Pour ceux qui ont vécu en Occident, c’est bien l’individualisme, base de l’organisation sociale, que l’on constate. En effet, depuis les lumières, l’individu est devenu le centre de gravité des relations humaines à place du groupe, et le groupe n’existe que par l’individu. Autrement dit, ce sont les individualités qui forment le groupe. Tout à fait le contraire de l’Afrique, où l’individu n’existe que par le groupe, où l’individu n’est rien en tant que tel. Sa véritable signification il le retrouve dans le groupe, la société. Ceci est vrai, par exemple, pour la gestion des ressources naturelles comme la terre, qui est un bien inaliénable par un individu et l’éducation de l’enfant, qui incombait à tout le groupe social. Toutefois, en Occident, les individualités qui forment le groupe, se retrouvent sur un élément intégrateur dans lequel tous les membres se reconnaissent fondamentalement et respectent : l’intérêt général. Or chez nous, on pourrait se demander si cette question de l’intérêt général a encore un sens, notamment dans les relations entre individus et des rapports avec la chose publique, comme c’était le cas autrefois? En effet, à y regarder de près, il semble que toutes ces règles sociales qui faisaient que le groupe primait sur l’individu sont en train de partir en décrépitude. Peux être cette introduction va surprendre quelques lecteurs à la vue du titre, mais ils comprendront en poursuivant la lecture.
Ce qui s’est passé à N’Dindy, Ndoulo et dans d’autres localités du pays et les plaintes déposées contre les représentations de l’Administration territoriale sont un précédent très dangereux qui vient alourdir un tableau déjà sombre d’un pays qui plonge dans les ténèbres d’une paupérisation croissante. Cette situation est d’autant plus dangereuse que c’est ceux qui sont chargés d’appliquer « la justice », qui sont les premiers à la piétiner, et ceci au nom d’intérêts particuliers. Par ailleurs, on constat qu’à travers les gesticulations et les discours d’intention, aussi bien des autorités en place que des partis d’opposition, la politique va encore primer sur toutes les questions de développement dans la gestion des nos collectivités locales. À quelques rares candidats, comme Lamine Ba aux Parcelles Assainies et Abdoulaye Matar Diop à Dakar, qui ont clairement exprimé le sens du pourquoi de leur engagement, on se demande même, si ceux qui prétendent diriger les collectivités locales du pays demain, savent la raison première qui les pousse à se porter candidat hormis, bien entendu, de trouver une petite poche pour s’occuper de leur ventre? La décentralisation se trouve ainsi, à l’image de la gestion du pays depuis l’indépendance, piégée et vidée de son sens premier. Par décentralisation on entend d’abord et avant tout, favoriser le développement local, qui n’est pas seulement un concept, un mot vide de sens, mis à toutes les sauces, à travers colloques, séminaires et autres rencontres, imaginés que pour regrouper toujours les mêmes personnes, avides de perdium et autres primes de participation, sans réel souci sur les conditions de vie des populations et comment les améliorer. Les mouvements de contestations et les réactions de populations face à des décisions, de ceux qui devaient les écouter d’abord, avant d’agir et de n’agir que pour défende leurs intérêts, comme c’est si bien défini dans le Code des collectivités locales « la gestion des affaires locales », notés ça et là semblent ne pas revêtir tout son sens pour ces derniers. En effet, le tout politique qui a prévalu jusque-là, dans la gestion des collectivités locales, a complètement occulté, les vraies raisons de la décentralisation et ses principaux objectifs. On s’est retrouvé, ainsi, piégé d’une situation où se sont les politiciens qui dictent leur façon de voir sans imputabilité aucune et que, les administrés-électeurs, ne peuvent et de doivent être, que de passifs spectateurs de leur histoire et de leur destin qui s’inscrivent sans eux et en dehors d’eux.
