« Favoriser chez les médias une meilleure compréhension des enjeux liés à la conservation et à la restauration des zones humides afin de renforcer leur capacité à couvrir les questions clé de manière plus experte et avec plus de réactivité ». C’est l’objectif général qui était fixé au voyage de formation des journalistes sur la gestion des zones humides, organisé du lundi 27 au jeudi 30 octobre 2008 à la station biologique de Djoudj (région de Saint-Louis) par Wetlands International Afrique et ses partenaires parmi lesquels le service des parcs nationaux.
Cette initiative devait permettre aux journalistes « d’harmoniser leurs connaissances des zones humides par rapport au développement et situer leur part dans la lutte contre la pauvreté, mais aussi de trouver l’ensemble des mécanismes qui permettront de mieux divulguer l’information », a expliqué le Colonel Abdoulaye Ndiaye, chargé du renforcement des capacités en Afrique de l’Ouest pour Wetlands International. Il s’exprimait ainsi à l’occasion de l’ouverture de l’atelier à la station biologique du parc national aux oiseaux du Djoudj, mardi 28 octobre passé.
Pour sa part, Ibrahima Thiam, Directeur de Wetlands International Afrique, s’adressant aux journalistes au Lodge Taweh, au Canal des Crocodiles à Djoudj, a reconnu l’importance de cette formation pour les journalistes qui sont, selon lui, des relais importants pour la sensibilisation des populations à la nécessité de préserver l’écosystème qui constitue 06 % de la planète et 40 % de la biodiversité.
Les zones humides définies comme des « étendues de marais, de fragmes, de tourbières ou d’eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où l’eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d’eau marine dont la profondeur à marée basse n’excède pas six mètres » constituent des cadres importants de préservation de la biodiversité et de l’équilibre écosystémique terrestre. Elles représentent des habitats de premier choix pour les oiseaux d’eau réputés être de grands migrateurs. En procédant au suivi des oiseaux par le système de comptage et du baguage, les ornithologues parviennent ainsi à identifier les zones humides d’importance internationale. La technique du suivi et du comptage permet aux ornithologues d’identifier les routes migratoires des oiseaux d’eaux, de déterminer leurs habitats et leurs distributions.
Mais les visites de terrain effectuées à la réserve spéciale de faune de Gueumbeul et au parc national des oiseaux du Djoudj, dans la région de Saint-Louis, ont permis de mieux comprendre la spécificité des zones humides et les menaces écologiques qui pèsent sur elles. Au moment où Gueumbeul se bat contre un phénomène de tarissement précoce de son point d’eau, Djoudj fait face à une menace de salinisation de ses terres qui saborde l’état de son décor naturel initial.
Gueumbeul a soif d’eau
Le site de la réserve spéciale de faune de Gueumbeul est un joyau de la nature aujourd’hui menacé par un phénomène de tarissement précoce de son point d’eau à la mi-janvier de chaque année. Les eaux sont bloquées au plus bas durant cette période de l’année par l’ouvrage du pont « Bountou Bat » récemment réalisé par l’Agence autonome des travaux routiers. Le site de la réserve spéciale de faune de Gueumbeul, « important centre pour le suivi de la végétation sahélienne, est aujourd’hui menacé », a expliqué le Lieutenant Babacar Youm de la Direction des Parcs Nationaux, Conservateur de la réserve.
« C’est une zone humide menacée. La cuvette s’assèche vers le mois de janvier par évaporation ou par infiltration de l’eau. Elle n’est remplie que durant la période comprise entre juillet et janvier », a-t-il déploré. Il considère que le pont « Bountou Bat » réalisé par l’Aatr est largement responsable de cette menace écologique. « Le passage de l’eau n’a pas vraisemblablement été pris en compte, ce qui fait que la cuvette connaît un tarissement précoce », a-t-il souligné. Poursuivant sur la même lancée, le Lieutenant Babacar Youm a noté que « cette situation va favoriser l’installation desTann et la salinisation du sol qui risque de détruire la végétation ».
