Les collectivités locales qui constituent la porte d’entrée du développement local ont bénéficié en 2006, d’un programme ambitieux, le Programme National de Développement Local (PNDL). « Le PNDL a été adopté pour harmoniser et coordonner les interventions de ses partenaires au développement dans le domaine de la décentralisation et du développement local », selon ses initiateurs. Ce programme se veut un pilier du Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP), dans l’optique d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) à atteindre avant 2015.
Ainsi, le PNDL fait la synthèse de deux programmes antérieurs financés par la Banque mondiale (BM) pour cinq ans chacun: le Programme National d’Infrastructures Rurales (PNIR) qui a fait des réalisations dans plus de 100 communautés rurales du pays, de l’hydraulique rurale aux équipementiers scolaires, sanitaires, en passant par les activités génératrices de revenus, la formation ; et le Programme Fonds de Développement Social exécuté par l’Agence du Fonds de Développement Social (AFDS), qui aussi, présente un bilan notable en matière d’appui au développement de base. Toutefois, avec un décaissement à plus 95 %, le PNIR n'a pas réalisé l'intégralité de ses objectifs. Le taux d'insatisfaction est estimé à 7 %, auquel s’ajoute une dette cumulé estimé à plus d’un milliard. Des manquements qui devaient être pris en compte dans le cadre du PNDL. En effet, l’approche retenue dans la mise en œuvre de ce dernier, est d’intervenir dans les 321 communautés rurales et dans les zones urbaines et périurbaines de 52 communes pauvres pour cinq ans, 2006-2011, tout en capitalisant et en consolidant les acquis de ces deux Programmes antérieurs.
L’espoir suscité avec la mise en place du PNDL qui, dans ses objectifs comme dans sa conception et l’élaboration des projets, met l’accent sur l’implication des populations, via les élus locaux et les Organisations Communautaires de Base (OCB), mettait ainsi en veilleuse le désespoir né de la fin de ces deux Programmes. Pour y arriver, le PNDL comporte quatre composantes : appui à la politique de décentralisation, de déconcentration et au développement local participatif.
Ainsi , il est prévu, pour la durée du projet, cinq ans, d’investir dans les villes et villages du Sénégal la somme de 234 milliards F Cfa. Ces ressources proviennent du budget de l’État et des collectivités locales (73%), et de la Banque mondiale, via l’IDA (24%), soit 1/4 du financement du programme), représentant 25 milliards F Cfa, environ 50,5 millions de dollars américains. Ce financement acquis auprès de la BM, à travers le Projet de Développement Local Participatif (PDLP) n’est pas un don, mais un crédit à long terme. En effet, ce « crédit obéit aux termes standards des crédits IDA avec 0.35% de frais d'engagement et 0.75% de commission, pour une période de maturité du crédit de 40 ans y compris les 10 premières années de grâce ». Donc, un emprunt porté sur la tête de chaque Sénégalais, et que l’on paiera un jour. Pour ce qui est de la répartition des ressources du programme : 85%, soit 194 milliards de francs Cfa devaient être consacrés au développement local, 5% au renforcement des capacités, 8% aux activités de coordination et 7% à l’appui à la décentralisation.
Le bilan fait des 10 premiers mois après la mise en place de ce plan, en septembre 2007, a vu la signature de plusieurs conventions de financement d’un montant de 8.322.800.000 F.Cfa à 207 collectivités locales des dix régions du pays excepté Dakar. L’euphorie était de mise du côté des autorités et des gestionnaires du projet. En effet, « au-delà du programme classique, le PNDL traduit une rupture et une vision ambitieuse de redéploiement nécessaire pour promouvoir le développement local », selon Ousmane Masseck Ndiaye lors de la réunion du Comité de pilotage.