Encore, une fois, le manque de moyens ne justifie pas l’état actuel de nos collectivités locales et par ricochet de notre décentralisation. Non loin de là. Les ressources sont belles et bien là. Mais c’est simplement l’usage que l’on en fait qui est à regretter. La vraie question est plutôt est-ce que l’intérêt général a encore un sens chez nous, ou l’individualisme « sauvage » que nous remarquions en Occident a pris le pas plus que toute autre considération ? Si l’individualisme occidental est toujours structuré par des règles sociales acceptées de tous, et auxquelles, sont soumis tout individu jugé coupable d’y feindre, en quelque sorte, le contrat social ; chez nous, tel semble ne pas être le cas. Alors n’y a-t-il pas lieu de se demander est-ce qu’il existe encore un contrat social chez nous, au nom de quoi et pour qui, il s’applique ? Certes, il n’est pas simple de trouver des réponses à ces questions. Pour dire à quel point, le contrat social qui servait de ciment dans notre société avant est devenu méconnaissable. Malheureusement, cette situation va, en s’accentuant, et personne ne semble vraiment saisir, la dimension du mal et de ses conséquences pour notre existence et celui de nos enfants dans ce monde où les repères identitaires ont fondamentaux pour « exister » au sens philosophique du terme. Au-delà de ces questions existentielles, il faut se nourrir, il faut se loger, il faut satisfaire, en un mot, ses besoins élémentaires et naturels. Pour cela, ne faut-il pas se demander, si notre façon de voir le monde et de faire pour participer à ce monde, nous accorde-t-elle une chance de survie sur cette Terre ? La question reste posée.
Au vu du bilan de la gestion de nos collectivités locales ces huit dernières années, pour se limiter uniquement au mandat des élus sortants, qu'est-ce qui a vraiment été mise en œuvre pour que les questions élémentaires de développement ne viennent pas se poser à nouveau, aux élus qui vont prendre le relais à partir du 22 mars prochain, c’est-à-dire, l’accès à l’eau potable, aux soins de santé, envoyer ses enfants à l’école, manger à sa faim, etc.? Sans être pessimiste du tout, je suis certains que ces enjeux resteront encore pour les cinq années à venir, la préoccupation majeure de 6 Sénégalais sur 10, sans que cela ne trouve de solution. Alors, à quoi ça sert de décentraliser si les maigres ressources doivent encore aller à entretenir une classe d'élites (comme les conseillers régionaux), qui ne se souci point de l’intérêt général, et des souffrances des millions de ses compatriotes ? La base élémentaire de (pour comprendre) la décentralisation, c’est une technique administrative pout favoriser une meilleure répartition des ressources en fonction de la population sur le territoire, une solidarité que la collectivité nationale décide « volontairement » de faire pour aider les plus faibles et le plus vulnérable des membres, à vivre dignement et à mieux s’identifier à cette dernière. Malheureusement, la pratique nous démontre tout le contraire de cette philosophie. Vous conviendrez donc parfaitement avec moi que le groupe, la société, qui était autrefois au centre de toute notre organisation interrelationnelle n’a plus de correspondance dans notre vécu actuel et surtout dans la manière dont nous interagissons et nous nous voyons individuellement, dans notre collectivité nationale. Dès lors, deux questions élémentaires se posent nécessairement. Ne devient-il pas pertinent de s’interroger, après tant d’années de décentralisation, notamment depuis la responsabilisation des collectivités locales avec le transfert de compétences à ces dernières, est-ce que c’est ça que nous cherchions ou pas ? Si non, qu’est ce que nous devions faire pour aller vers ce que nous cherchions à travers ce processus?
Dr. Djibril DIOP
djibril.diop@umontreal.ca
Chargé de Cours Université de Montréal (Canada)
Ce qui s’est passé à N’Dindy, Ndoulo et dans d’autres localités du pays et les plaintes déposées contre les représentations de l’Administration territoriale sont un précédent très dangereux qui vient alourdir un tableau déjà sombre d’un pays qui plonge dans les ténèbres d’une paupérisation croissante. Cette situation est d’autant plus dangereuse que c’est ceux qui sont chargés d’appliquer « la justice », qui sont les premiers à la piétiner, et ceci au nom d’intérêts particuliers. Par ailleurs, on constat qu’à travers les gesticulations et les discours d’intention, aussi bien des autorités en place que des partis d’opposition, la politique va encore primer sur toutes les questions de développement dans la gestion des nos collectivités locales. À quelques rares candidats, comme Lamine Ba aux Parcelles Assainies et Abdoulaye Matar Diop à Dakar, qui ont clairement exprimé le sens du pourquoi de leur engagement, on se demande même, si ceux qui prétendent diriger les collectivités locales du pays demain, savent la raison première qui les pousse à se porter candidat hormis, bien entendu, de trouver une petite poche pour s’occuper de leur ventre? La décentralisation se trouve ainsi, à l’image de la gestion du pays depuis l’indépendance, piégée et vidée de son sens premier. Par décentralisation on entend d’abord et avant tout, favoriser le développement local, qui n’est pas seulement un concept, un mot vide de sens, mis à toutes les sauces, à travers colloques, séminaires et autres rencontres, imaginés que pour regrouper toujours les mêmes personnes, avides de perdium et autres primes de participation, sans réel souci sur les conditions de vie des populations et comment les améliorer. Les mouvements de contestations et les réactions de populations face à des décisions, de ceux qui devaient les écouter d’abord, avant d’agir et de n’agir que pour défende leurs intérêts, comme c’est si bien défini dans le Code des collectivités locales « la gestion des affaires locales », notés ça et là semblent ne pas revêtir tout son sens pour ces derniers. En effet, le tout politique qui a prévalu jusque-là, dans la gestion des collectivités locales, a complètement occulté, les vraies raisons de la décentralisation et ses principaux objectifs. On s’est retrouvé, ainsi, piégé d’une situation où se sont les politiciens qui dictent leur façon de voir sans imputabilité aucune et que, les administrés-électeurs, ne peuvent et de doivent être, que de passifs spectateurs de leur histoire et de leur destin qui s’inscrivent sans eux et en dehors d’eux.