Gueumbeul est bel et naturel. Situé à 10 km au sud de Saint-Louis dans la communauté rurale du Gandon, le site de Gueumbeul est créé le 30 mai 1983, dans le cadre de la restauration de la zone sahélo-sahélienne. À l’entrée de la réserve, la disposition stratégique des bâtiments démontre un raffinage écologique. Clôturé sur une surface de 12 km2 avec une superficie de 720 hectares, Gueumbeul abrite 196 animaux dont des gazelles (Dama, Oryx, Adex, Orcas), des tortues et des oiseaux. De nombreuses pistes éparpillées dans le site mènent aux différents endroits d’observation. Derrière des barbelés, sont confinées des gazelles Orcas (7) venues d’Espagne et des gazelles Adex (6) originaires du Canada. Un peu plus loin, sous un arbre, de petites tortues sont entretenues loin de leurs parents associés dans une autre palissade. En suivant les guides des parcs nationaux, on débouche vers la cuvette de Gueumbeul où de nombreux oiseaux ont pris refuge parmi lesquels des migrateurs venus d’autres horizons.
Entretenu par le concours d’une coopération de nombreux partenaires au développement, Gueumbeul, situé sur le Delta du fleuve Sénégal avec son climat sahélien, jouit d’une bonne pluviosité qui oscille entre 200 et 300 mm par an généralement de juillet à septembre. Ses douces températures du fait de l’influence océanique pendant toute l’année en ont fait une zone d’accueil de différents types d’oiseaux venant de partout dans le monde. Cette position stratégique et écologique de grande importance, en somme son plan d’eau, lui a valu le statut de site Ramsar (Iran) le 28 juin 2005. De fait, il est reconnu comme une réserve de la biosphère par cette convention de Ramsar (1971) à laquelle le Sénégal a adhéré en 1977. Pour sa préservation, il est nécessaire de revoir cet ouvrage du pont « Bountou Bat » pour restaurer le passage de l’eau. C’est pourquoi, il est nécessaire, selon les spécialistes, d’effectuer avant la mise en œuvre de tout projet, une étude d’impact environnemental (Eie). Ce qui amoindrit le coût des dépenses inutiles.
Djoudj, une merveille menacée ?
Le parc national aux oiseaux du Djoudj est sans nul doute l’une des merveilles de la nature. Bien arrosé par le fleuve Sénégal et reconnu par les ornithologues comme le site d’hivernage d’une espèce d’oiseaux rares dont l’effectif est seulement de 15000 couples dans le monde entier, Djoudj est un important centre de suivi des mouvements migratoires des oiseaux. Créé en 1971, Djoudj couvre une superficie de 16000 hectares et connaît environ 14000 visites par an. En évaluant l’avancée de la salinisation qui gagne les terres environnantes, l’on est en droit de tirer la sonnette d’alarme pour préserver cette merveille terrestre menacée.
En quittant le poste de commandement de la direction des eaux et forêts logé dans l’enceinte de la station biologique, le car emprunte une piste-digue de sept kilomètres pour joindre l’embarcadère du marigot du Djoudj. Sur le chemin, ce sont de grandes surfaces couvertes par les typhas qui s’étalent à perte de vue.
Les phacochères sensibles aux bruits émis par le moteur du véhicule se débusquent et entament avec leurs petits une course à travers les clairières qui bordent le bord de la route. Des oiseaux piaillent et battent des ailes, volant dans tous les sens. Un peu après l’ouvrage du marigot Khar, une piste non goudronnée descend vers l’Est, un tableau indique qu’elle mène à Gainth, communément considéré comme le domaine des pythons et des phacochères. Selon le Lieutenant Lamine Kane, Conservateur du Djoudj, le parc reçoit près de 450 000 canards au grand lac à la période de janvier.
Près du marigot du Djoudj où se trouve l’embarcadère menant à l’île des oiseaux, trois abris protègent les visiteurs des ardeurs du soleil. L’inscription sur un tableau indique « Plan d’eau du Djoudj, Un joyau, une diversité ». Près du pont qui sert de vanne de régulation de l’eau, les pélicans blancs et les cormorans nagent en équipe. « Les pélicans et les cormorans sont des collaborateurs. Les cormorans sont des pêcheurs de profondeur et les pélicans sont des pêcheurs de surface. En allant pêcher en profondeur, les cormorans facilitent la montée des poissons en surface qui profite aux pélicans », explique le Conservateur du Djoudj. À côté de l’embarcadère, une grande flaque de nénuphars s’étend à perte de vue.
