Omd interpellent les acteurs de la Santé de la reproduction. Il s’agit de la réduction de trois quarts de la mortalité maternelle et de la réduction de 2/3 de la mortalité infantile.
Le ratio de mortalité maternelle est passé de 510 pour 100.000 naissances vivantes en 1992 à 401 décès pour 100.000 naissances vivantes en 2005. Autrement dit, pour 100.000 femmes qui accouchent, 401 décèdent à la suite de leur grossesse, de leur accouchement ou dans les 40 jours qui suivent l’accouchement. (3)
La PF peut réduire de 20 % la mortalité maternelle
Chez les nouveau-nés (c’est-à-dire les enfants qui sont âgés de moins de vingt-huit (28) jours), parmi 1.000 enfants qui naissent, 35 décèdent à la naissance ou dans les 28 jours qui suivent leur naissance. Des études ont montré que cette mortalité néonatale occupe les 50 % de la mortalité infantile.
En ce qui concerne la planification familiale (PF), on constate que la connaissance de la contraception par les femmes sénégalaises actuellement mariées est très élevée. Les résultats de la dernière Enquête démographique de santé 2005 (Eds IV) montrent, en effet, que plus de 90 % des femmes en union connaissent les méthodes de contraception. Quelque 10,3 % des femmes en union ont cependant recours aux méthodes de contraception contre 7 % au Mali (Rapport de synthèse Eds Mali, 2006). Les Iles du Cap-Vert (46 %) - suivies du Ghana (19 %) - est le pays qui a la prévalence la plus élevée en Afrique de l’Ouest. (4). Il est pourtant prouvé que la PF est parmi les stratégies les plus efficaces de réduction de la mortalité maternelle. La PF peut réduire de 20 % cette mortalité.
En outre, des statistiques ont révélé qu’au Sénégal, si aucune grossesse ne survenait avant 36 mois (03 ans) de la précédente, le taux de mortalité des enfants de moins d’un an serait réduit de 21 %, celui des enfants de moins de cinq ans de 13 % et les décès des enfants de moins de cinq ans serait réduits de 10.000 enfants chaque année.
Au Sénégal, sur 100 femmes en union, les 32 déclarent vouloir espacer la naissance de leurs enfants. Malheureusement, elles n’ont pas recours à la planification familiale. La dernière Enquête démographique et de santé (Eds IV/2005) révèle que parmi les femmes sénégalaises actuellement en union, 21 % ont déclaré ne plus vouloir d’enfant, 39 % veulent attendre plus tard (deux ans ou plus) avant d’en avoir un (autre), c’est-à-dire qu’elles expriment le désir d’un certain espacement des naissances (...). Si on permettait à ces femmes de satisfaire leurs besoins en PF, la prévalence de la contraception moderne connaîtrait un formidable bond et moins de femmes et d’enfants perdraient leur vie.
Sources :
1. Mis sur pied en 1995, le « Réseau Siggil Jigéen » (RSJ) compte aujourd’hui 17 organisations membres dont les activités intéressent directement plus de 12.000 femmes sénégalaises. Parmi ses domaines d’action, on note la Santé de la reproduction, les droits des femmes, le leadership des jeunes, l’alphabétisation et la formation, la micro-finance, la lutte contre la pauvreté.
2. Lire à ce sujet les recommandations du Rapport final de l’étude intitulée « Représentations, communication et prise de décision concernant l’utilisation des méthodes contraceptives au Sénégal ». Septembre 2006.
3. La Santé de la reproduction en bref au Sénégal. Agence nationale de la statistique et de la démographie. 11 juillet 2007.
4. Fiche de données sur la population mondiale - Population Reference Bureau - 2006
Achat des produits contraceptifs : Les partenaires extérieurs ont encore le monopole
Les partenaires au développement déboursent beaucoup d’argent pour acheter des produits contraceptifs. La contribution de l’’Etat est encore faible. Relancer la PF, c’est aussi augmenter les financements publics alloués à cet important volet des programmes de planification familiale.
