Selon un récent rapport de la Banque mondiale, les coupes illégales représentent jusqu’à 9 % de l’ensemble des activités d’exploitation forestière dans certains pays et produisent entre 10 et 15 milliards de dollars de revenus illicites par an. Cela ne tient pas compte de l’énorme coût environnemental, économique et social : menaces sur la diversité biologique, accroissement des émissions de carbone, répercussions négatives sur les moyens de subsistance des populations rurales et enrichissement des criminels aux dépens des pauvres. D’après les estimations de la Banque mondiale, toutes les deux secondes, une surface forestière comparable à la superficie d’un terrain de football est coupée à blanc dans le monde par des exploitants opérant de manière illégale. Pourtant, à en croire les auteurs du rapport, les pays peuvent lutter contre l’exploitation illégale des forêts avec l’aide des systèmes de justice pénale, réprimer les activités criminelles organisées, dépister et confisquer les gains illicites tirés de l’abattage des arbres. Comment ? Les services de répression de la criminalité doivent « enquêter au-delà des petits criminels et s’efforcer d’identifier les destinataires des profits tirés de l’abattage illégal ». Le rapport préconise aussi de suivre la piste de l’argent. « En utilisant les outils mis au point dans quelque 170 pays pour chercher l’« argent sale », les appareils de justice pénale peuvent pourchasser les organisations criminelles qui se livrent à des opérations d’abattage illicite à grande échelle ».
Selon la Banque mondiale, ces capitaux, contrôlés principalement par la criminalité organisée, échappent à l’impôt et servent à verser des pots-de-vin aux fonctionnaires corrompus à tous les échelons de l’administration. Le rapport contient des conseils sur l’action à mener ainsi que des recommandations opérationnelles à l’intention des responsables de l’action publique et des responsables de la gestion des forêts et de l’application de la loi.
Nécessité de coopération entre Etats
Il invite aussi à une coopération accrue entre les Etats afin de mieux exploiter les renseignements financiers disponibles. « Nous devons lutter contre la criminalité organisée dans le domaine de l’exploitation illégale des forêts de la même façon que nous combattons les malfaiteurs qui vendent de la drogue ou se livrent à des extorsions de fonds », déclare Jean Pesme, chef de l’Unité de promotion de l’intégrité des marchés financiers à la Banque mondiale, dont la mission consiste à aider les pays à mettre en place des cadres juridiques et opérationnels efficaces de lutte contre les flux financiers illégaux. Mais selon le rapport, la plupart des délits forestiers passent inaperçus parce que n’étant pas signalés ou sont tout simplement ignorés. Il recommande de concentrer la répression sur les « cerveaux » qui se cachent derrière ce trafic illicite à caractère international ainsi que sur les fonctionnaires corrompus qui les protègent.
Seydou KA
Le Soleil