Sous les abris constitués de nattes en typhas, les visiteurs observent le panorama écologique qui se déroule sous leurs yeux. Le lieutenant Lamine Kane, émerveillé par le charme qui gagne les visiteurs, révèle qu’environ 15000 pélicans blancs visitent Djoudj par an. Il a aussi souligné que 365 espèces d’oiseaux sont recensés dans le Djoudj. Cap au nichoir sur une autre distance de 7 kilomètres à travers un long canal pas très profond. En arrivant sur les lieux, ce sont plusieurs centaines de pélicans qui se sèchent au soleil sur une superficie d’à peu près 8000 m2. Comme une sentinelle et comme pour justifier les propos du Lieutenant Kane, un cormoran se dresse parmi les pélicans. Un contour effectué du côté de la fosse aux crocodiles permettra de surprendre un crocodile qui s’est automatiquement replié sous l’effet du bruit du moteur de la barque.
L’économie de Djoudj
Dans une autre mesure, les zones ont une valeur économique inaliénable dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Sur le plan touristique, un comité inter-villageois (regroupant sept villages) est intégré dans la gestion des ressources du Djoudj. Il gère un campement touristique et est doté de pirogues pour mener les touristes aux différents sites du parc. Le touriste en visite à Djoudj paie 3000 FCFA la journée. « Ce qui constitue une valeur économique non négligeable pour les populations locales », a noté Lamine Kane, Conservateur du parc du Djoudj. Le parc du Djoudj regorge aussi d’énormes potentialités agricoles. Une visite à l’Usine de l’Union Débi-Tiguet en est une parfaite illustration.
Le long de la digue qui longe le fleuve Sénégal, de grandes étendues vertes laissent entrevoir des milliers d’hectares de riz. Implantée par le concours de l’Union paysanne des deux villages précités en collaboration avec la coopération japonaise, l’usine produit près de 5000 tonnes de riz entier et 2,5 tonnes de riz brisé par jour, à raison de 15 000 FCFA le sac pour les deux qualités. À Débi et à Tiguet, le kilo du riz est vendu à 300 FCFA. Selon Abdou Karim Guèye, Vice-Président de l’Union paysanne et par ailleurs Chef du village de Tiguet, l’union exploite près de 1700 hectares à raison de 997 hectares pour le grand casier et 700 hectares répartis aux groupements d’intérêt économique.
Abdou Karim Guèye a toutefois révélé que c’est l’union qui s’est payée l’équipement de l’usine de décortiqueuse financée à ses débuts par le Japon qui a installé les digues d’irrigation. Par ailleurs, parlant du problème de la commercialisation, il a révélé que leurs clients potentiels viennent de Saint-Louis. Abdou Karim Guèye a noté les difficultés qu’encourt l’usine qui fonctionne avec des groupes électrogènes. Ce qui constitue de son point de vue une charge financière non négligeable. Il a soulevé par la même occasion le problème lié à la promotion de la qualité du riz. Pour sa part, le Lieutenant Lamine Kane soulignant les nombreux efforts faits du point de vue de l’aménagement n’a pas manqué de relever certains problèmes liés à l’accès à l’eau pour les zones qui sont un peu éloignées.
Le conservateur du Djoudj a aussi fait état des problèmes liés au financement des riziculteurs qui éprouvent d’énormes difficultés d’accès aux crédits des banques. Du moment que l’État n’octroie pas des subventions aux riziculteurs, ceux-ci ont souvent des problèmes de recouvrement avec la Caisse nationale du crédit agricole. Le Lieutenant Lamine Kane a aussi soulevé le problème d’enclavement de la zone avec ses pistes de production en mauvais état. Bref, il y a un chapelet de problèmes qui mine l’exploitation du riz à Djoudj, à l’exemple des oiseaux granivores, des phacochères et des pesticides qui peuvent constituer une menace pour le devenir écologique de la faune.