Encore, une fois, le manque de moyens ne justifie pas l’état actuel de nos collectivités locales et par ricochet de notre décentralisation. Non loin de là. Les ressources sont belles et bien là. Mais c’est simplement l’usage que l’on en fait qui est à regretter. La vraie question est plutôt est-ce que l’intérêt général a encore un sens chez nous, ou l’individualisme « sauvage » que nous remarquions en Occident a pris le pas plus que toute autre considération ? Si l’individualisme occidental est toujours structuré par des règles sociales acceptées de tous, et auxquelles, sont soumis tout individu jugé coupable d’y feindre, en quelque sorte, le contrat social ; chez nous, tel semble ne pas être le cas. Alors n’y a-t-il pas lieu de se demander est-ce qu’il existe encore un contrat social chez nous, au nom de quoi et pour qui, il s’applique ? Certes, il n’est pas simple de trouver des réponses à ces questions. Pour dire à quel point, le contrat social qui servait de ciment dans notre société avant est devenu méconnaissable. Malheureusement, cette situation va, en s’accentuant, et personne ne semble vraiment saisir, la dimension du mal et de ses conséquences pour notre existence et celui de nos enfants dans ce monde où les repères identitaires ont fondamentaux pour « exister » au sens philosophique du terme. Au-delà de ces questions existentielles, il faut se nourrir, il faut se loger, il faut satisfaire, en un mot, ses besoins élémentaires et naturels. Pour cela, ne faut-il pas se demander, si notre façon de voir le monde et de faire pour participer à ce monde, nous accorde-t-elle une chance de survie sur cette Terre ? La question reste posée.
Au vu du bilan de la gestion de nos collectivités locales ces huit dernières années, pour se limiter uniquement au mandat des élus sortants, qu'est-ce qui a vraiment été mise en œuvre pour que les questions élémentaires de développement ne viennent pas se poser à nouveau, aux élus qui vont prendre le relais à partir du 22 mars prochain, c’est-à-dire, l’accès à l’eau potable, aux soins de santé, envoyer ses enfants à l’école, manger à sa faim, etc.? Sans être pessimiste du tout, je suis certains que ces enjeux resteront encore pour les cinq années à venir, la préoccupation majeure de 6 Sénégalais sur 10, sans que cela ne trouve de solution. Alors, à quoi ça sert de décentraliser si les maigres ressources doivent encore aller à entretenir une classe d'élites (comme les conseillers régionaux), qui ne se souci point de l’intérêt général, et des souffrances des millions de ses compatriotes ? La base élémentaire de (pour comprendre) la décentralisation, c’est une technique administrative pout favoriser une meilleure répartition des ressources en fonction de la population sur le territoire, une solidarité que la collectivité nationale décide « volontairement » de faire pour aider les plus faibles et le plus vulnérable des membres, à vivre dignement et à mieux s’identifier à cette dernière. Malheureusement, la pratique nous démontre tout le contraire de cette philosophie. Vous conviendrez donc parfaitement avec moi que le groupe, la société, qui était autrefois au centre de toute notre organisation interrelationnelle n’a plus de correspondance dans notre vécu actuel et surtout dans la manière dont nous interagissons et nous nous voyons individuellement, dans notre collectivité nationale. Dès lors, deux questions élémentaires se posent nécessairement. Ne devient-il pas pertinent de s’interroger, après tant d’années de décentralisation, notamment depuis la responsabilisation des collectivités locales avec le transfert de compétences à ces dernières, est-ce que c’est ça que nous cherchions ou pas ? Si non, qu’est ce que nous devions faire pour aller vers ce que nous cherchions à travers ce processus?
Dr. Djibril DIOP
djibril.diop@umontreal.ca
Chargé de Cours Université de Montréal (Canada)