« Le droit de planifier sa famille fait partie des droits et des libertés fondamentales qui s’appliquent à toute personne, en tout lieu », dit un document du Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa). Cette institution onusienne fait, cette année, un focus sur la planification familiale à l’occasion de Journée mondiale de la population célébrée le 11 juillet. Le thème retenu est « La planification familiale : c’est un droit, faisons-en une réalité. »
Mercredi 09 juillet, le ministère de la Santé et de la Prévention a procédé au lancement de la campagne nationale de trois mois en vue de « proposer une image renouvelée, positive et actualisée de la planification familiale », selon les mots du Dr Fatou Nar Mbaye, chef de la division de la Santé de la reproduction au ministère de la Santé. Ces efforts visant à repositionner la planification sont louables, mais ils devraient être accompagnés de la mise en place de financements plus conséquents tirés du budget national.
En effet, les besoins en produits contraceptifs, estimés approximativement à 400 millions de francs Cfa sont quasi-totalement financés par l’Usaid, le Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa) et à un degré moindre par la Jica (la coopération japonaise). Ces lignes sont tirées du document de cadrage technique de la Journée mondiale de la population 2008 élaboré par le ministère du Plan et du Développement durable. Le même document note que l’Etat du Sénégal, depuis ces dernières années, a ouvert une ligne budgétaire d’un montant de 45 millions de francs Cfa pour l’achat de produits contraceptifs. « Cette ligne pourrait souligne le document, pourrait connaitre une hausse les années à venir en raison de l’intérêt réel que cette dernière suscite au ministère de la Santé ». Toutefois, tempère le document déjà cité, « la viabilité à long terme des programmes de planification familiale dépend de l’affectation de fonds publics consistants et conséquents. »
Ces manifestations organisées par l’Unfpa et le ministère de la Santé sont des occasions pour parler de la PF dans un pays où comme le dit le Dr Nafissatou J. Diop de Population Council « les décideurs locaux ne sont que très peu des champions de la PF et ont peu fait pour promouvoir la P.F. ». (1).
Le Dr Diop classe parmi les défis du changement « la promotion des méthodes de longue durée comme la stérilisation, les implants et le Diu en travaillant fortement au niveau des prestataires de Santé ». Elle note en effet que « plusieurs études ont montré des taux élevés de discontinuité au Sénégal. Or les méthodes de courte durée, la pilule et les injectables, sont les méthodes les plus promues et utilisées au Sénégal. Pour atteindre un niveau de prévalence plus élevé l’effort du ministère va porter sur les méthodes de longue durée tel le Diu ».
Le Dr Diop recommande, entre autre, la mise en œuvre de « stratégies de communication (...) plus proches des populations, avec un langage plus adapté aux réalités culturelles et en ciblant les groupes sociaux et les couples. Aussi le bienfait de la PF pour le groupe et la communauté doit être mis en avant. Sa contribution pour la réduction de la mortalité maternelle sera aussi promue. »
Le Soleil
Bébé au dos, boubou coloré, Mame Diarra C. apporte son grain de sel à la discussion : « On veut que les personnes, notamment les relais communautaires, qui viennent dans nos foyers parler de planification familiale, s’adressent également aux hommes, à nos maris. Le problème, c’est eux ! »
Dans une salle située à l’arrière-cour du dispensaire Dominique de Pikine, une ville de l’agglomération dakaroise, une vingtaine de femmes attendent dans une salle. Elles sont venues, ce matin du jeudi 24 avril, prendre part à une session de dialogue communautaire sur la santé maternelle néonatale et infantile et la planification familiale. Au fil des minutes, la salle s’avère trop petite pour accueillir toutes les invitées. La petite cour finit par refuser du monde. On installe rapidement une bâche pour se couvrir du soleil. D’autres chaises sont louées pour faire face à la demande.