Telle est la vie à Djoudj, patrimoine naturel mondial et site Ramsar postulant cette année 2008 à être reconnu comme une des sept merveilles du monde. Mais il faut noter que la responsabilité revient aux décideurs politiques et aux populations locales de s’approprier la gestion et la préservation de ces zones humides qui constituent outre une importante réserve de la biosphère, mais aussi un milieu d’activités économiques et de développement.
Sud Quotidien
Cette initiative devait permettre aux journalistes « d’harmoniser leurs connaissances des zones humides par rapport au développement et situer leur part dans la lutte contre la pauvreté, mais aussi de trouver l’ensemble des mécanismes qui permettront de mieux divulguer l’information », a expliqué le Colonel Abdoulaye Ndiaye, chargé du renforcement des capacités en Afrique de l’Ouest pour Wetlands International. Il s’exprimait ainsi à l’occasion de l’ouverture de l’atelier à la station biologique du parc national aux oiseaux du Djoudj, mardi 28 octobre passé.
Pour sa part, Ibrahima Thiam, Directeur de Wetlands International Afrique, s’adressant aux journalistes au Lodge Taweh, au Canal des Crocodiles à Djoudj, a reconnu l’importance de cette formation pour les journalistes qui sont, selon lui, des relais importants pour la sensibilisation des populations à la nécessité de préserver l’écosystème qui constitue 06 % de la planète et 40 % de la biodiversité.
Les zones humides définies comme des « étendues de marais, de fragmes, de tourbières ou d’eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où l’eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d’eau marine dont la profondeur à marée basse n’excède pas six mètres » constituent des cadres importants de préservation de la biodiversité et de l’équilibre écosystémique terrestre. Elles représentent des habitats de premier choix pour les oiseaux d’eau réputés être de grands migrateurs. En procédant au suivi des oiseaux par le système de comptage et du baguage, les ornithologues parviennent ainsi à identifier les zones humides d’importance internationale. La technique du suivi et du comptage permet aux ornithologues d’identifier les routes migratoires des oiseaux d’eaux, de déterminer leurs habitats et leurs distributions.
Mais les visites de terrain effectuées à la réserve spéciale de faune de Gueumbeul et au parc national des oiseaux du Djoudj, dans la région de Saint-Louis, ont permis de mieux comprendre la spécificité des zones humides et les menaces écologiques qui pèsent sur elles. Au moment où Gueumbeul se bat contre un phénomène de tarissement précoce de son point d’eau, Djoudj fait face à une menace de salinisation de ses terres qui saborde l’état de son décor naturel initial.
Gueumbeul a soif d’eau
Le site de la réserve spéciale de faune de Gueumbeul est un joyau de la nature aujourd’hui menacé par un phénomène de tarissement précoce de son point d’eau à la mi-janvier de chaque année. Les eaux sont bloquées au plus bas durant cette période de l’année par l’ouvrage du pont « Bountou Bat » récemment réalisé par l’Agence autonome des travaux routiers. Le site de la réserve spéciale de faune de Gueumbeul, « important centre pour le suivi de la végétation sahélienne, est aujourd’hui menacé », a expliqué le Lieutenant Babacar Youm de la Direction des Parcs Nationaux, Conservateur de la réserve.
« C’est une zone humide menacée. La cuvette s’assèche vers le mois de janvier par évaporation ou par infiltration de l’eau. Elle n’est remplie que durant la période comprise entre juillet et janvier », a-t-il déploré. Il considère que le pont « Bountou Bat » réalisé par l’Aatr est largement responsable de cette menace écologique. « Le passage de l’eau n’a pas vraisemblablement été pris en compte, ce qui fait que la cuvette connaît un tarissement précoce », a-t-il souligné. Poursuivant sur la même lancée, le Lieutenant Babacar Youm a noté que « cette situation va favoriser l’installation desTann et la salinisation du sol qui risque de détruire la végétation ».