A titre d’exemples, pour l’année 2007:
A Kolda un montant d’une valeur de 1 193 395 259 FCfa a été alloué aux 32 communautés rurales sur les 43 que compte la région, destiné principalement aux secteurs prioritaires : éducation (62%), hydraulique (21%) et de santé (17%). Pour les 16 communautés rurales de la région de Saint-Louis, le PNDL avait prévu d’injecter 728 628 000 F Cfa. Plus de 2,4 milliards FCfa étaient prévus pour les 46 communautés rurales de la région de Louga, dont un premier montant de 1,750 milliard F Cfa pour des infrastructures sociales de base, notamment les pistes communautaires, l’accès à l’eau, à l’éducation et à la santé. Une enveloppe de 1,8 milliard F Cfa était prévue pour les 33 communautés rurales de la région de Fatick pour leur permettre de réaliser des infrastructures de base et de mieux renforcer leurs capacités. La somme de 1 361 700 000 F Cfa, était prévue pour les 16 communautés rurales parmi les 34 que compte la région de Diourbel. Pourtant les PCR de Diourbel avaient jugé que les 10% représentant la contrepartie exigée par le PNDL à tout bénéficiaire étai élevée. Au total, c’est une enveloppe de plus de 2 milliards F Cfa qui était prévue pour les 41 communautés rurales et 2 communes la région de Kaolack. Enfin, c’est le même montant qui était prévu pour les 31 communautés rurales de la région de Thiès sont concernées par le programme.
Ainsi, il était prévu d’injecter, environ 15 milliards dans les 321 communautés rurales et 52 communes les plus pauvres dans toutes les régions (Macky Sall Premier ministre).
En outre, comme bilan, on nous parle de la réalisation de 1224,4 km de pistes production sur un objectif de 1 800 km, dans 94 communautés rurales, l’actualisation de 146 plans locaux de développement, 1026 micro-projets financés. Alors que les responsables du programme rappellent, le non-respect par l’Etat du Sénégal, de ses engagements. Sur les 1,2 milliards F Cfa qu’il devait verser au PNDL, seuls 200 000 000 F Cfa ont été débloqués (lors de la réunion du comité de pilotage en septembre 2007). Pourtant depuis juillet 2007, on nous annonçait que 90% des financements dans le cadre du PNDL sont disponibles dans un compte spécial et n’attendent que la mobilisation des collectivités locales dans le cadre de leurs Plans de Développement Locaux (PDL).
Mais après seulement un an de mise en œuvre du PNDL, un trou de 90 millions F Cfa a été relevé dans la gestion des ressources. Par exemple le PNDL a payé des badges pour 2 450 000 F Cfa, sans que l’on sache combien de badges ont été acquis à ce prix, ni combien cela représente par unité. En outre, en mars 2008, une mission de supervision du projet de la Banque mondiale a mis à l’index un détournement de près de 151 millions F Cfa, somme réclamée par la BM. Ce montant est imputé au Ministère de la Décentralisation et des Collectivités Locales (MDCL), qui l’a inscrit dans ses dépenses de fonctionnement pour ses besoins propres, ce qui était contre les dispositifs prévus dans le cadre du PNDL. Cette situation a abouti au limogeage du Secrétaire exécutif du Programme, à qui le ministère reproche des «questions de confiance et d’absence de résultats ».
Vous conviendrez avec moi, qu’au-delà du manque de transparence qui entour cette « affaire » que se sont des sommes colossales qui sont en jeu, mais vraiment quel est l’état de nos collectivités locales après cette « pluies » de milliards ? Il y a aussi la question des dettes contractées par les collectivités locales dans le cadre du PNIR et de l’AFDS, comme le cas des communautés rurales de la région de Diourbel, qu’en est-il ? Pourtant le ministère s’était engagé à les régler. Pourquoi avoir mis un terme à ces Programmes, alors que tout le monde saluait leurs actions ? A mi parcours de l’exécution du PNDL, quel est l’état de la pauvreté dans le pays, notamment dans les collectivités locales ayant bénéficié de l’appui de ce plan ? Qui gère vraiment le PNDL et pour le compte de qui ? Et quelles perspectives pour les collectivités après les cinq ans d’exécution du PNDL ? Autrement dit, est ce que les budgets locaux sont aujourd’hui autonomes pour poursuivre les actions entreprise pendant ce programme ?
Entre 1995 et 2005, les bailleurs de fonds qui soutiennent la décentralisation sénégalaise, ont injecté dans les différents programmes et projets, quelques 195 milliards FCfa, mais le bilan fait de tout cela était très loin des objectifs escomptés. Le développement ne se décrète pas. C’est pas, non plus, à coup de milliards qu’on le construira. Le développement c’est une culture qu’on construit dans la transparence et l’efficacité, mais pas par de grandes déclarations politiciennes, ni sur la corruption.
