Programme de Gestion Durable et Participative des Energies Traditionnelles et de Substitution

Le PROGEDE, Programme de Gestion Durable et Participative des Energies Traditionnelles et de Substitution est né de la volonté du Gouvernement sénégalais de trouver une réponse adaptée au processus de dégradation des ressources naturelles observé dans notre pays depuis bientôt trois décennies.

Cette dégradation des ressources naturelles résulte de la conjonction d’un environnement climatique défavorable, et de facteurs anthropiques de dégradation des ressources naturelles, facteurs parmi lesquels la compétition agricole, de mauvaises pratiques d’élevage et une exploitation forestière aux effets pervers sont les plus remarquables.

Dans ce contexte la mission du PROGEDE consiste à relever le défi de mettre en œuvre un système d'exploitation forestière durable, tenant compte des ressources disponibles et de leur productivité. Il s'agit ainsi d'opérer une transition entre le système actuel, basé sur une exploitation minière des ressources forestières par des acteurs étrangers au terroir, et un nouveau schéma responsabilisant les populations rurales concernées et capable d'approvisionner de manière durable les consommateurs urbains, dans le respect d’une gestion conservatrice et rationnelle des ressources naturelles.

L’innovation majeure en ce qui concerne la mise en place de ce programme est la maturité et la pragmatisme qui ont présidé à sa planification ; en effet, les techniciens nationaux des deux ministères, celui de l’Environnement et de la Protection de la Nature et celui de l’Energie des Mines et de l’Industrie ont réussi à transcender toute velléité de clivage institutionnel pour, dans une synergie parfaite, mettre ensemble leur compétence, avec pour seul objectif, de trouver des solutions appropriées à la problématique de l’énergie domestique au Sénégal, grâce à une gestion concomitante de l’offre et de la demande de combustibles ligneux..



CONTEXTE DE NAISSANCE ET MISSION DU PROGEDE

Programme de Gestion Durable et Participative des Energies Traditionnelles et de Substitution
Ainsi, de 1993 à 1996, une équipe interministérielle pluridisciplinaire a procédé à une analyse exhaustive du secteur des énergies traditionnelles, dans le cadre du programme "Revue des politiques, stratégies et programmes dans le secteur des énergies traditionnelles" (RPTES) mené dans cinq pays sub-sahariens (Burkina faso, Mali, Gambie, Niger et Sénégal), avec le soutien de la Banque Mondiale.

La réflexion menée au niveau de ce programme a montré que nos formations forestières, outre leur rôle de protection et de maintien de la fertilité des sols, fournissent la quasi totalité de l'énergie consommée en milieu rural ainsi qu'une part importante du fourrage constituant la base indispensable de l'économie pastorale dans tout le pays.

Par ailleurs, les combustibles ligneux (bois et charbon de bois), représentent près de 60% de la consommation d'énergie du Sénégal (estimée à 1,5 million de tep), loin devant les produits pétroliers (37%), l'électricité (5%) et les résidus agricoles (1%). Le secteur domestique, principal acteur de cette consommation, dépend pour 90% de ses besoins, des combustibles domestiques .

Ainsi, la pression exercée sur les formations forestières pour l’approvisionnement en combustibles des ménages, combinée avec la péjoration climatique et la compétition des terrains agricoles, aboutissent à un recul drastique des formations forestières du Sénégal, recul estimé à près de 80.000 ha par an ; et compte tenu des conditions macro-économiques et sociologiques, cette situation de dépendance vis à vis des combustibles domestiques durera pendant longtemps encore.

Or, dans nos pays sahéliens, la protection de l’environnement est aujourd’hui reconnue comme une condition sine qua non pour un développement durable, eu égard à l’importance stratégique des ressources naturelles dans les processus de développement. Nous venons d’en donner une illustration en ce qui concerne la place des combustibles domestiques dans le secteur énergétique national.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement du Sénégal a senti la nécessité de mettre en place un programme ambitieux, capable de résoudre le diptyque approvisionnement des ménages sénégalais en combustibles domestiques dans le respect d’un aménagement durable des formations forestières naturelles.

Ainsi, le PROGEDE s’inscrit dans le sillage des objectifs assignés à la politique du secteur des énergies domestiques, objectifs définis lors du Conseil interministériel d’août 1993, à savoir :

- fournir aux pouvoirs publics les capacités nécessaires en matière d'orientation, de coordination et d'intervention en ce qui concerne l'organisation et le contrôle du prélèvement et de la distribution, la réglementation et la politique des prix ;

- limiter la demande en combustibles ligneux à travers des mesures d'économie de la consommation de bois-énergie et de substitution d’énergie, tout en valorisant les sources d'énergie nationales pour limiter les importations de combustibles ;

- assurer une gestion plus précise, rationnelle, et contrôlée des ressources ligneuses grâce à la rationalisation de l'exploitation forestière et à une participation effective des populations riveraines des forêts à la gestion et au contrôle de l'exploitation des ressources ligneuses de leur terroir.