Mme Lala Diop, point focal de Dakar, après les mots de bienvenue de Mme Véronique Bassène, revient sur l’ordre du jour de la rencontre : « C’est le moment de parler de la planification familiale. Il y en a parmi vous qui la pratiquent ; certaines ont renoncé. D’autres n’ont pas recours aux méthodes de contraception ».
Mme Thioune Yacine Diagne prend le relais pour parler brièvement du repositionnement de la planification familiale. Elle revient sur les rumeurs non fondées qui, au Sénégal, entravent la progression du nombre de femmes qui utilisent les méthodes modernes de contraception. « Les prestataires ici présentes vous donneront la bonne information », lance-t-elle aux femmes. L’ambition du réseau Siggil Jigéen est de contribuer, par le plaidoyer, au « retour de la grande affluence d’antan dans les centres de Santé. » Mme Thioune est convaincue que « la relance de la planification familiale contribuera à la réduction de la mortalité maternelle. »
« Formulez clairement vos besoins et précisez vos attentes. Parlez de vos difficultés, même si nous ne sommes pas dans un tribunal. Nous sommes dans un espace de dialogue pour la promotion de l’espacement des naissances », déclare Mme Bassène qui invite ensuite l’assistance à intervenir.
Mme Hann Ndèye Coumba Guèye, Mme Dembélé Sokhna Sarr Seck et Mme Sougou Ngoma Top, des sages-femmes assises autour d’une table, sont prêtes à répondre aux réponses des femmes. Plus tard, au cours des discussions, les uns après les autres, elles prendront la parole pour expliquer, s’expliquer, conseiller, interpeller « leurs sœurs et filles » pour « leur bien et le bien-être de la communauté. »
Fatou N. (1), une femme d’une trentaine d’années, se saisit du micro. Elle déplore la qualité de l’accueil dans les centres de Santé. La plainte de Nogoye F. est plus précise : « la nuit, on est souvent mal accueilli et le ticket de 1.000 FCfa est cher ».
Une des trois sages-femmes réplique plutôt gentiment : « nous sommes entre nous. Nous sommes à votre écoute. Nous allons nous pencher sur le problème de l’accueil et l’améliorer. C’est librement que vous décidez de venir nous voir et choisir une méthode de contraception. A chaque patiente, on explique les avantages et les inconvénients de toutes les méthodes. Nous devons dialoguer. Les patientes doivent nous parler franchement. »
Sira K. : « Il est important d’aller voir le personnel de Santé »
Ngoné G., une quinquagénaire, prend le relais : « Je dis à mes belles-filles d’aller voir des professionnelles de la Santé avant de pratiquer la planification. Je leur conseille d’éviter d’acheter des pilules au marché. Je veux leur éviter des problèmes. »
Sira K., ronde et la trentaine bien sonnée, lui emboîte le pas : « C’est juste ce qu’elle dit. Il est important d’aller voir le personnel de Santé ». Elle illustre ses propos par sa propre expérience : « il y a une dizaine d’années, on m’a posé un Dispositif intra-utérin (Diu). J’ai respecté tous les rendez-vous avec le personnel de Santé pour des contrôles. Je n’ai eu aucun problème avec mon appareil. Lors de ma dernière visite, le médecin m’a d’ailleurs félicitée ».
Une des sages-femmes a le sourire aux lèvres en entendant ces témoignages. Elle souligne, d’une part, « l’importance du respect des rendez-vous pour les femmes sous contraception en vue d’un bon suivi » et, d’autre part, le « danger auquel certaines patientes s’exposent en utilisant des pilules vendues dans les marchés ou en s’approvisionnant à crédit auprès de leurs amies ».
Suit ce cri du cœur : « aidez-nous en respectant les rendez-vous. Le ticket de consultation ne coûte que 500 francs. Une femme ne doit pas rester six mois sans se faire consulter. Si vous le faites, vous nous faciliterez le travail. Nous avons même donné à certaines d’entre vous nos numéros privés de téléphone ».