Dr Djibril DIOP
Chargé de cours Université de Montréal (Canada)
djibril.diop@umontreal.ca
Ainsi, le PNDL fait la synthèse de deux programmes antérieurs financés par la Banque mondiale (BM) pour cinq ans chacun: le Programme National d’Infrastructures Rurales (PNIR) qui a fait des réalisations dans plus de 100 communautés rurales du pays, de l’hydraulique rurale aux équipementiers scolaires, sanitaires, en passant par les activités génératrices de revenus, la formation ; et le Programme Fonds de Développement Social exécuté par l’Agence du Fonds de Développement Social (AFDS), qui aussi, présente un bilan notable en matière d’appui au développement de base. Toutefois, avec un décaissement à plus 95 %, le PNIR n'a pas réalisé l'intégralité de ses objectifs. Le taux d'insatisfaction est estimé à 7 %, auquel s’ajoute une dette cumulé estimé à plus d’un milliard. Des manquements qui devaient être pris en compte dans le cadre du PNDL. En effet, l’approche retenue dans la mise en œuvre de ce dernier, est d’intervenir dans les 321 communautés rurales et dans les zones urbaines et périurbaines de 52 communes pauvres pour cinq ans, 2006-2011, tout en capitalisant et en consolidant les acquis de ces deux Programmes antérieurs.
L’espoir suscité avec la mise en place du PNDL qui, dans ses objectifs comme dans sa conception et l’élaboration des projets, met l’accent sur l’implication des populations, via les élus locaux et les Organisations Communautaires de Base (OCB), mettait ainsi en veilleuse le désespoir né de la fin de ces deux Programmes. Pour y arriver, le PNDL comporte quatre composantes : appui à la politique de décentralisation, de déconcentration et au développement local participatif.
Ainsi , il est prévu, pour la durée du projet, cinq ans, d’investir dans les villes et villages du Sénégal la somme de 234 milliards F Cfa. Ces ressources proviennent du budget de l’État et des collectivités locales (73%), et de la Banque mondiale, via l’IDA (24%), soit 1/4 du financement du programme), représentant 25 milliards F Cfa, environ 50,5 millions de dollars américains. Ce financement acquis auprès de la BM, à travers le Projet de Développement Local Participatif (PDLP) n’est pas un don, mais un crédit à long terme. En effet, ce « crédit obéit aux termes standards des crédits IDA avec 0.35% de frais d'engagement et 0.75% de commission, pour une période de maturité du crédit de 40 ans y compris les 10 premières années de grâce ». Donc, un emprunt porté sur la tête de chaque Sénégalais, et que l’on paiera un jour. Pour ce qui est de la répartition des ressources du programme : 85%, soit 194 milliards de francs Cfa devaient être consacrés au développement local, 5% au renforcement des capacités, 8% aux activités de coordination et 7% à l’appui à la décentralisation.
Le bilan fait des 10 premiers mois après la mise en place de ce plan, en septembre 2007, a vu la signature de plusieurs conventions de financement d’un montant de 8.322.800.000 F.Cfa à 207 collectivités locales des dix régions du pays excepté Dakar. L’euphorie était de mise du côté des autorités et des gestionnaires du projet. En effet, « au-delà du programme classique, le PNDL traduit une rupture et une vision ambitieuse de redéploiement nécessaire pour promouvoir le développement local », selon Ousmane Masseck Ndiaye lors de la réunion du Comité de pilotage.