Sous cet éclairage, le PROGEDE a défini son objectif qui est de contribuer à l'approvisionnement des ménages en combustibles domestiques, de manière régulière et durable, en préservant l’environnement en offrant des possibilités élargies de choix et de confort aux consommateurs par :

- l’aménagement participatif et durable des forêts naturelles pour la production de bois-énergie ;
- la promotion de techniques économes de production et de consommation de charbon ;
- la réduction des émissions des gaz à effet de serre et la conservation de la biodiversité ;
- la génération d’emplois ruraux et l’augmentation du pouvoir d’achat des ruraux ;




STRATEGIE DE MISE EN ŒUVRE

Programme de Gestion Durable et Participative des Energies Traditionnelles et de Substitution
La stratégie du PROGEDE s’appuie sur les axes principaux suivants :

- l'aménagement intégré et l'exploitation durable de 300.000 ha de formations forestières naturelles, en prenant en charge, de bout en bout du processus la participation des populations riveraines des formations forestières;

- l'appui aux initiatives du secteur privé pour le développement de l'utilisation des combustibles et des équipements de substitution;

- le soutien à la reconversion des acteurs actuels de la filière charbon de bois vers d'autres activités économiques;

- le renforcement des institutions concernées par la planification de ce secteur et la promotion de la participation des acteurs publics et privés.

La mise en œuvre opérationnelle de cette stratégie se fera à travers deux composantes principales : la composante « offre » ou composante de gestion de l’approvisionnement durable en combustibles domestiques et la composante « demande » ou composante gestion de la demande et substitution des combustibles.

Les activités de la composante « offre » s’articulent spécifiquement autour de :

- Un inventaire forestier et pastoral sur 600.000 ha dans les régions de KOLDA et TAMBACOUNDA afin de générer les données techniques nécessaires à la conception de plans d’aménagement durables des forêts ;

- Une série d’évaluations participatives des zones d’intervention du Programme, afin d’obtenir les données socio-économiques nécessaires à la préparation, avec les communautés locales des plans de gestion des ressources forestières. Ces évaluations participatives accorderont une attention particulière à l’identification des problèmes de développement spécifiques aux femmes, aux besoins de formation spécifiques et de renforcement des capacités et des institutions locales ;

- Une évaluation de la disponibilité en bois mort au niveau national afin d’analyser la situation et de déterminer les perspectives d’approvisionnement des zones rurales en combustibles ligneux à des fins de subsistance ;

- la mise en place d’un système de suivi permanent de la dynamique de végétation, l’enjeu est d’actualiser l’information à intervalles de temps régulier, pour répondre aux besoins exprimés par les planificateurs des ressources forestières et pastorales, car les prélèvements annuels de bois ne peuvent excéder la productivité des formations, sans entamer le potentiel de production ligneux.

- la mise en œuvre de systèmes de gestion forestière communautaire sur une superficie de 300.000 ha pour la production de combustibles ligneux. Dans ce cadre le Programme respectera une zone tampon autour du Parc du Niokolo-koba qui est une réserve de la biosphère. Les systèmes de gestion qui seront mis en œuvre vont accorder une attention toute particulière aux problèmes de gestion foncière par la prise en charge des différents usages (usages agricoles, pastoraux, exploitation de produits non ligneux) et les besoins de développement des communautés rurales participantes ;

- l’assistance technique et les services de vulgarisation aux communautés rurales participantes ainsi qu’aux ONG pour la mise en œuvre des modules de gestion participative et pour la production et la commercialisation de combustibles ligneux et autres produits ligneux et non ligneux ;

- le soutien à la création de micro-entreprises rurales telles que des unités communautaires de carbonisation, des unités de transformation agro-forestières etc..

- la mise en œuvre d’une stratégie de communication globale afin de soutenir la mise en œuvre de la composante gestion de l’approvisionnement durable en combustibles ligneux.