Gueumbeul est bel et naturel. Situé à 10 km au sud de Saint-Louis dans la communauté rurale du Gandon, le site de Gueumbeul est créé le 30 mai 1983, dans le cadre de la restauration de la zone sahélo-sahélienne. À l’entrée de la réserve, la disposition stratégique des bâtiments démontre un raffinage écologique. Clôturé sur une surface de 12 km2 avec une superficie de 720 hectares, Gueumbeul abrite 196 animaux dont des gazelles (Dama, Oryx, Adex, Orcas), des tortues et des oiseaux. De nombreuses pistes éparpillées dans le site mènent aux différents endroits d’observation. Derrière des barbelés, sont confinées des gazelles Orcas (7) venues d’Espagne et des gazelles Adex (6) originaires du Canada. Un peu plus loin, sous un arbre, de petites tortues sont entretenues loin de leurs parents associés dans une autre palissade. En suivant les guides des parcs nationaux, on débouche vers la cuvette de Gueumbeul où de nombreux oiseaux ont pris refuge parmi lesquels des migrateurs venus d’autres horizons.
Entretenu par le concours d’une coopération de nombreux partenaires au développement, Gueumbeul, situé sur le Delta du fleuve Sénégal avec son climat sahélien, jouit d’une bonne pluviosité qui oscille entre 200 et 300 mm par an généralement de juillet à septembre. Ses douces températures du fait de l’influence océanique pendant toute l’année en ont fait une zone d’accueil de différents types d’oiseaux venant de partout dans le monde. Cette position stratégique et écologique de grande importance, en somme son plan d’eau, lui a valu le statut de site Ramsar (Iran) le 28 juin 2005. De fait, il est reconnu comme une réserve de la biosphère par cette convention de Ramsar (1971) à laquelle le Sénégal a adhéré en 1977. Pour sa préservation, il est nécessaire de revoir cet ouvrage du pont « Bountou Bat » pour restaurer le passage de l’eau. C’est pourquoi, il est nécessaire, selon les spécialistes, d’effectuer avant la mise en œuvre de tout projet, une étude d’impact environnemental (Eie). Ce qui amoindrit le coût des dépenses inutiles.
Djoudj, une merveille menacée ?
Le parc national aux oiseaux du Djoudj est sans nul doute l’une des merveilles de la nature. Bien arrosé par le fleuve Sénégal et reconnu par les ornithologues comme le site d’hivernage d’une espèce d’oiseaux rares dont l’effectif est seulement de 15000 couples dans le monde entier, Djoudj est un important centre de suivi des mouvements migratoires des oiseaux. Créé en 1971, Djoudj couvre une superficie de 16000 hectares et connaît environ 14000 visites par an. En évaluant l’avancée de la salinisation qui gagne les terres environnantes, l’on est en droit de tirer la sonnette d’alarme pour préserver cette merveille terrestre menacée.
En quittant le poste de commandement de la direction des eaux et forêts logé dans l’enceinte de la station biologique, le car emprunte une piste-digue de sept kilomètres pour joindre l’embarcadère du marigot du Djoudj. Sur le chemin, ce sont de grandes surfaces couvertes par les typhas qui s’étalent à perte de vue.
Les phacochères sensibles aux bruits émis par le moteur du véhicule se débusquent et entament avec leurs petits une course à travers les clairières qui bordent le bord de la route. Des oiseaux piaillent et battent des ailes, volant dans tous les sens. Un peu après l’ouvrage du marigot Khar, une piste non goudronnée descend vers l’Est, un tableau indique qu’elle mène à Gainth, communément considéré comme le domaine des pythons et des phacochères. Selon le Lieutenant Lamine Kane, Conservateur du Djoudj, le parc reçoit près de 450 000 canards au grand lac à la période de janvier.
Près du marigot du Djoudj où se trouve l’embarcadère menant à l’île des oiseaux, trois abris protègent les visiteurs des ardeurs du soleil. L’inscription sur un tableau indique « Plan d’eau du Djoudj, Un joyau, une diversité ». Près du pont qui sert de vanne de régulation de l’eau, les pélicans blancs et les cormorans nagent en équipe. « Les pélicans et les cormorans sont des collaborateurs. Les cormorans sont des pêcheurs de profondeur et les pélicans sont des pêcheurs de surface. En allant pêcher en profondeur, les cormorans facilitent la montée des poissons en surface qui profite aux pélicans », explique le Conservateur du Djoudj. À côté de l’embarcadère, une grande flaque de nénuphars s’étend à perte de vue.