A titre d’exemples, pour l’année 2007:
A Kolda un montant d’une valeur de 1 193 395 259 FCfa a été alloué aux 32 communautés rurales sur les 43 que compte la région, destiné principalement aux secteurs prioritaires : éducation (62%), hydraulique (21%) et de santé (17%). Pour les 16 communautés rurales de la région de Saint-Louis, le PNDL avait prévu d’injecter 728 628 000 F Cfa. Plus de 2,4 milliards FCfa étaient prévus pour les 46 communautés rurales de la région de Louga, dont un premier montant de 1,750 milliard F Cfa pour des infrastructures sociales de base, notamment les pistes communautaires, l’accès à l’eau, à l’éducation et à la santé. Une enveloppe de 1,8 milliard F Cfa était prévue pour les 33 communautés rurales de la région de Fatick pour leur permettre de réaliser des infrastructures de base et de mieux renforcer leurs capacités. La somme de 1 361 700 000 F Cfa, était prévue pour les 16 communautés rurales parmi les 34 que compte la région de Diourbel. Pourtant les PCR de Diourbel avaient jugé que les 10% représentant la contrepartie exigée par le PNDL à tout bénéficiaire étai élevée. Au total, c’est une enveloppe de plus de 2 milliards F Cfa qui était prévue pour les 41 communautés rurales et 2 communes la région de Kaolack. Enfin, c’est le même montant qui était prévu pour les 31 communautés rurales de la région de Thiès sont concernées par le programme.
Ainsi, il était prévu d’injecter, environ 15 milliards dans les 321 communautés rurales et 52 communes les plus pauvres dans toutes les régions (Macky Sall Premier ministre).
En outre, comme bilan, on nous parle de la réalisation de 1224,4 km de pistes production sur un objectif de 1 800 km, dans 94 communautés rurales, l’actualisation de 146 plans locaux de développement, 1026 micro-projets financés. Alors que les responsables du programme rappellent, le non-respect par l’Etat du Sénégal, de ses engagements. Sur les 1,2 milliards F Cfa qu’il devait verser au PNDL, seuls 200 000 000 F Cfa ont été débloqués (lors de la réunion du comité de pilotage en septembre 2007). Pourtant depuis juillet 2007, on nous annonçait que 90% des financements dans le cadre du PNDL sont disponibles dans un compte spécial et n’attendent que la mobilisation des collectivités locales dans le cadre de leurs Plans de Développement Locaux (PDL).
Mais après seulement un an de mise en œuvre du PNDL, un trou de 90 millions F Cfa a été relevé dans la gestion des ressources. Par exemple le PNDL a payé des badges pour 2 450 000 F Cfa, sans que l’on sache combien de badges ont été acquis à ce prix, ni combien cela représente par unité. En outre, en mars 2008, une mission de supervision du projet de la Banque mondiale a mis à l’index un détournement de près de 151 millions F Cfa, somme réclamée par la BM. Ce montant est imputé au Ministère de la Décentralisation et des Collectivités Locales (MDCL), qui l’a inscrit dans ses dépenses de fonctionnement pour ses besoins propres, ce qui était contre les dispositifs prévus dans le cadre du PNDL. Cette situation a abouti au limogeage du Secrétaire exécutif du Programme, à qui le ministère reproche des «questions de confiance et d’absence de résultats ».
Vous conviendrez avec moi, qu’au-delà du manque de transparence qui entour cette « affaire » que se sont des sommes colossales qui sont en jeu, mais vraiment quel est l’état de nos collectivités locales après cette « pluies » de milliards ? Il y a aussi la question des dettes contractées par les collectivités locales dans le cadre du PNIR et de l’AFDS, comme le cas des communautés rurales de la région de Diourbel, qu’en est-il ? Pourtant le ministère s’était engagé à les régler. Pourquoi avoir mis un terme à ces Programmes, alors que tout le monde saluait leurs actions ? A mi parcours de l’exécution du PNDL, quel est l’état de la pauvreté dans le pays, notamment dans les collectivités locales ayant bénéficié de l’appui de ce plan ? Qui gère vraiment le PNDL et pour le compte de qui ? Et quelles perspectives pour les collectivités après les cinq ans d’exécution du PNDL ? Autrement dit, est ce que les budgets locaux sont aujourd’hui autonomes pour poursuivre les actions entreprise pendant ce programme ?
Entre 1995 et 2005, les bailleurs de fonds qui soutiennent la décentralisation sénégalaise, ont injecté dans les différents programmes et projets, quelques 195 milliards FCfa, mais le bilan fait de tout cela était très loin des objectifs escomptés. Le développement ne se décrète pas. C’est pas, non plus, à coup de milliards qu’on le construira. Le développement c’est une culture qu’on construit dans la transparence et l’efficacité, mais pas par de grandes déclarations politiciennes, ni sur la corruption.
Dr Djibril DIOP
Chargé de cours Université de Montréal (Canada)
djibril.diop@umontreal.ca