Quant à la composante « demande », ses activités s’articulent autour de :

- l’assistance à la réorganisation et la modernisation du commerce urbain du charbon afin d’arriver à des accords d’approvisionnement à long terme (contrats), entre les communautés rurales et les exploitants ou commerçants urbains

- promouvoir l’utilisation de sources d’énergie alternatives telles le gaz (GPL) et le kérosène dans les usages domestiques, aux fins de limiter la demande en combustibles ligneux, et par conséquent la pression exercée sur les formations forestières ;

- promouvoir les mesures d’économie d’énergie à l’utilisation, avec l’entrée massive dans les foyers de fourneaux plus économes en énergie que les fourneaux traditionnellement utilisés ;

- garantir l’entrée sans entrave des combustibles ligneux produits par les communautés rurales dans les marchés urbains et permettre la normalisation des unités de commercialisation et la propreté de l’environnement urbain (ensachage de charbon)

- apporter une assistance technique et un soutien à la diversification des activités et la reconversion des exploitants forestiers urbains vers d’autres secteurs économiques ;

- la mise en œuvre d’une stratégie de communication globale afin de soutenir l’exécution de la composante gestion de la demande et substitution



ROLE DES POPULATIONS LOCALES DANS LA MISE EN ŒUVRE DU PROGEDE

Depuis bientôt une vingtaine d’années, le Service forestier a fait de l’approche participative un axe stratégique essentiel dans le dispositif de mise en œuvre de la politique forestière. Cette option a été confirmée en 1993 lors de l’adoption du Plan d’Action Forestier du Sénégal qui a réaffirmé la place prépondérante de cette approche dans la politique forestière.

Par ailleurs, avec les récentes lois sur la décentralisation, le Sénégal a transféré une part importante de compétences de gestion des ressources naturelles aux collectivités locales.

Les volets Offre et Demande du programme vont ainsi impliquer les populations locales dans leurs différentes activités. Cette implication se fera sous forme de partenariat, les mettant à contribution dans tous le processus de planification et de mise en œuvre des activités, en vue de leur permettre de tirer des revenus supplémentaires suffisamment intéressants.

L'introduction de la foresterie rurale au niveau des villages va permettre aux groupements d'avoir des revenus supplémentaires grâce à l'exploitation des bois villageois et à la mise en œuvre de petits projets générateurs de revenus.

En particulier, le PROGEDE va mettre l’accent sur le rôle des femmes. Ainsi des séminaires de formation spécifique seront organisés à leur intention dans l’objectif d’accroître leur autonomie et leur capacités techniques à prendre en charge les activités pertinentes en matière de gestion des ressources naturelles et d’économie d’énergie en vue d’une bonne maîtrise de l’offre et de la demande.

Le PROGEDE entend donc opérationaliser la démarche participative en associant systématiquement les collectivités locales et les populations à la base à toutes les étapes de sa démarche, pour aboutir à des plans d’aménagement réellement participatifs, seul gage de leur durabilité.

Cette démarche est d’autant plus pertinente que l’exploitation est un domaine d’activité caporalisé par des exploitants urbains et utilisant une main d’œuvre expatriée, en excluant systématiquement les populations locales ; et cette situation a été source de bien de frustrations et de rancœurs qu’il s’agit aujourd’hui de panser .


LES MOYENS D'INTERVENTION DU PROGEDE

Le PROGEDE est un programme ambitieux dont la mise en œuvre requiert d’importantes ressources.

En ce qui concerne les ressources humaines, le PROGEDE dispose d’une unité de coordination basée à Dakar et d’unités décentralisées basées à TAMBACOUNDA et KOLDA. Par ailleurs, Le Programme a recruté des cadres nationaux spécialisés dans les domaines de l’inventaire, de l’économie forestière, des combustibles domestiques, du suivi-évaluation etc.. et en plus de ce personnel, le Programme s’appuiera sur les ressources humaines des ministères concernés pour conduire ses activités. C’est là l’occasion de souligner que pour une fois, le PROGEDE compte rompre avec la séparation physique du personnel du projet et de celui de l’administration, séparation qui a souvent hypothéqué les chances de prise en charge réelle du suivi des activités des projets a leur disparition, par le personnel de l’administration.

Pour ce qui concerne les moyens financiers, le PROGEDE est financé pour un montant global de 19.90 millions de dollars dont 1.20 millions par le Gouvernement du Sénégal, 5.20 millions par la Banque Mondiale, 4.70 millions par le Fonds Mondial pour l’Environnement et 8.80 millions par la coopération néerlandaise. A noter qu’une part importante de ce financement est constitué d’un prêt remboursable par le Gouvernement du Sénégal.


POUR CONCLURE

Pour conclure, je dois rappeler que le PROGEDE est un programme de type nouveau, avec une démarche nouvelle, qui entend innover pour s'inscrire résolument dans la dynamique nouvelle de régionalisation tracée par le Gouvernement, et dans ce sens, nous attendons la contribution des collectivités locales et des autorités administratives à toutes les étapes d'exécution de programme.

Nous sommes conscients des frustrations accumulées par les populations locales qui, depuis de nombreuses années, sont exclues du système d'exploitation des forêts qui se passe pourtant derrière la fenêtre de leur maison. Nous leur assurons de notre ferme volonté de changer radicalement ce système pour leur donner la place qui est la leur dans les systèmes d'exploitation des ressources de leur terroir. Ces populations seront les cibles et les partenaires privilégiés du PROGEDE.



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