Sous les abris constitués de nattes en typhas, les visiteurs observent le panorama écologique qui se déroule sous leurs yeux. Le lieutenant Lamine Kane, émerveillé par le charme qui gagne les visiteurs, révèle qu’environ 15000 pélicans blancs visitent Djoudj par an. Il a aussi souligné que 365 espèces d’oiseaux sont recensés dans le Djoudj. Cap au nichoir sur une autre distance de 7 kilomètres à travers un long canal pas très profond. En arrivant sur les lieux, ce sont plusieurs centaines de pélicans qui se sèchent au soleil sur une superficie d’à peu près 8000 m2. Comme une sentinelle et comme pour justifier les propos du Lieutenant Kane, un cormoran se dresse parmi les pélicans. Un contour effectué du côté de la fosse aux crocodiles permettra de surprendre un crocodile qui s’est automatiquement replié sous l’effet du bruit du moteur de la barque.
L’économie de Djoudj
Dans une autre mesure, les zones ont une valeur économique inaliénable dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Sur le plan touristique, un comité inter-villageois (regroupant sept villages) est intégré dans la gestion des ressources du Djoudj. Il gère un campement touristique et est doté de pirogues pour mener les touristes aux différents sites du parc. Le touriste en visite à Djoudj paie 3000 FCFA la journée. « Ce qui constitue une valeur économique non négligeable pour les populations locales », a noté Lamine Kane, Conservateur du parc du Djoudj. Le parc du Djoudj regorge aussi d’énormes potentialités agricoles. Une visite à l’Usine de l’Union Débi-Tiguet en est une parfaite illustration.
Le long de la digue qui longe le fleuve Sénégal, de grandes étendues vertes laissent entrevoir des milliers d’hectares de riz. Implantée par le concours de l’Union paysanne des deux villages précités en collaboration avec la coopération japonaise, l’usine produit près de 5000 tonnes de riz entier et 2,5 tonnes de riz brisé par jour, à raison de 15 000 FCFA le sac pour les deux qualités. À Débi et à Tiguet, le kilo du riz est vendu à 300 FCFA. Selon Abdou Karim Guèye, Vice-Président de l’Union paysanne et par ailleurs Chef du village de Tiguet, l’union exploite près de 1700 hectares à raison de 997 hectares pour le grand casier et 700 hectares répartis aux groupements d’intérêt économique.
Abdou Karim Guèye a toutefois révélé que c’est l’union qui s’est payée l’équipement de l’usine de décortiqueuse financée à ses débuts par le Japon qui a installé les digues d’irrigation. Par ailleurs, parlant du problème de la commercialisation, il a révélé que leurs clients potentiels viennent de Saint-Louis. Abdou Karim Guèye a noté les difficultés qu’encourt l’usine qui fonctionne avec des groupes électrogènes. Ce qui constitue de son point de vue une charge financière non négligeable. Il a soulevé par la même occasion le problème lié à la promotion de la qualité du riz. Pour sa part, le Lieutenant Lamine Kane soulignant les nombreux efforts faits du point de vue de l’aménagement n’a pas manqué de relever certains problèmes liés à l’accès à l’eau pour les zones qui sont un peu éloignées.
Le conservateur du Djoudj a aussi fait état des problèmes liés au financement des riziculteurs qui éprouvent d’énormes difficultés d’accès aux crédits des banques. Du moment que l’État n’octroie pas des subventions aux riziculteurs, ceux-ci ont souvent des problèmes de recouvrement avec la Caisse nationale du crédit agricole. Le Lieutenant Lamine Kane a aussi soulevé le problème d’enclavement de la zone avec ses pistes de production en mauvais état. Bref, il y a un chapelet de problèmes qui mine l’exploitation du riz à Djoudj, à l’exemple des oiseaux granivores, des phacochères et des pesticides qui peuvent constituer une menace pour le devenir écologique de la faune.
Telle est la vie à Djoudj, patrimoine naturel mondial et site Ramsar postulant cette année 2008 à être reconnu comme une des sept merveilles du monde. Mais il faut noter que la responsabilité revient aux décideurs politiques et aux populations locales de s’approprier la gestion et la préservation de ces zones humides qui constituent outre une importante réserve de la biosphère, mais aussi un milieu d’activités économiques et de développement.
Sud Quotidien