Le non-respectt des rendez-vous et la tendance de certaines patientes à fréquenter d’autres centres de Santé ne peuvent pas contribuer à la fiabilité des statistiques sur la planification familiale, précise une sage-femme.
Les deux à trois interventions qui suivent parlent des rumeurs et des effets indésirables de certaines méthodes. Témoignages d’utilisatrices : « la pilule m’a fait grossir. Je dors trop. Je m’essouffle trop vite » ; « quand on oublie de prendre la pilule, on saigne » ; « ma tension artérielle a augmenté quand je me suis mise sous contraception ».
Les trois sages-femmes en ont souvent entendu de plus incroyables. Comme ce bébé qui vient au monde avec le stérilet de sa mère entre les lèvres ! Les trois prestataires prennent la parole, reviennent sur les effets indésirables et la durée de vie de certaines méthodes avant d’inviter les femmes « à chercher la bonne information et à s’informer à la bonne source, à respecter les tranches horaires dédiées à la santé maternelle, néonatale et infantile et à la planification familiale ».
Mame Diarra C. : « Le problème, ce sont les hommes »
Soukeyna B. intervient. Visiblement, sa période de procréation est derrière elle. Sans élever la voix, elle pose une question : « où est-ce qu’on peut bénéficier de services de planification familiale ? » Réponse d’une sage-femme : « ces services sont offerts partout au Sénégal dans énormément de structures de Santé. Tous les prestataires formés pourront vous les offrir ».
Une de ses collègues revient sur un sujet qui lui tient manifestement à cœur : « les patientes nous prennent souvent au dépourvu et demandent une méthode, notamment la contraception d’urgence pour ne pas tomber enceinte, au lendemain du retour impromptu ou non d’un mari émigré ». (2) Une autre sage-femme prend la balle au rebond en sentant que le sujet mérite plus d’attention : « Il y a toujours une méthode pour régler les problèmes de celles qui nous sollicitent. A tout moment, on peut vous aider à faire face à vos problèmes. Venez-nous voir ».
Bébé au dos, boubou coloré, Mame Diarra C. apporte son grain de sel : « On veut que les personnes, notamment les relais communautaires qui viennent dans nos foyers nous parler de planification familiale, s’adressent également aux hommes, à nos maris. Ce sont eux le problème ! »
Cheveux poivre et sel, lunettes de correction sur le nez, caftan bleu ciel, Ibrahima G. monte au créneau. L’humour suinte de ses propos : « les hommes d’aujourd’hui sont dévalués. Ils ne peuvent plus faire face à toutes les charges du ménage en ces temps difficiles ». Un rire contagieux traverse l’assistance. Encouragé par cette complicité, Ibrahima poursuit : « Parlez à vos hommes. La femme est le meilleur relais pour la promotion de la planification familiale. Transmettez à vos époux les informations recueillies ici ».
Une sage-femme lui emboîte le pas. « Les grossesses nombreuses et rapprochées finissent par altérer la beauté de la femme, à abîmer son corps et à faire fonctionner nos ménages. Disons-nous des vérités puisque nous sommes entre nous : quand ces choses arrivent, les hommes ont tendance à aller voir ailleurs ». L’assistance approuve bruyamment. Le message est apparemment bien passé : espacer les naissances, c’est préserver sa santé, conserver son mari et avoir un bien-être familial.
Sources :
1 - Les prénoms des femmes de la communauté ont été modifiés.
2 - Lire à ce sujet l’étude-diagnostic sur la contraception d’urgence au Sénégal - Ministère de la Santé et de la Prévention médicale - Février 2006.
Les relais communautaires font passer l’information
Préserver sa santé, conserver son mari et avoir un bien-être familial ! « Cela, je l’ai fait depuis longtemps ! », soutient Adama Nd., la quarantaine, forte corpulence, teint noir et boubou ample. Son mari est un militaire qui, comme la plupart des hommes en tenue, « préfère avoir une famille nombreuse ». Adama témoigne : « Au bout de quelques grossesses, j’ai compris que cela ruinait ma santé et les finances du ménage. Je me suis mise sous contraception ». Adama en parle à son conjoint qui a approuvé son choix. Elle explique son choix : « Avec une famille nombreuse de 12 enfants à gérer, sans compter le loyer à payer alors que les revenus ne sont pas très importants, cela nous posera des problèmes. Pour le moment, on vit dans un camp militaire, mais il faut penser à demain, à la retraite qui signifiera un retour dans notre communauté d’origine ».
Pour Adama, « le vrai problème, ce sont effectivement les hommes. Certains hommes acceptent volontiers que leurs femmes pratiquent la PF. D’autres, en revanche, pensent encore que la religion musulmane s’oppose à la PF dans un couple uni par les liens du mariage (1). Ils pensent qu’ils doivent faire des enfants pour augmenter le nombre de musulmans ».
Selon Adama, « ces maris veulent contrôler les faits et gestes de leurs épouses. Cela pousse des femmes à recourir en cachette à la contraception moderne en allant dans un centre de Santé très éloigné de leur domicile ». Aujourd’hui, Adama est un relais communautaire au sein d’une association de développement de la ville voisine de Guédiawaye dans la grande banlieue de Dakar.
Mbousso K. est, elle aussi, un relais communautaire dans la même association. Elle déplore cette « concurrence malsaine qui pousse, dans les ménages polygamiques, des femmes à avoir un nombre élevé d’enfants avec des grossesses très rapprochées. Cela ruine leur santé ». Mbousso a quatre enfants. Après son premier enfant, elle a attendu quatre ans avant d’en faire un autre. Son dernier fils est âgé de 12 ans ! « Dieu merci, je n’ai aucun problème. Je m’entends bien avec mon époux qui a accepté que je pratique la PF. Nous voulons offrir une bonne éducation à nos enfants et un bon cadre de vie », soutient-elle.
Mbousso conseille à ses sœurs « de penser à leur avenir, de préserver leur santé, de ne pas perturber leur ménage avec un nombre d’enfants auxquels le mari ne pourrait pas, faute de moyens à cause des difficultés de la vie, s’occuper. »
Au cours des visites à domicile dans le quartier de Wakhinane Nimzatt de la ville de Guédiawaye, précise-t-elle, « nous parlons aux femmes en tant que relais communautaires. Nous les aidons à comprendre que l’espacement des naissances peut aider à économiser de l’argent pour acheter une maison. Nous conseillons aux femmes d’en discuter avec leurs maris. De plus en plus d’hommes sortent et écoutent ce que nous disons. Il y en a même qui viennent au siège de notre association pour chercher la bonne information ».
Mbousso K. a l’air d’une femme épanouie. Son physique et son beau visage montrent qu’elle a bien pris soin d’elle. Sans doute deux arguments de choc pour retenir un homme à la maison. Et revient en écho, l’avertissement de la sage-femme : « quand les grossesses nombreuses enlaidissent et abîment le corps, les hommes ont tendance à aller voir ailleurs ! »
E. B. S.
1. Lire l’interview de M. Abdoul Aziz Kébé, universitaire et islamologue sénégalais sur la planification accordée au journal « le Soleil » du 26 juillet 2007
Un moyen efficace de réduire la mortalité maternelle
Des milliers de Sénégalaises voudraient avoir accès aux services de PF sans en avoir la possibilité. Si leurs besoins étaient satisfaits, la prévalence de la contraception moderne connaîtrait un formidable bond et moins de femmes et d’enfants perdraient leur vie.
Organisé par le réseau « Siggil Jigeen » (1) appuyé par Intrahealth International, le dialogue communautaire vise deux objectifs. Le premier est d’améliorer « la qualité des services de santé maternelle néonatale et infantile et la planification familiale ». Le second objectif est de renforcer les bonnes pratiques chez les femmes utilisatrices des services.
La session de dialogue communautaire est, selon ses initiateurs, « une réunion au cours de laquelle des prestataires de services d’une communauté et cette même communauté échangent des informations, des opinions, des problèmes d’intérêt commun afin de trouver des voies et moyens pour améliorer les conditions de vie. » (2)
La session de dialogue communautaire organisée au dispensaire Dominique de Pikine s’inscrit dans la dynamique de repositionnement de la planification enclenchée depuis la conférence d’Accra, au Ghana (2005). Quelque 300 délégués des pays de l’Afrique de l’Ouest avaient participé aux travaux de cette conférence. Cette rencontre internationale faisait suite à d’autres, notamment celle que le Bureau de l’Oms pour l’Afrique a organisée en 2004 afin de relancer les programmes de planification familiale (PF).
Notre pays dispose également d’une Feuille de route pour accélérer la réduction de la morbidité et de la mortalité maternelles et néonatales. Le Sénégal a aussi l’ambition d’atteindre, en 2015, les Objectifs du millénaire pour le développement (Omd). Deux des huit Omd interpellent les acteurs de la Santé de la reproduction. Il s’agit de la réduction de trois quarts de la mortalité maternelle et de la réduction de 2/3 de la mortalité infantile.
Le ratio de mortalité maternelle est passé de 510 pour 100.000 naissances vivantes en 1992 à 401 décès pour 100.000 naissances vivantes en 2005. Autrement dit, pour 100.000 femmes qui accouchent, 401 décèdent à la suite de leur grossesse, de leur accouchement ou dans les 40 jours qui suivent l’accouchement. (3)
La PF peut réduire de 20 % la mortalité maternelle
Chez les nouveau-nés (c’est-à-dire les enfants qui sont âgés de moins de vingt-huit (28) jours), parmi 1.000 enfants qui naissent, 35 décèdent à la naissance ou dans les 28 jours qui suivent leur naissance. Des études ont montré que cette mortalité néonatale occupe les 50 % de la mortalité infantile.
En ce qui concerne la planification familiale (PF), on constate que la connaissance de la contraception par les femmes sénégalaises actuellement mariées est très élevée. Les résultats de la dernière Enquête démographique de santé 2005 (Eds IV) montrent, en effet, que plus de 90 % des femmes en union connaissent les méthodes de contraception. Quelque 10,3 % des femmes en union ont cependant recours aux méthodes de contraception contre 7 % au Mali (Rapport de synthèse Eds Mali, 2006). Les Iles du Cap-Vert (46 %) - suivies du Ghana (19 %) - est le pays qui a la prévalence la plus élevée en Afrique de l’Ouest. (4). Il est pourtant prouvé que la PF est parmi les stratégies les plus efficaces de réduction de la mortalité maternelle. La PF peut réduire de 20 % cette mortalité.
En outre, des statistiques ont révélé qu’au Sénégal, si aucune grossesse ne survenait avant 36 mois (03 ans) de la précédente, le taux de mortalité des enfants de moins d’un an serait réduit de 21 %, celui des enfants de moins de cinq ans de 13 % et les décès des enfants de moins de cinq ans serait réduits de 10.000 enfants chaque année.
Au Sénégal, sur 100 femmes en union, les 32 déclarent vouloir espacer la naissance de leurs enfants. Malheureusement, elles n’ont pas recours à la planification familiale. La dernière Enquête démographique et de santé (Eds IV/2005) révèle que parmi les femmes sénégalaises actuellement en union, 21 % ont déclaré ne plus vouloir d’enfant, 39 % veulent attendre plus tard (deux ans ou plus) avant d’en avoir un (autre), c’est-à-dire qu’elles expriment le désir d’un certain espacement des naissances (...). Si on permettait à ces femmes de satisfaire leurs besoins en PF, la prévalence de la contraception moderne connaîtrait un formidable bond et moins de femmes et d’enfants perdraient leur vie.
Sources :
1. Mis sur pied en 1995, le « Réseau Siggil Jigéen » (RSJ) compte aujourd’hui 17 organisations membres dont les activités intéressent directement plus de 12.000 femmes sénégalaises. Parmi ses domaines d’action, on note la Santé de la reproduction, les droits des femmes, le leadership des jeunes, l’alphabétisation et la formation, la micro-finance, la lutte contre la pauvreté.
2. Lire à ce sujet les recommandations du Rapport final de l’étude intitulée « Représentations, communication et prise de décision concernant l’utilisation des méthodes contraceptives au Sénégal ». Septembre 2006.
3. La Santé de la reproduction en bref au Sénégal. Agence nationale de la statistique et de la démographie. 11 juillet 2007.
4. Fiche de données sur la population mondiale - Population Reference Bureau - 2006
Achat des produits contraceptifs : Les partenaires extérieurs ont encore le monopole
Les partenaires au développement déboursent beaucoup d’argent pour acheter des produits contraceptifs. La contribution de l’’Etat est encore faible. Relancer la PF, c’est aussi augmenter les financements publics alloués à cet important volet des programmes de planification familiale.
« Le droit de planifier sa famille fait partie des droits et des libertés fondamentales qui s’appliquent à toute personne, en tout lieu », dit un document du Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa). Cette institution onusienne fait, cette année, un focus sur la planification familiale à l’occasion de Journée mondiale de la population célébrée le 11 juillet. Le thème retenu est « La planification familiale : c’est un droit, faisons-en une réalité. »
Mercredi 09 juillet, le ministère de la Santé et de la Prévention a procédé au lancement de la campagne nationale de trois mois en vue de « proposer une image renouvelée, positive et actualisée de la planification familiale », selon les mots du Dr Fatou Nar Mbaye, chef de la division de la Santé de la reproduction au ministère de la Santé. Ces efforts visant à repositionner la planification sont louables, mais ils devraient être accompagnés de la mise en place de financements plus conséquents tirés du budget national.
En effet, les besoins en produits contraceptifs, estimés approximativement à 400 millions de francs Cfa sont quasi-totalement financés par l’Usaid, le Fonds des Nations unies pour la population (Unfpa) et à un degré moindre par la Jica (la coopération japonaise). Ces lignes sont tirées du document de cadrage technique de la Journée mondiale de la population 2008 élaboré par le ministère du Plan et du Développement durable. Le même document note que l’Etat du Sénégal, depuis ces dernières années, a ouvert une ligne budgétaire d’un montant de 45 millions de francs Cfa pour l’achat de produits contraceptifs. « Cette ligne pourrait souligne le document, pourrait connaitre une hausse les années à venir en raison de l’intérêt réel que cette dernière suscite au ministère de la Santé ». Toutefois, tempère le document déjà cité, « la viabilité à long terme des programmes de planification familiale dépend de l’affectation de fonds publics consistants et conséquents. »
Ces manifestations organisées par l’Unfpa et le ministère de la Santé sont des occasions pour parler de la PF dans un pays où comme le dit le Dr Nafissatou J. Diop de Population Council « les décideurs locaux ne sont que très peu des champions de la PF et ont peu fait pour promouvoir la P.F. ». (1).
Le Dr Diop classe parmi les défis du changement « la promotion des méthodes de longue durée comme la stérilisation, les implants et le Diu en travaillant fortement au niveau des prestataires de Santé ». Elle note en effet que « plusieurs études ont montré des taux élevés de discontinuité au Sénégal. Or les méthodes de courte durée, la pilule et les injectables, sont les méthodes les plus promues et utilisées au Sénégal. Pour atteindre un niveau de prévalence plus élevé l’effort du ministère va porter sur les méthodes de longue durée tel le Diu ».
Le Dr Diop recommande, entre autre, la mise en œuvre de « stratégies de communication (...) plus proches des populations, avec un langage plus adapté aux réalités culturelles et en ciblant les groupes sociaux et les couples. Aussi le bienfait de la PF pour le groupe et la communauté doit être mis en avant. Sa contribution pour la réduction de la mortalité maternelle sera aussi promue. »
Le Soleil